À la fin du premier trimestre 2010, le journaliste Éric Zemmour a publié un livre au titre singulier, Mélancolie française(✍),
avec une couverture présentant le drapeau tricolore au centre duquel
figure l’aigle impérial. À peu près au même moment, l’auteur faisait
l’objet d’une cabale qui visait à le ruiner professionnellement parce
qu’il eût contesté sur les ondes la « juste pensée ». Le succès en
librairie de Mélancolie française et l’audience qu’il trouve, le matin,
sur R.T.L. forcèrent la direction du Figaro à renoncer à son licenciement.
Avant
d’analyser en détail son essai, évoquons un instant le personnage
médiatique qu’il est. N’ayant pas de télévision (je confesse volontiers
pratiquer une salutaire téléphobie), je sais – grâce aux articles
d’André Waroch – que Zemmour œuvre le samedi soir sur les plateaux
télévisés de France 2 d’où il flingue les vedettes du moment. En
revanche, j’écoute la radio et, depuis octobre 2009, par son ton
différent, on s’extrait du pesant conformisme ambiant. Certains le
considèrent comme un « bouffon » du Système, sa roue de secours et, in
fine, sa justification ultime. Pourtant, ses interventions représentent
un véritable changement par rapport aux précédents éditorialistes
matinaux de R.T.L., les Jeannine Perrimon, Pierre-Marie Christin ou
Eugène Saccomano, incroyables adeptes de la « langue de coton » et
pourvoyeurs à grands flots d’eau tiède.
Mélancolie
française n’est pas un livre d’histoire, c’est sa réflexion toute
personnelle sur l’histoire de la France. Bien écrit, cet essai est le
fruit de très nombreuses lectures puisque sont cités au fil des pages
Michèle Tribalat, Vidal de la Blache, de Gaulle, Andreï Makine, Sylvain
Gouguenheim, Jean-Christian Petitfils, Maxime Tandonnet, Régis Debray,
Emmanuel Todd, Albert Sorel, Jacques Bainville, François Crouzet, Simon
Epstein, Pierre-André Taguieff, Philippe de Saint-Robert, Georges
Bernanos, Jacques Dupâquier… On regrette presque que Zemmour ne
mentionne nulle part l’œuvre de Pierre Chaunu et, en particulier, son
étude sur la France (1).
La France, nouvelle Rome !
Outre
un éventail fort éclectique d’auteurs, le nouvel ouvrage d’Éric Zemmour
tranche par la thèse assumée dès les premières pages. Il estime que le
dessein ultime de la France est de perpétuer l’œuvre de Rome; l’État
français – royauté, République et Empire napoléonien confondus – se veut
l’incarnation de la romanité. Par conséquent, « son destin était de
rassembler l’Europe continentale (p. 11) » parce que « la France n’est
pas en Europe; elle est l’Europe. La France réunit tous les caractères
physiques, géologiques, botaniques, climatiques de l’Europe (p. 9) ». Ce
constat n’est pas nouveau ! Déjà, Jean Cau le soulignait dans Pourquoi
la France (2). Éric Zemmour insiste sur le fait que « la France serait
cette synthèse toujours au bord de la rupture, ce rassemblement toujours
défait, ce produit de la volonté politique, cette rencontre inespérée
de l’histoire et de la géographie, cette nostalgie d’empire, d’unité, et
de grandeur. Cet improbable “ agrégat de peuples désunis ” qui aurait
pu – aurait dû – rester dans les limbes de l’histoire… (pp. 12 – 13) ».
Bref, « cet ensemble français du hasard et de la nécessité était issu de
la matrice romaine et ne rêvait que d’y revenir (p. 13) ». C’est, pour
Zemmour, le code génétique de la politique française en contradiction
totale avec « l’avenir radieux qu’on lui présente [qui] est de
constituer un Texas ou une Californie des États-Unis d’Europe (p. 11) ».
L’idée romaine ou l’anti-Union européenne !
«
L’Empire, c’est la paix, estime Zemmour au sujet de la Gaule romanisée.
Près de quatre siècles sans guerre, ce territoire conquis par Jules
César ne connaîtra plus jamais une période si longue de paix (p. 14). »
Or il importe de relativiser les bienfaits de la Pax Romana : le limes
face à la Germanie était loin d’être paisible et Éric Zemmour semble
complètement ignorer l’existence des Bagaudes, ces Gaulois mi-résistants
mi-brigands qui se montrèrent récalcitrants à la romanisation. Certains
historiens des mentalités populaires jugent que les jacqueries
médiévales, les « émotions » sous l’Ancien Régime, la « Grande Peur » de
l’été 1789 et les révolutions populaires contemporaines (de la Commune
de Paris en 1871 à l’insurrection de Montbéliard en 1968) (3)
prolongeraient à travers les siècles la Bagauderie. Nonobstant ce fait
qui infirme quelque peu son propos, « la civilisation française conserva
les formes romaines pour permettre aux peuples barbares d’assimiler
l’héritage gréco-romain (p. 19) ». Pour Zemmour, « la monarchie
française est bien davantage l’héritière de l’Empire romain que des
tribus franques qui se sont partagé ses dépouilles (p. 35) ». Surgit dès
lors un problème lexical avec l’emploi de la notion toujours trop
méconnue en France d’Empire qui procède des apports successifs de
l’Antiquité, de la Germanie et du christianisme. Jusqu’à la Révolution
bourgeoise de 1789, il était courant que les rapports administratif
désignent le royaume de France sous ce terme. En effet, les légistes de
Philippe le Bel font de leur maître « empereur en son royaume »,
c’est-à-dire le dispense de toute vassalité envers le pape et/ou
l’empereur romain – germanique. Mais il ne faut pas se restreindre au
seul droit. Les Capétiens réunissent sous leur sceptre divers peuples
(Bretons et Alsaciens, Corses et Normands, Thiois et Catalans), donnant
une connotation impériale à leur royaume. Et puis, plusieurs princes des
Lys ont prétendu au Saint-Empire. En page 21, Éric Zemmour rappelle
l’échec de la candidature de François Ier en 1519. C’est pour lui une
exception. Erreur ! L’idée impériale exaltait les derniers Valois et les
premiers Bourbons comme le montre avec brio l’historien Alexandre Yali
Haran dans Le Lys et le Globe (4). Dans cet ouvrage essentiel, Yali
Haran traite des prétentions impériales de la Maison de France, de
Charles VIII à Louis XIV, qui rêvait de ceindre la Couronne impériale et
de bâtir un « Saint-Empire romain de la nation française ». Par
ailleurs, dans la lutte pluriséculaire entre la France et l’Église
(souvenons-nous que plusieurs rois dont Louis XIV furent excommuniés),
ne peut-on pas y voir une variante spécifique du gibelinisme ? Les
Capétiens seraient-ils donc des Gibelins qui auraient en partie réussi ?
