L'année marque l'apothéose du règne de Louis VI le Gros. Le 25 juillet, quelques jours avant sa mort, son fils Louis épouse Aliénor d'Aquitaine. Une chance fabuleuse pour le royaume en train de se former.
Cette année-là, la vingt-neuvième de son règne, Louis VI le Gros, cinquante-six ans, n'avait point cessé d'exercer une activité surhumaine en nettoyant vigoureusement le pays de quelques grands seigneurs qui n'étaient que de grands brigands, de même qu'en aidant puissamment à la naissance des communes de France qui reçurent leurs premières chartes - véritables viviers de libertés florissantes. Nous l'avons déjà vu à l'oeuvre dans L'AF 2000 du 5 mars 2008. Nous l'avons également suivi en 1124 dans son combat victorieux, grâce à la mobilisation des chevaliers et des bourgeois, contre l'empereur germanique Henri V, époux de Mathilde, la petite- fille de Guillaume le Conquérant, et nous avons montré alors dans L'AF 2000 du 19 juin 2008 le sentiment national en train de naître. En outre, à la suite de son père Philippe 1er, Louis VI avait mis fin aux pratiques simoniaques en matière de charges ecclésiastiques et réglé pour le mieux la question de son droit de regard dans la nomination des évêques.
L'abbé Suger,ami du roi
Avec tout cela la dynastie s'était considérablement affermie, la paix et la sécurité régnaient dans le royaume, et le fidèle abbé Suger pouvait écrire : « Le prince Louis ayant dans sa jeunesse mérité l'amitié de l'Église en la défendant généreusement, soutenu la cause des pauvres et des orphelins, dompté les tyrans par sa puissante vaillance, s'est trouvé ainsi, avec le consentement de Dieu, amené au faîte du royaume suivant le voeu des prud'hommes et pour le plus grand malheur des méchants dont les machinations l'en auraient exclu si la chose avait été possible. » On ne saurait trop insister sur le rôle extraordinaire de cet abbé Suger, enfant de pauvre devenu dès les bancs de la petite école de Saint-Denis l'ami du futur roi. Orateur, théologien, dialecticien, poète, le jeune clerc avait vite acquis une expérience affinée des affaires tant religieuses que séculières et administratives. Il resta toujours auprès du Gros un collaborateur indispensable, jamais servile, jamais courtisan, pour qui la politique était essentiellement une affaire de mesure et d'arbitrage.
1137 allait marquer l'apothéose du règne. Le fils aîné de Louis VI, Philippe, associé au trône dès sa jeunesse, étant mort à quinze ans en 1131, le roi avait aussitôt fait sacrer (la préoccupation restait nécessaire...) son deuxième fils Louis, né en 1120, lequel, ce 25 juillet 1137, à dix-sept ans, contractait en la cathédrale de Bordeaux le plus brillant mariage dont il pouvait rêver.
La belle Aliénor
Guillaume X, duc d'Aquitaine, était mort quelques mois plus tôt en confiant au roi son unique héritière, la superbe Aliénor, âgée de quinze ans. En grand politique, Louis VI s'était empressé de conclure... le mariage de la jeune duchesse avec le jeune roi. Et quelle chance fabuleuse pour le royaume en train de se former ! Elle apportait en dot l'Aquitaine, c'est-à-dire le Poitou, le Limousin, une grande partie de l'Auvergne, le Périgord, le Bordelais et la Gascogne (dix-neuf de nos actuels départements !).
Cette héritière de la plus opulente maison ducale était la deuxième à épouser un Capétien. Souvenons-nous du mariage d'Hugues Capet avec Adélaïde. Les ducs d'Aquitaine, tous lettrés et amis des arts, épataient depuis longtemps l'Europe entière. Les empereurs les traitaient comme des égaux. Guillaume IX, le grand-père d'Aliénor, le premier troubadour, avait été un personnage romanesque qui n'avait consenti qu'une apparition furtive à la Croisade avant de découvrir l'amour courtois et de le chanter. En somme Aliénor héritait d'une lignée d'hommes et de femmes pieux et généreux mais aussi de gaillards enivrés de culture et de plaisir, peu enclins à supporter trop de contraintes...
Peur de rien
Les jeunes époux étaient aux anges. Dès leur première rencontre, le très aimable Louis, bien fait de sa personne, tomba irrésistiblement amoureux de cette fille du soleil fine et raffinée. Quant à elle, elle vit en lui l'image d'un prince des contes et légendes chevaleresques à la mode.
Hélas le deuil vint les frapper sur le chemin du retour, quand, alors qu'ils séjournaient à Poitiers, la nouvelle leur parvint de la mort du roi Louis VI le 8 août à Paris. Il laissait à son fils ce conseil : « Souvenez-vous, mon fils et ayez toujours devant les yeux que l'autorité royale n'est qu'une charge publique, dont vous rendrez un compte très exact après votre mort. »
Voici donc Louis et Aliénor, alors qu'ils viennent juste de faire connaissance, roi et reine de France ! Lourde responsabilité sur des épaules bien jeunes ! Si follement épris l'un de l'autre, ils n'avaient peur de rien... Mais la mariée n'était-elle pas trop belle ? Réponse dans notre prochain numéro...
