Le 27 avril 1413, les artisans et bourgeois de Paris se soulèvent à
l'appel du duc de Bourgogne Jean sans Peur. Il va s'ensuivre une guerre
civile et, plus gravement, la reprise de l'invasion anglaise, après la
longue «embellie» qu'a connue la France depuis le roi Charles V le Sage.
L'assassinat du duc d'Orléans par les hommes du duc de Bourgogne, quelques années plus tôt, a inauguré la «querelle des Armagnacs et des Bourguignons».
Tandis que se querellent les factions des oncles du roi, le
mécontentement gronde dans la population parisienne, exacerbée par les
dépenses outracières de la Cour.
Le 30 janvier 1413, le roi Charles VI le Fou
convoque les états généraux de langue d'oïl pour obtenir les subsides
dont il a le plus grand besoin. Le duc de Bourgogne profite de cette
tribune pour soigner sa popularité et se rendre indispensable aux
Parisiens.
Jean sans Peur s'allie faute de mieux à une faction populaire qui
regroupe des bouchers de la Grande boucherie de Saint-Jacques, une
corporation mal intégrée à la bourgeoisie parisienne. Son chef de file
est l'écorcheur Simon Caboche, d'où leur appellation de cabochiens ou écorcheurs.
En vue d'abaisser l'autorité royale, il pousse à la formation d'une
commission de réforme où siège un certain Pierre Cauchon, docteur de
l'Université de Paris, qui se rendra célèbre au procès de Jeanne d'Arc.
Excédés par la résistance du roi et de ses partisans, les partisans
du duc se soulèvent et attaquent la Bastille où s'est retranché le
prévôt de Paris Pierre des Essarts. Ils obtiennent son exécution après
une parodie de jugement. Singulier prélude à une autre prise de la
Bastille, près de quatre siècles plus tard.
L'Université profite de l'agitation pour préparer une réforme administrative connue sous le nom d'ordonnances cabochiennes
(bien qu'elle n'ait rien à voir avec le dénommé Caboche). Ce texte de
259 articles tend à brider le pouvoir monarchique et prévoit une gestion
partagée des finances publiques. Tentant de lutter contre les abus des
officiers royaux, il aboutit à renforcer néanmoins les pouvoirs de la
Chambre des Comptes et du Parlement, et crée une cour de justice. Comme
la Grande Charte anglaise de 1215, c'est un premier pas vers la monarchie parlementaire.
Le roi, contraint et forcé, signe l'ordonnance le 22 mai 1413 et coiffe aussi le capuchon des cabochiens !
Les Armagnacs de retour
Les exactions des Bourguignons et des cabochiens réveillent la
bourgeoisie modérée de Paris à s'armer et se soulever à son tour, mais
contre le parti bourguignon. L'Université elle-même se retourne et
qualifie les cabochiens de «fils de perdition».
Du 2 au 4 août 1413, les cabochiens sont exterminés et le
duc de Bourgogne doit céder la place aux Armagnacs et s'enfuir. Le comte
Bernard VII, nouveau maître de Paris, se fait nommer connétable par la
reine Isabeau de Bavière. Le 5 septembre 1413, il s'empresse d'annuler
les ordonnances cabochiennes.
Ces troubles n'ont pas échappé au nouveau roi d'Angleterre Henri V de
Lancastre qui en profite pour reprendre la guerre contre la dynastie
rivale des Valois après une interruption de plus de 35 ans. Il débarque
en Normandie avec ses troupes. Il va en résulter, à Azincourt,
l'une des défaites les plus dramatiques de la France. Elle va se solder
par l'invasion du pays, facilitée par l'alliance entre le duc de
Bourgogne et l'envahisseur anglais.
Alban Dignat http://www.herodote.net
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