Il ne fait guère de doute que, d’après Zemmour, l’attrait de l’Empire
reste considérable, car « dans la mémoire collective du continent
européen, la chute de l’Empire est sans doute plus prégnante que
l’Empire lui-même. Une inexpugnable nostalgie pour l’unité originelle
survécut à toutes les allégeances postérieures pourtant si glorieuses
(p. 15) ». « La fonction quintessencielle de la constitution de
l’Europe, avance Peter Sloterdijk, tient dans un mécanisme de transfert
de l’Empire. L’Europe se met en marche et reste en mouvement dans la
mesure où elle parvient à revendiquer l’Empire qui existait avant elle,
et à le transformer. L’Europe est ainsi un théâtre pour les
métamorphoses de l’Empire; l’idée directrice de son imagination
politique est une sorte de métempsycose de l’Empire romain à travers les
peuples européens déterminants et susceptibles de faire l’histoire. (5)
» Le philosophe allemand insiste ensuite sur le fait que « les
puissances européennes majeures ont toujours mené de nouvelles
tentatives pour reproduire un Empire qui demeurerait lié, comme un
inéluctable paradigme, à leur imagination politique. On pourrait donc
dire, littéralement, qu’est européen celui qui est impliqué dans un
transfert de l’Empire. Cela vaut particulièrement pour les Allemands,
les Autrichiens, les Espagnols, les Anglais et les Français, mais aussi,
à maints points de vue, pour les Italiens et les Russes. L’expression
translatio Imperii n’est donc pas seulement une idée fixe médiévale (6)
».
Selon Éric Zemmour, le mythe à jamais présent de l’Empire date de la fragmentation du règne carolingien au traité de Verdun en 843. C’est le début de la « question d’Occident […qui…] restera sans réponse pendant plus de mille ans. Elle causera guerre, massacres, conquêtes, désolations, génocides. Elle est l’alpha et l’oméga de notre histoire. On croit l’avoir réglée aujourd’hui (pp. 17 – 18) ». Les souverains de la Francie occidentale ne cherchent-ils pas à résoudre cette question à leur profit, de là leur ambition impériale ?
Selon Éric Zemmour, le mythe à jamais présent de l’Empire date de la fragmentation du règne carolingien au traité de Verdun en 843. C’est le début de la « question d’Occident […qui…] restera sans réponse pendant plus de mille ans. Elle causera guerre, massacres, conquêtes, désolations, génocides. Elle est l’alpha et l’oméga de notre histoire. On croit l’avoir réglée aujourd’hui (pp. 17 – 18) ». Les souverains de la Francie occidentale ne cherchent-ils pas à résoudre cette question à leur profit, de là leur ambition impériale ?
«
La monarchie française s’était rêvée en lointain descendant du roi
David (p. 24). » C’est juste mais incomplet. Dans sa Naissance de la
nation France (7), Colette Beaune souligne que les monarques français se
réclament aussi des Troyens et d’Énée (tiens ! l’ancêtre des fondateurs
de la Ville aux Sept Collines…) par Pharamond, le grand-père de Clovis.
Quant à la descendance davidique, elle a connu un net regain d’intérêt
depuis la sortie du Code De Vinci de Dan Brown et de ses spéculations
oiseuses autour d’une lignée mérovingienne d’origine christique… Le
thème messianique du Grand Monarque présente de multiples facettes.
Mélancolie française ne fait que, légèrement, effleurer le sujet. Quel
dommage (8) ! Du fait même de ses origines prestigieuses, la lignée
royale française ne peut que revendiquer la Couronne impériale.