MICHEL FROMENTOUX L’ACTION FRANÇAISE 2000 du 2 au 15 juillet 2009
Cette année-là, la vingt-neuvième de son règne, Louis VI le Gros, cinquante-six ans, n'avait point cessé d'exercer une activité surhumaine en nettoyant vigoureusement le pays de quelques grands seigneurs qui n'étaient que de grands brigands, de même qu'en aidant puissamment à la naissance des communes de France qui reçurent leurs premières chartes - véritables viviers de libertés florissantes. Nous l'avons déjà vu à l'oeuvre dans L'AF 2000 du 5 mars 2008. Nous l'avons également suivi en 1124 dans son combat victorieux, grâce à la mobilisation des chevaliers et des bourgeois, contre l'empereur germanique Henri V, époux de Mathilde, la petite- fille de Guillaume le Conquérant, et nous avons montré alors dans L'AF 2000 du 19 juin 2008 le sentiment national en train de naître. En outre, à la suite de son père Philippe 1er, Louis VI avait mis fin aux pratiques simoniaques en matière de charges ecclésiastiques et réglé pour le mieux la question de son droit de regard dans la nomination des évêques.
L'abbé Suger,ami du roi
Avec tout cela la dynastie s'était considérablement affermie, la paix et la sécurité régnaient dans le royaume, et le fidèle abbé Suger pouvait écrire : « Le prince Louis ayant dans sa jeunesse mérité l'amitié de l'Église en la défendant généreusement, soutenu la cause des pauvres et des orphelins, dompté les tyrans par sa puissante vaillance, s'est trouvé ainsi, avec le consentement de Dieu, amené au faîte du royaume suivant le voeu des prud'hommes et pour le plus grand malheur des méchants dont les machinations l'en auraient exclu si la chose avait été possible. » On ne saurait trop insister sur le rôle extraordinaire de cet abbé Suger, enfant de pauvre devenu dès les bancs de la petite école de Saint-Denis l'ami du futur roi. Orateur, théologien, dialecticien, poète, le jeune clerc avait vite acquis une expérience affinée des affaires tant religieuses que séculières et administratives. Il resta toujours auprès du Gros un collaborateur indispensable, jamais servile, jamais courtisan, pour qui la politique était essentiellement une affaire de mesure et d'arbitrage.
1137 allait marquer l'apothéose du règne. Le fils aîné de Louis VI, Philippe, associé au trône dès sa jeunesse, étant mort à quinze ans en 1131, le roi avait aussitôt fait sacrer (la préoccupation restait nécessaire...) son deuxième fils Louis, né en 1120, lequel, ce 25 juillet 1137, à dix-sept ans, contractait en la cathédrale de Bordeaux le plus brillant mariage dont il pouvait rêver.
La belle Aliénor
Guillaume X, duc d'Aquitaine, était mort quelques mois plus tôt en confiant au roi son unique héritière, la superbe Aliénor, âgée de quinze ans. En grand politique, Louis VI s'était empressé de conclure... le mariage de la jeune duchesse avec le jeune roi. Et quelle chance fabuleuse pour le royaume en train de se former ! Elle apportait en dot l'Aquitaine, c'est-à-dire le Poitou, le Limousin, une grande partie de l'Auvergne, le Périgord, le Bordelais et la Gascogne (dix-neuf de nos actuels départements !).
Cette héritière de la plus opulente maison ducale était la deuxième à épouser un Capétien. Souvenons-nous du mariage d'Hugues Capet avec Adélaïde. Les ducs d'Aquitaine, tous lettrés et amis des arts, épataient depuis longtemps l'Europe entière. Les empereurs les traitaient comme des égaux. Guillaume IX, le grand-père d'Aliénor, le premier troubadour, avait été un personnage romanesque qui n'avait consenti qu'une apparition furtive à la Croisade avant de découvrir l'amour courtois et de le chanter. En somme Aliénor héritait d'une lignée d'hommes et de femmes pieux et généreux mais aussi de gaillards enivrés de culture et de plaisir, peu enclins à supporter trop de contraintes...
Peur de rien
Les jeunes époux étaient aux anges. Dès leur première rencontre, le très aimable Louis, bien fait de sa personne, tomba irrésistiblement amoureux de cette fille du soleil fine et raffinée. Quant à elle, elle vit en lui l'image d'un prince des contes et légendes chevaleresques à la mode.
Hélas le deuil vint les frapper sur le chemin du retour, quand, alors qu'ils séjournaient à Poitiers, la nouvelle leur parvint de la mort du roi Louis VI le 8 août à Paris. Il laissait à son fils ce conseil : « Souvenez-vous, mon fils et ayez toujours devant les yeux que l'autorité royale n'est qu'une charge publique, dont vous rendrez un compte très exact après votre mort. »
Voici donc Louis et Aliénor, alors qu'ils viennent juste de faire connaissance, roi et reine de France ! Lourde responsabilité sur des épaules bien jeunes ! Si follement épris l'un de l'autre, ils n'avaient peur de rien... Mais la mariée n'était-elle pas trop belle ? Réponse dans notre prochain numéro...
MICHEL FROMENTOUX L’ACTION FRANÇAISE 2000 du 2 au 15 juillet 2009
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