[tribune libre] « L’Afrique, c’est une terre donnée par
la providence à la France. Faites-là connaître à tous les méchants
avocats qui nous marchandent 100 000F quand nous leur donnons un monde… » (Alexandre Dumas au Maréchal Bugeaud, fin 1846)
Depuis le vote de la loi du 23 février 2005 disposant que « les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer »,
de nombreuses voix –issues du corps enseignant, d’intellectuels et
d’élus de gauche- se sont élevées pour demander, avec véhémence, son
abrogation au motif que cette loi serait de nature à menacer gravement
la nécessaire neutralité de l’enseignement de l’histoire.
A pareille époque, le président algérien Bouteflika, fort de l’appui que lui assure en toutes circonstances cette même intelligentsia progressiste,
réitérait ses provocations en comparant la période française en
Algérie au nazisme et exigeait que la France demandât pardon. Et il s’est trouvé, dans notre pays, des Français pour cautionner cette « repentance »…
Ces derniers, avec l’appui de médias partageant leur idéologie, dans
un esprit de culpabilité congénitale outrancier et suivant la tendance
islamolâtre qui est la leur depuis un demi-siècle, ne cessent
depuis lors, de déverser une littérature foisonnante et pullulante,
identique à celle qui s’était déjà proposée de révéler aux Français de
la Métropole, la vie coloniale sous tous ses aspects.
C’est ainsi que l’œuvre colossale des premiers pionniers et tout ce
qui a été fait par leurs enfants, n’est qu’un tissu d’abomination et de
crimes. Elle dépeint le misérable peuple musulman comme abêti, vivant
dans le plus dur des esclavages, mais avec le soulèvement et la
valeureuse lutte du FLN pour l’indépendance de l’Algérie, c’est le
despotisme qui a été vaincu, c’est la liberté conquise, c’est la
dignité retrouvée, c’est le bien-être et le progrès intellectuel et
moral…
Ainsi décrivent-ils encore aujourd’hui l’Algérie française comme
ayant été uniquement peuplée de colons richissimes sans cœur et de
misérables petits Arabes courbant l’échine sous le joug de
l’impérialisme.
Et pourtant, comment oublier que ce sont les premiers Européens que la France a exilés en Algérie -car jugés « trop rouges »-
qui ont asséché les marais, ensemencé les maquis, transformé les
douars, les casbahs, les repaires de pirates en paisibles villages, en
cités prospères, en ports dignes de ce nom, bâti les écoles, les
universités et les hôpitaux, tracé les routes et édifié les ponts,
chassé la maladie, la famine, fait jaillir des pierres la vigne
généreuse et les orangers ?
Dans ses nombreux poèmes des Châtiments, Victor Hugo évoquera l’épuration et la destinée de ces premiers pionniers exilés par la Mère Patrie en ces termes : « martyrs, héros d’hier et forçats d’aujourd’hui, jetés par l’Empereur à l’Afrique » (Il
s’agissait de Napoléon III). Comment oublier, aussi, que c’est la
France, et elle seule, qui a fait jaillir du sable du désert un pétrole
et un gaz qui l’auraient doté de l’inestimable richesse des temps
modernes ? A cela, qu’ont opposé les tueurs du FLN soutenus par l’intelligentsia progressiste française d’hier et d’aujourd’hui ?… La révolte, le terrorisme, l’abomination.
Quand un contraste crie, il faut l’entendre, et ce serait être
apocryphe en nature humaine, en morale pure, que de nier cette
réussite. Sur ce point, quelques années après l’indépendance, Aït
Ahmed, chef historique du FLN, déclarera : « L’Algérie, au temps des Français, c’était un paradis ! »
L’idée que le colonat en Algérie n’était représenté que par des
personnes riches à millions facilement gagnés est trop bien ancrée dans
l’opinion française. Albert Camus lui-même s’était élevé contre cette
idée peu conforme à la réalité en écrivant dans l’Express : «
A lire une certaine presse, il semblerait que l’Algérie fût peuplée
d’un million de colons à cravache et à cigare montés sur Cadillac… »
Qu’il est injuste et dangereux de confondre tous les Français
d’Algérie sous les mêmes traits de quelques colons qui ont réussi à
faire leur fortune. Ceux-là ont existé, certes, mais combien
étaient-ils ? Une dizaine peut-être ! Et les autres… les humbles
fermiers, le petit peuple… les plus nombreux, tragiques et pitoyables.