L’État capétien ou la permanence romaine
Éric
Zemmour commet parfois quelques erreurs. Il fait par exemple de la
couleur bleue l’emblème des Capétiens (p. 20). Au Moyen Âge, la branche
dite des « Capétiens directs » (987 – 1328) sort au moment des sacres,
des croisades et des batailles leur bannière pourpre, Montjoye
Saint-Denis. Le bleu devient une couleur royale sous la branche des
Valois (1328 – 1589). Quant aux Bourbons (1589 – 1848), leur couleur
fétiche est le blanc (comme le cheval d’Henri IV !). On peut en outre
regretter que Zemmour ne se réfère guère au « Miracle capétien » (9). La
puissance des rois français provient à la fois de la transmission
héréditaire continue sur trois cents ans du pouvoir, de règnes souvent
longs pour l’époque et, surtout, de l’importance du sacre à Reims qui –
par ce huitième sacrement – en fait un prêtre de l’extérieur : « En
conséquence, le roi des Francs était roi et prêtre, rex et sacerdos,
drapé d’un prestige inégalé parmi les autres rois d’Occident, ne le
cédant que devant le pape et l’empereur. Qui donc pouvait autant
approcher les modèles de la royauté biblique sans cesse cités en exemple
par les clercs, Josias, Salomon, David ? (10) ». Déplorons que Zemmour
oublie l’action de Louis XI qui brisa l’action centrifuge des Grands
Féodaux (11). Enfin, certaines de ses interprétations paraissent bien
trop exclusives. Ainsi, « quand les héritiers rivaux privilégièrent la
religion ou l’expansion territoriale, la France choisit l’État et la
culture (p. 20) ». La prédominance de l’État et de la culture se
retrouve en Prusse, cette association dynastique du Brandebourg et des
terres baltes qui, au lendemain de la révocation de l’édit de Nantes en
1685, accueille non seulement des artisans, des ouvriers, des marchands,
des paysans huguenots, mais aussi des hommes d’administration. La
prussianité chère aux auteurs de la Révolution conservatrice allemande
(12) est d’origine française, ce qui n’est guère surprenant puisque la
France réactualise sans cesse le fait romain. Cela n’empêche pas Éric
Zemmour d’appréhender l’histoire des relations franco-allemandes sous
l’angle de la réciprocité mimétique. Son éclairage du XIXe siècle fait
l’objet de très belles pages et il n’hésite pas à citer Kiel et Tanger
de Charles Maurras et Faites au roi. Sinon faites la paix du socialiste
révolutionnaire Marcel Sembat. On a cependant l’impression qu’il
entérine une rivalité franco-allemande viscérale, mettant de côté leurs
mentalités originelles communes et la tentative de réconciliation de
1905 avec le traité germano-russe de Björköe, expressément ouvert à la
France.
Quand
Éric Zemmour souligne la volonté des Coalisés de dépecer la France
napoléonienne vaincue en 1814 – 1815, il rappelle que Wellington et
Talleyrand récusent ces intentions sans préciser qu’Alexandre Ier,
conseillé par l’ambassadeur du Piémont-Sardaigne en Russie, Joseph de
Maistre, leur apporte un appui décisif ! Quant à l’absolutisme royal,
Zemmour commet l’erreur habituel de l’assimiler à un pré-totalitarisme.
Non ! Le roi absolu de droit divin n’est pas omnipotent; il doit au
contraire composer avec l’ensemble des privilèges sociaux,
professionnels et territoriaux de son royaume (sait-il que les États du
Languedoc rechignent régulièrement à obéir à Versailles ?) (13).
L’absolutisme ne serait-il pas en fait une manière inspirée de Rome afin
d’accepter une pluralité confessionnelle apparue avec la Réforme du
XVIe siècle ? L’absolutisme naît en France à la suite des Guerres de
Religion et de l’édit de tolérance pris à Nantes en 1598. De la sorte, «
la France, d’instinct, retrouvait ses vieux réflexes romains, d’avant
le christianisme, qui acceptaient tous les dieux des peuples conquis à
condition qu’ils respectent l’autorité de Rome et de son empereur. Mais
la liberté religieuse impliquait le refus absolu des enclaves autonomes
qui voudraient imposer leur loi sur une partie du territoire (p. 25) ».
Pourquoi alors la France ne parvint-elle pas à réaliser la romanité
européenne ?
La France contre « Carthage »
D’après
Zemmour, le projet impérial-européen français est en permanence
contrarié par l’action de « Carthage », en l’occurrence l’Angleterre
hier, les États-Unis d’Amérique aujourd’hui, le monde anglo-saxon
toujours ! À la suite du prodigieux Terre et Mer de Carl Schmitt (14),
Éric Zemmour voit dans l’édit de navigation de 1651 pris par le
Lord-Protector du Commonwealth, Oliver Cromwell, les origines de la
puissance thalassocratique anglaise dans le monde. Délaissant
définitivement une ambition continentale fracassée par Jeanne d’Arc,
l’Angleterre se lance à l’assaut des mers et assume dorénavant
pleinement son insularité. L’auteur en arrive à scruter l’histoire selon
une grille d’interprétation géopolitique devenue classique, la Terre
contre la Mer, et, avec une rare aisance, il revient sur le handicap
congénital de la France qui est d’être à la fois une puissance
continentale et navale, d’où un dilemme permanent entre leurs priorités
respectives, agrémenté par d’incessants et lancinants problèmes
financiers. La géographie aurait par conséquent favorisé les malheurs de
la France, a contrario d’une « Allemagne [qui avait] seulement le
continent (p. 10) ». Mais Zemmour ne sait-il peut-être pas que le
Grand-Électeur du Brandebourg Frédéric-Guillaume (1640 – 1688),
admirateur des Provinces-Unies, fut le seul de sa lignée à manifester un
intérêt réel pour la chose maritime ? Au début du XXe siècle, son
lointain descendant, Guillaume II, s’y essaya maladroitement avec sa
Weltpolitik.
