Dès le début du XIIIè siècle, le pape Innocent III a affirmé la nécessité de procéder à une enquête, du latin "inquisitio", pour éviter les débordements de la rumeur et des préjugés en matière d'hérésie. En 1231, Grégoire IX publie la constitution Excommunicamus, acte fondateur de l'Inquisition qui repose sur un principe clair : nul ne doit être condamné pour hérésie par la justice civile sans un jugement ecclesiastique antérieur. Le but de l'Eglise reste la conversion des égarés.
Dans la pratique l'Inquisition s'est montrée bien moins sanglante que la légende laïque ne ne laisse entendre. Là où l'hérésie déclenchait des réactions incontrôlées, la procédure engagée par l'Inquisition s'appuyait sur un contrôle de la véracité des faits, sur la recherche de preuves et d'aveux et sur des juges qui résistaient aux passions de l'opinion. Aussi étrange que cela puisse paraître à un esprit moderne, cette horreur de l'hérésie était un sentiment populaire soucieux de préserver la foi, pilier fondamental de la société que l'on pourrait remplacer aujourd'hui par le bien-être, la liberté d'expression ou les droits de l'homme pour faire appel à des idoles contemporaines. Au point de vue de la méthode judiciaire, l'Inquisition a représenté un progrès historique dans la mesure où elle avait pour rôle d'empêcher les formes populaires de justice expéditive. La persécution des hérétiques n'a jamais été le fait de l'Eglise, certes elle combattait et engageait la polémique mais elle ne persécutait pas.
En vertu du principe Ecclesia abhorret sanguinem, aucune condamnation à mort ne pouvait être prononcée par les tribunaux de l'Eglise qui décidaient la relaxe des cas les plus désespérés au " bras séculier ", c'est-à-dire à l'autorité civile. L'Eglise abhorre le sang et ne le verse pas. Grâce aux travaux des médiévistes, on sait maintenant qu'en moyenne, moins de deux pour cent des procédures menées devant les tribunaux d'Inquisition ont été abandonnées au bras séculier. " La différence entre la main royale et la main ecclesiale est énorme, l'Eglise a toujours tendance à pardonner au moindre signe de repentance " Pierre Chaunu ; De la religion d'Etat à la laïcité d'Etat.Venons-en à la question de la torture, grande tarte à la crème laïcarde. Longtemps, l'Eglise la condamne. Au IXè siècle le pape Nicolas Ier déclarait que ce moyen " n'était admis ni par les lois humaines ni par les lois divines " , au XIIè siècle une compilation de droit canonique, le décret de Gratien, reprend cette condamnation. C'est au XIIIè siècle que le développement du droit romain provoque le rétablissement de la torture dans la justice civile, et toutes les justices civiles d'Europe à l'époque considèrent la torture comme un moyen d'enquête normal.
Là encore, l'Eglise a joué un rôle de modérateur : " En 1252, Innocent IV autorise de même son usage par les tribunaux ecclesiastiques à des conditions précises : la victime ne doit risquer ni la mutilation ni la mort, l'évèque du lieu doit avoir donné son accord et les aveux exprimés doivent être renouvelés librement pour être valables " Jean Sevillia, Historiquement correct.
Il est nécessaire de remarquer que dans les fragments de procédure inquisitoriale qui nous sont parvenus, les allusions à la torture sont rares.
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