Comme dans toutes les professions, il y avait « là-bas », de même que partout ailleurs, une gradation et, en milieu colon, on allait du « petit colon » qui ressemblait en tout point au modeste agriculteur de France, au « grand colon
» que l’on peut comparer au propriétaire de vignobles bordelais ou
champenois. Le fait grave, c’est que l’on a tendance –depuis un demi
siècle- à assimiler la masse des agriculteurs d’Algérie à ces derniers…
Il est toutefois un fait à souligner, volontairement occulté par les
propagandistes : la plupart de ces « grosses fortunes » étaient
étrangères au pays et n’y résidaient pas. Sous des « raisons sociales »
camouflées, les propriétaires, français ou étrangers, exploitaient
leur domaine de « l’extérieur », laissant sur place une famille de
gérants, native du pays, faussant de ce fait les jugements que l’on se
faisait en France métropolitaine. Et c’est, précisément, cette
population rurale de petits colons et de gérants de domaine qui était la
plus atteinte par les assassinats du FLN. Ces gens étaient les plus
vulnérables car isolés dans le bled. De plus ils constituaient un
obstacle certain pour le FLN, par l’étroitesse de leurs rapports avec
les fellahs de la région. Ils étaient de ce fait portés en tête de
liste des « éliminations ».
Par ailleurs, afin d’embrouiller un peu plus les esprits, on mélange savamment les termes de colonialisme et colonisation
et, aujourd’hui, ce sont, apparemment, les enfants de ceux qui
soutenaient l’action des tueurs du FLN qui crachent à leur tour sur la
mémoire de ces défricheurs.
C’est ainsi que pour les censeurs qui n’ont de cesse de dénigrer l’œuvre civilisatrice de la France, le colon a engendré le colonialisme
qui est la honteuse exploitation systématique d’un pays envahi… et se
gardent bien d’utiliser un autre mot, plus approprié à la situation : colonisation, qui, elle, est la mise en valeur d’un pays sous-développé. On a donc tendance à confondre facilement ces deux termes et les colons deviennent donc d’infâmes colonialistes…
Quand on pense à toutes ces déclarations haineuses, à ces pamphlets
journalistiques qui ont consisté à enseigner durant les années de
guerre que l’avènement du FLN marqua le soir d’un passé de ténèbres et
de tyrannie, l’aurore d’un avenir de lumière et de liberté… à faire
croire aux jeunes générations musulmanes que leurs pères furent
uniquement des esclaves misérables et affamés, soumis, sans droits ni
recours, au bon plaisir des colons… j’en frémis et j’ai honte pour
toutes ces plumes qui se disent savantes. Et si les guides de l’opinion
témoignent d’un tel snobisme et d’une telle nonchalance à l’égard de
toute vérité neuve, mais dédaigneuse du maquillage et du charlatanisme,
comment veut-on que les Français se montrent plus empressés ou plus
perspicaces ?
Quant à « laisser les historiens en débattre »…
c’est-à-dire laisser l’Histoire décider, comme le préconisent nos
gouvernants, il y a de quoi s’inquiéter. Comment ne pas frémir à l’idée
qu’un Benjamen Stora pourrait faire partie de ces « historiens » ?
Aujourd’hui, il ne s’agit même plus d’altérer et de dénigrer l’histoire
de l’Algérie française, il s’agit, ni plus ni moins de la supprimer,
de faire en sorte qu’elle n’ait jamais existé. A ce sujet, Albert Camus
avait d’ailleurs dit : « Quand le destin des hommes et des femmes
de son propre sang se trouve lié, directement ou non, à ces articles
qu’on écrit si facilement dans le confort du bureau, on a le devoir
d’hésiter et de peser le pour et le contre » et Montaigne, déjà,
ne se plaignait-il pas que l’histoire était généralement écrite par des
hommes de Cabinet qui n’avaient aucune idée ni des âmes ni des choses
dont ils parlaient ?
Depuis deux siècles, depuis la révolution, malgré des efforts
prodigieux, des guerres qui ont secoué la planète, la France n’a eu
qu’un succès durable et important, parfaitement unique : son œuvre en
Afrique du Nord. Tout le reste n’a été que glorieux échecs. Or, une
nation, comme un homme, a les yeux fixés sur ses échecs, dont
l’injustice la soulève ; elle rêve d’en rappeler. Que les Français
n’oublient jamais cela !
José CASTANO http://www.contre-info.com
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