Souvent,
Zemmour se montre pessimiste. Le traité d’Utrecht de 1713 qui ponctue
ce premier conflit d’échelle planétaire qu’est la Guerre de Succession
d’Espagne (1701 – 1713) marque, selon lui, la fin du dessin romain de
Versailles. Voulu par Londres, « “ l’équilibre européen ” signifiait en
effet que la France renonçait – au nom de la paix – à son rêve
historique : remplacer l’Empire romain; et que l’Europe continentale
acceptait sa marginalisation maritime, marchande et financière de grande
ampleur édifiée par le Royaume-Uni (pp. 36 – 37) ». Il remarque même
dans le miroir de l’histoire la réflexion des contentieux actuels. Les
Anglo-Saxons (Britanniques ou Étatsuniens) font du commerce la
continuation de la guerre – et donc de la politique – par d’autres
moyens. Tant le Blocus continental de 1806 que le Marché commun des
années 1960 défient les intentions marchandes de l’« Axe infernal »
Londres – Washington pour qui « le libre-échange, c’est la guerre (p.
76) ».
Par
ailleurs, la France nourrit en son sein le vrai « parti de l’étranger », la clique anglo-saxonne qui était, aux XVIIIe et XIXe
siècles, le club anglomane et, au XXe, la « gauche américaine »
(Jean-Pierre Chevènement). On ne peut pourtant pas le suivre quand il
estime que « le vrai clivage politique qui éclaire l’histoire de la
France au XXe siècle n’est pas entre la droite et la gauche, mais entre
la guerre et la paix, entre la nation et l’empire (p. 146) ». Outre un
dualisme quelque peu simpliste, on retrouve l’imprécision lexicale du
concept d’empire. L’Empire est une conception géopolitique et
spirituelle qui envisage une forme d’organisation de la Cité confrontée à
une diversité ethnique et religieuse en tendant à concilier l’unité et
la complexité. Plutôt qu’empire, il lui aurait été plus judicieux de
parler d’esprit bourgeois ou d’hégémonie marchande avec son corollaire
typiquement puritain : l’instrumentalisation de la morale à des fins
politiciennes. Contre Napoléon Ier, « ce fut une guerre militaire,
économique, financière, commerciale, mais aussi idéologique. La première
guerre totale de l’histoire. Les services anglais expérimentèrent même,
avec Napoléon, ce que les Alliés réussiront en grand avec les Allemands
au cours des deux guerres du XXe siècle : la diabolisation morale de
l’ennemi (p. 80) ». Il y avait déjà eu des précédents. La perfide Albion
soutint la guérilla des Camisards dans les Cévennes entre 1702 et 1704
en plein conflit anglo-français. Londres attisa plus tard les feux
pré-révolutionnaires en incitant la publication d’un grand nombre de
libelles ignominieux contre la reine Marie-Antoinette et en
subventionnant les sociétés de pensée et les agissements troubles du duc
d’Orléans. Face à de telles menées subversives et pour s’opposer aux
prétentions anglo-saxonnes, que pouvait bien faire la France sinon, n’en
déplaise à Éric Zemmour qui reprend les antiennes du parti dévot de
Versailles, le renversement des alliances et l’entente avec les
Habsbourg d’Autriche ?
Ce
coup de génie géopolitique de Louis XV scandalisa les Français.
Pourtant, on le sait peu, au soir de sa vie, Louis XIV – à moitié
Habsbourg, rappelons-le ! – concevait déjà un tel retournement. Louis XV
fut bien plus retors que nous le dépeint une historiographie banale
malgré les travaux précurseurs de Pierre Gaxotte. Éric Zemmour
n’apprécie pas Louis XV. À tort ! Au-delà de l’image du monarque
priapique, il avait compris l’influence néfaste de l’Angleterre et de
son allié prussien. Sur le plan intérieur, Zemmour ignore le coup d’État
royal de Maupeou en 1771 qui écrase la résistance des parlements (à ne
pas confondre avec les États provinciaux !) et qui commence la réforme
du royaume. La France aurait peut-être évité la Révolution si le jeune
Louis XVI n’avait pas renvoyé Maupeou en 1774 et rétabli naïvement la
vénalité des charges des parlements.
Du
fait même de la double vocation océanique et continentale de la France,
son alliance avec l’Autriche lui permet de développer une marine de
guerre victorieuse pendant la Guerre d’Indépendance américaine bien que
Louis XVI commet une erreur fatale en soutenant les Insurgeants. Outre
le précédent fâcheux d’appuyer la rébellion de sujets envers leur
souverain, cette guerre d’outre-mer augmente la dette de l’État royal,
grève le budget et affaiblit l’autorité royale. Enfin, l’aide française
aux jeunes États-Unis d’Amérique ne modifie pas l’hégémonie
anglo-saxonne. Bien au contraire ! Le général Washington, un francophobe
notoire qui avait combattu les Français d’Amérique de 1754 à 1759,
sabote la tentative de reprise du Québec et de l’Acadie (15). Cette
francophobie vivace, bien éloignée de l’image idyllique d’une
hypothétique amitié entre les U.S.A. et la France, se cultive fort bien à
la Maison Blanche : Ulysse Grant adresse ses chaleureuses félicitations
à Bismarck en 1871; Woodrow Wilson entrave Clemenceau à la Conférence
de Versailles de 1919; Franklin Delano Roosevelt rêve de créer aux
dépens de la France un État regroupant la Belgique, le Luxembourg, la
Lorraine et l’Alsace; Lyndon Johnson s’oppose à la politique du général
de Gaulle, etc. Éric Zemmour aurait pu relever la Quasi-Guerre qui
marque l’affrontement naval et commercial entre la France et la jeune
république américaine entre 1798 et 1807 (16). L’arrêt des échanges
oblige le gouvernement américain à fermer ses ports, ce qui amène le
pays à s’industrialiser…
Éric
Zemmour nous offre dans l’ensemble une vision non-conformiste de
l’histoire. Ce grand admirateur de Napoléon Bonaparte le trouve quand
même trop timoré dans sa politique européenne puisque l’« Ogre corse »
n’évince pas les vieilles dynasties et s’acoquine avec les Habsbourg en
épousant l’une des leurs (encore le tropisme autrichien, se lamente-t-il
!). Il lui reconnaît toutefois la création d’une France aux cent trente
départements, dotée de limites naturelles (Pyrénées, Belgique, rive
gauche du Rhin, Italie du Nord) qui correspondent à « la Gaule romaine
enfin reconstituée (p. 59) ». Ne serait-ce pas là le noyau véritable,
fondateur, de toute construction authentiquement européenne ? La
construction européenne ne parasiterait-elle pas le rêve romain de la
France ?
L’Union européenne, un projet romain ou non ?
De
nombreux européistes conçoivent l’idée européenne comme une réponse à
l’endormissement historique de notre continent. « Une angoisse
métaphysique s’ajoute peu à peu aux vieux enjeux : l’Europe continentale
n’est plus désormais le centre du monde. Le Pacifique; l’Asie sont en
train de la remplacer comme centre de “ l’économie-monde ”. Elle vit ce
déclin irrémédiable comme la fin d’un monde qui débuta à la Renaissance
(p. 185). » Le projet européen aurait pu reprendre, porter et sublimer
l’héritage romain de la France. Or l’actuel processus européen adopte
plutôt le libre-échangisme global, le libéralisme, l’atlantisme, le
multiculturalisme et le mondialisme. « L’Europe n’est alors plus un but
en soi, mais une première étape sur le chemin grandiose de l’unité
mondiale (p. 168). » Même si Zemmour se trompe en écrivant A.L.E.N.A.
(Accord de libre-échange nord-américain) pour parler de la riposte
britannique des années 1960 à la C.E.E. : l’A.E.L.E. (Association
européenne de libre-échange) (p. 170), il a raison de montrer que l’«
Europe » se révèle, dès son origine, bancale et soumise aux rejetons de
Jean Monnet, les technocrates libéraux mondialistes, alors que «
l’Europe des Six correspond exactement à la France rêvée par mille ans
de rois et d’empereurs : c’est l’Hexagone, la Belgique, le Luxembourg
(réclamé encore par Napoléon III), l’Allemagne rhénane (et non
prussienne), et l’Italie du Nord. La France de Tilsit, avant les folies
espagnoles et russes. C’est l’Europe riche. La grande nation. La France
idéale (p. 173) ». Avec l’entrée de la Grande-Bretagne en 1973 suivie
des élargissements successifs, « le “ Blocus continental ” était ruiné
sous les coups de boutoir du libre-échange généralisé de la “
mondialisation ”; les politiques reculaient devant la montée en
puissance des technocrates (Commission et B.C.E., qui imposaient les
normes économiques, et géraient la monnaie) et des juristes (Cour
européenne de justice) (p. 179) ». L’Union européenne s’étiole,
s’atrophie tout en s’étendant géographiquement. Le phénomène se
répercute sur les États-nations. Des souverainistes se réjouissent de la
crise actuelle de l’euro et parient sur sa disparition éventuelle ainsi
que sur un éclatement de l’Eurolande, voire de l’U.E. Si, suivant la
loi des rendements décroissants, s’achèvent les grands ensembles
continentaux, d’autres ensembles, plus restreints que les grands espaces
mais plus vastes que les communautés vernaculaires, pourraient eux
aussi imploser. L’échec de l’Union européenne n’impliquerait pas le
retour automatique du franc et de la souveraineté française, mais plus
sûrement l’effondrement des cadres étatiques et la généralisation du
chaos… « L’idée nationale continue à faire tourner la roue de
l’histoire, prophétise Éric Zemmour, mais elle descend désormais au
niveau de l’ethnie, et risque de détruire les États-nations édifiés au
fil des siècles (p. 188). » L’ethnie doit maintenant être comprise comme
une autre variation de l’identité nationale parce que « nous vivons […]
encore le cycle ouvert en 1789 : de la Chine à Israël, des États-Unis à
la Russie, le fait national s’impose partout (p. 138) ».
Éric
Zemmour semble se navrer de cette évolution, lui qui constate que « les
puissances à l’échelle mondiale (États-Unis, Chine, Russie, Inde) sont
toutes d’anciens empires multinationaux transformés en nations
pachydermiques par un État niveleur (même aux États-Unis, depuis le New
Deal) et une propagande patriotique intensive : le modèle que la France a
inventé, et n’a pu mener à son terme (p. 138) ». Cette affirmation
mérite deux observations. Primo, n’y a-t-il pas une parodie d’empire
pour le cas étatsunien et des simulacres pour les autres si l’on reste
fidèle à la conception traditionnelle d’Empire ? Secundo, la France qui
serait implicitement un empire, aurait-elle donc été avortée ? La crise
que traverse l’identité française ne provient-elle pas, finalement, de
cet inachèvement et d’un dévoiement stato-national, d’où un « Hexagone
républicain » amoindri et pris en tenaille entre un Islam grandissant et
un Mac World aliénant (« Élites mondialisées parlant, pensant en
anglais, et Lumpenprolétariat islamisé forgeant un créole banlieusard :
une double récession linguistique mine silencieusement notre pays qui
avait pris l’habitude séculaire d’associer unité politique et
linguistique, et qui fit même pendant longtemps rimer le progrès de la
francisation avec ceux des Lumières (p. 246) ») ?
Pour
Zemmour, « le retour d’un islam identitaire dans les jeunes générations
est le signe tangible de l’affrontement entre deux universalismes
égalitaires, le français et l’islamique. […] La promesse égalitaire
française, minée dans la mondialisation par les injonctions
inégalitaires venues des pays anglo-saxons, résiste moins bien à
l’assaut de son rival islamique (p. 244) ». Concernant le réveil de la
foi mahométane, il remarque qu’« un moment – entre 1800 et 1960 –
ébranlé par la modernité occidentale conquérante, l’islam a recouvré son
dynamisme identitaire, après avoir replongé dans sa source originelle
depuis la révolution iranienne; il a modernisé son message en le
déterritorialisant – une “ contre-mondialisation ” -, renouant ainsi
avec ses origines universalistes et conquérantes (p. 242) ». L’assertion
n’est pas correcte. Il attribue à la révolution iranienne de Khomeyni
en 1979 le rôle de détonateur du regain musulman alors que cette
renaissance remonte à la fin du XIXe siècle, voire plus tôt avec
l’expédition de Bonaparte en Égypte, et se cristallise après la Guerre
des Six Jours de 1967 qui entérine l’échec du panarabisme.
Les ravages de l’histoire détournée
La
France, Rome inabouti, fait-elle naufrage, coulée à la fois par le
mondialisme, l’islamisme et l’entente anglo-saxonne ? Mélancolie
française prononce-t-elle par anticipation l’éloge funèbre du « cher et
vieux pays » ? Peut-être… Zemmour regrette que « la mémoire, dégradé
intimiste de l’histoire elle-même dissoute en une variété de mémoires,
des mémoires dans la mémoire, comme on dit “ un État dans l’État ”, qui
rivalisent, s’affrontent et, vindicatives, demandent des comptes à
l’histoire de France déboulonnée (p. 130) ». Il s’irrite que le
politiquement correct pervertisse l’histoire et empêche les Français de
réagir contre l’« immigration de peuplement (p. 230) », l’idéologie
multiculturaliste et l’exaltation des différences de circonstance.
L’assimilation est en panne et la natalité déficiente, malgré la
désinformation volontaire des médias qui proclament le contraire. « La
France, assène-t-il, est un borgne démographique au pays des aveugles
européens (p. 214). »
Éric
Zemmour s’exaspère aussi qu’on tronque l’histoire et ne craint pas de
s’aventurer sur des terrains minés. Après le défunt Jean-Claude Valla,
il écrit que l’« extrême droite » était bien plus présente à Londres
qu’à Paris ou à Vichy. Il affirme que « la droite mourut d’un crime
majoritairement commis par la gauche (hormis les communistes, bien sûr,
mais à partir de juin 1941) (p. 153) ». Il aurait pu préciser que la
direction clandestine du P.C.F. tenta au nom de la collaboration
germano-soviétique de se rapprocher de l’occupant hitlérien et de
refaire paraître L’Humanité à l’été 1940 (17) ! Cet oubli lui est
pardonné parce qu’il examine ensuite le rôle historique de Philippe
Pétain en prenant le lecteur à contre-pied : Zemmour soutient le
Maréchal de 1940 et condamne le Général de 1917 ! Oui, le vieux Maréchal
a fait le bon choix en juin 1940 en demandant l’armistice qui fixa les
troupes allemandes, permit à l’État français de conserver son empire
colonial et sa flotte (détruite peu après à Mers el-Kébir par des
Britanniques perfides) et prépara la reprise des hostilités grâce à
l’armée d’Afrique montée par les généraux bien oubliés aujourd’hui
Weygand et Giraud. Il est en revanche fort critique pour le général
Pétain, commandant en chef de l’armée française en 1917. Partisan de
l’attente défensive et de l’arrivée massive des troupes étatsuniennes,
Pétain s’oppose à Mangin et interdit la poursuite des grandes offensives
qui auraient pu briser l’effort de guerre allemand et permettre l’arrêt
de la guerre un an plus tôt… Zemmour explique que le général Pétain,
fort de sa réputation d’officier républicain, bénéficiait du soutien de
la gauche qui ne tenait pas à favoriser le succès électoral de la «
Réaction » par une victoire militaire éclatante qui aurait en outre
indisposé nos « alliés » anglo-saxons (cf. p. 145). Dans le même temps,
toujours « austrophobe », l’auteur se félicite de l’échec des
pourparlers de paix en 1916 – 1917 entre le nouvel empereur
austro-hongrois Charles Ier et ses beaux-frères, officiers belges, les
princes Sixte et Xavier de Bourbon-Parme, dont la réussite aurait sans
doute assuré le maintien de ce pôle de stabilité mitteleuropen qu’était
l’ensemble habsbourgeois.
Les
XIXe et XXe siècles marquent l’évincement progressif de la France du
premier plan de l’histoire en dépit des rémissions de la colonisation et
de l’épisode gaullien. Le XXIe verra-t-il son retour fracassant ? Éric
Zemmour l’imagine. Outre une natalité moins mauvaise que ses voisins en
raison de la forte fécondité des allogènes extra-européennes (ce qui est
un problème en soi pour tout identitaire soucieux du devenir de son
peuple), la « Chine de l’Europe » qu’elle fut jadis pourrait se
satisfaire de la crise belge. L’avant-dernier chapitre, « Le Belge »,
est le plus… inattendu. Zemmour juge la Belgique artificielle. Elle fut
inventée en 1830 par Londres qui ne tenait pas qu’Anvers ne redevienne
française. « La Belgique est la R.D.A. de la France. La plaie jamais
cicatrisée de Waterloo comme le mur de Berlin fut celle de l’Allemagne
vaincue (p. 192). » Certes, son analyse historique du mouvement national
flamand pèche par son conformisme; il aurait dû s’enquérir de La
création des identités nationales d’Anne-Marie Thiesse (18) : la nation,
idée moderne par excellence, part toujours du substrat paysan et
certains dialectes à qui érudits et linguistes donnent des normes
grammaticales deviennent après des langues nationales (le basque, le
slovaque, le flamand). La fragilité de la Belgique s’accentue avec la
construction européenne. « Bruxelles est un laboratoire. D’une Europe
dont la capitale est celle d’un empire sans État. Un rêve, un phantasme,
un aveu. Un laboratoire de la mondialisation aussi (p. 208). » L’«
évaporation » de la Belgique laisserait-elle à Paris la liberté de
s’adjoindre au moins la Wallonie et Bruxelles ? Pas si sûr, car les
Belges francophones ont des habitudes politiques et un état d’esprit
très différents des mœurs hexagonales : les rapports sociaux entre les
syndicats et le patronat reposent sur la négociation et le compromis et
non sur l’épreuve de force. Et puis, Berlin, Londres, La Haye verraient
d’un mauvais œil qu’« avec Bruxelles et Strasbourg, deux capitales
européennes sur trois seraient françaises. Et le Luxembourg fut encore
revendiquée par la France jusqu’à Napoléon III ! (p. 207) » Enfin,
Anglo-Saxons et Allemands accepteraient-ils une extension géographique
et humaine de la Grande Nation ? En effet, « avec 68 millions
d’habitants, la France grignoterait encore son retard sur l’Allemagne et
ses 80 millions. Les aiguilles de l’histoire poursuivent implacablement
leur marche en arrière (p. 211) ». Et, contre la bien-pensance, Zemmour
conclut que « notre erreur fut sans doute de croire que la paix depuis
quarante ans était l’état normal alors qu’elle était une acception (p.
251) ». Que l’ombre romaine de la France vienne hanter les chancelleries
de la Vieille Europe et qu’elle perturbe au plus tôt le doux commerce
des Anglo-Saxons ! Les orages d’acier s’accumulent à l’horizon de
l’histoire jamais achevée.
Georges Feltin-Tracol 24 septembre 2010 http://www.europemaxima.com/
Notes :
1
: Pierre Chaunu, La France. Histoire de la sensibilité des Français à
la France, Paris, Robert-Laffont – Hachette, coll. « Pluriel », 1982.
2 : Jean Cau, Pourquoi la France, Paris, La Table Ronde, 1975. Signalons aussi un ouvrage plus qu’étrange (et très rare chez les bouquinistes) qui traite de sujets semblables : R.P. Martin, Le livre des compagnons secrets, Monaco, A.C.L. (Agence de création littéraire) – Le Rocher, 1982. Intégré dans la couverture, le bandeau annonce « L’enseignement secret du général de Gaulle »…
3 : Sur cette dernière insurrection ouvrière franc-comtoise, voir Gustave Lefrançais, « Mémoire du prolétariat européen combattant… », mis en ligne sur Europe Maxima le 6 février 2010.
4 : Alexandre Yali Haran, Le Lys et le Globe. Messianisme dynastique et rêve impérial en France à l’aube des Temps modernes, Seyssel, Champs Vallon, 2000.
5 : Peter Sloterdijk, Si l’Europe s’éveille. Réflexions sur le programme d’une puissance mondiale à la fin de l’ère de son absence politique, Paris, Mille et une nuits, 2003, p. 52.
6 : Idem, pp. 52 – 53.
7 : Colette Beaune, Naissance de la nation France, Paris, N.R.F. – Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires », 1985.
8 : Lire aussi sur ce sujet, Rodolphe Badinand, « Le retour du Roi. Essai sur un mythe européen », pp. 141 – 152, in Requiem pour la Contre-Révolution. Et autres essais impérieux, Billère, Alexipharmaque, coll. « Les Réflexives », 2008.
9 : Sous la direction de Stéphane Rials, Le miracle capétien, Paris, Perrin, coll. « Passé simple », 1987.
10 : Amaury Chauou, Le roi Arthur, Paris, Le Seuil, 2009, p. 173.
11 : Pour un aperçu historique original (et non-conformiste) de la fin de la féodalité française, on se reportera volontiers à Henry Montaigu, La fin des féodaux, Paris, Olivier Orban, tome 1, Le pré carré du roi Louis, 1980, et, tome 2, La Guerre des dames, 1981.
12 : On fait ici allusion en particulier à Oswald Spengler, Prussianité et socialisme, préface de Gilbert Merlio, Arles, Actes Sud, 1986.
13 : Sur les institutions trop méconnues de l’Ancien Régime, voir l’œuvre de François Olivier-Martin publiée par les Éditions Loysel en 1988, en particulier Les lois du Roi, L’absolutisme français, L’administration provinciale à la fin de l’Ancien Régime, Les Parlements contre l’absolutisme traditionnel au XVIIIe siècle et Les ordres, les pays, les villes et communautés d’habitants.
14 : Carl Schmitt, Terre et Mer, introduction et postface de Julien Freund, Paris, Le Labyrinthe, 1985.
15 : Par deux fois, il aurait été possible de reprendre les « quelques arpents de neige » décriés par Voltaire. Le 22 janvier 1778, le Congrès continental décide de la conquête du Canada avec l’intention d’en faire le quatorzième État de l’Union et nomme La Fayette général en chef de l’armée d’invasion. Faute de troupes suffisantes, il renonce car Washington entrave en coulisse ses efforts. Une fois la France officiellement en guerre contre l’Angleterre, l’amiral d’Estaing laisse à deux reprises s’échapper l’escadre anglaise pendant qu’à Versailles, les « pré-révolutionnaires » (les coteries anglomane et/ou du duc d’Orléans) font pression sur Louis XVI et ses ministres afin qu’ils limitent les hostilités aux espaces océaniques et au sol américain.
16 : Sur la Quasi-Guerre, un sujet rarement abordé par l’Université française, voir Ulane Bonnel, La France, les États-Unis et la guerre de course (1797 – 1815), Paris, Nouvelles Éditions latines, 1961. Ulane Bonnel date le conflit entre 1797 et 1799. Les historiens anglo-saxons de cette presque guerre divergent sur les dates.
17 : Éric Zemmour se trompe par ailleurs sur le titre des deux excellents ouvrages de Patrick Buisson qu’il intitule L’érotisme sous Vichy et qui se nomment en réalité 1940 – 1945, années érotiques, Paris, Albin-Michel, tome 1, Vichy ou les infortunes de la vertu, 2008, et, tome 2, De la grande prostituée à la revanche des mâles, 2009.
18 : Anne-Marie Thiesse, La création des identités nationales. Europe XVIIIe – XXe siècles, Paris, Le Seuil, coll. « L’Univers historique », 1999.
✍ Éric Zemmour, Mélancolie française, Paris, Fayard – Denoël, 2010, 253 p., 17 €.
2 : Jean Cau, Pourquoi la France, Paris, La Table Ronde, 1975. Signalons aussi un ouvrage plus qu’étrange (et très rare chez les bouquinistes) qui traite de sujets semblables : R.P. Martin, Le livre des compagnons secrets, Monaco, A.C.L. (Agence de création littéraire) – Le Rocher, 1982. Intégré dans la couverture, le bandeau annonce « L’enseignement secret du général de Gaulle »…
3 : Sur cette dernière insurrection ouvrière franc-comtoise, voir Gustave Lefrançais, « Mémoire du prolétariat européen combattant… », mis en ligne sur Europe Maxima le 6 février 2010.
4 : Alexandre Yali Haran, Le Lys et le Globe. Messianisme dynastique et rêve impérial en France à l’aube des Temps modernes, Seyssel, Champs Vallon, 2000.
5 : Peter Sloterdijk, Si l’Europe s’éveille. Réflexions sur le programme d’une puissance mondiale à la fin de l’ère de son absence politique, Paris, Mille et une nuits, 2003, p. 52.
6 : Idem, pp. 52 – 53.
7 : Colette Beaune, Naissance de la nation France, Paris, N.R.F. – Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires », 1985.
8 : Lire aussi sur ce sujet, Rodolphe Badinand, « Le retour du Roi. Essai sur un mythe européen », pp. 141 – 152, in Requiem pour la Contre-Révolution. Et autres essais impérieux, Billère, Alexipharmaque, coll. « Les Réflexives », 2008.
9 : Sous la direction de Stéphane Rials, Le miracle capétien, Paris, Perrin, coll. « Passé simple », 1987.
10 : Amaury Chauou, Le roi Arthur, Paris, Le Seuil, 2009, p. 173.
11 : Pour un aperçu historique original (et non-conformiste) de la fin de la féodalité française, on se reportera volontiers à Henry Montaigu, La fin des féodaux, Paris, Olivier Orban, tome 1, Le pré carré du roi Louis, 1980, et, tome 2, La Guerre des dames, 1981.
12 : On fait ici allusion en particulier à Oswald Spengler, Prussianité et socialisme, préface de Gilbert Merlio, Arles, Actes Sud, 1986.
13 : Sur les institutions trop méconnues de l’Ancien Régime, voir l’œuvre de François Olivier-Martin publiée par les Éditions Loysel en 1988, en particulier Les lois du Roi, L’absolutisme français, L’administration provinciale à la fin de l’Ancien Régime, Les Parlements contre l’absolutisme traditionnel au XVIIIe siècle et Les ordres, les pays, les villes et communautés d’habitants.
14 : Carl Schmitt, Terre et Mer, introduction et postface de Julien Freund, Paris, Le Labyrinthe, 1985.
15 : Par deux fois, il aurait été possible de reprendre les « quelques arpents de neige » décriés par Voltaire. Le 22 janvier 1778, le Congrès continental décide de la conquête du Canada avec l’intention d’en faire le quatorzième État de l’Union et nomme La Fayette général en chef de l’armée d’invasion. Faute de troupes suffisantes, il renonce car Washington entrave en coulisse ses efforts. Une fois la France officiellement en guerre contre l’Angleterre, l’amiral d’Estaing laisse à deux reprises s’échapper l’escadre anglaise pendant qu’à Versailles, les « pré-révolutionnaires » (les coteries anglomane et/ou du duc d’Orléans) font pression sur Louis XVI et ses ministres afin qu’ils limitent les hostilités aux espaces océaniques et au sol américain.
16 : Sur la Quasi-Guerre, un sujet rarement abordé par l’Université française, voir Ulane Bonnel, La France, les États-Unis et la guerre de course (1797 – 1815), Paris, Nouvelles Éditions latines, 1961. Ulane Bonnel date le conflit entre 1797 et 1799. Les historiens anglo-saxons de cette presque guerre divergent sur les dates.
17 : Éric Zemmour se trompe par ailleurs sur le titre des deux excellents ouvrages de Patrick Buisson qu’il intitule L’érotisme sous Vichy et qui se nomment en réalité 1940 – 1945, années érotiques, Paris, Albin-Michel, tome 1, Vichy ou les infortunes de la vertu, 2008, et, tome 2, De la grande prostituée à la revanche des mâles, 2009.
18 : Anne-Marie Thiesse, La création des identités nationales. Europe XVIIIe – XXe siècles, Paris, Le Seuil, coll. « L’Univers historique », 1999.
✍ Éric Zemmour, Mélancolie française, Paris, Fayard – Denoël, 2010, 253 p., 17 €.
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