Bismarck fut contraint d’évoluer et de définir une nouvelle politique ; elle fut élaborée sous la pression des événements durant les années 1884-1890. Trois arguments avaient "tempéré" les certitudes du "chancelier de fer" : le problème de l’émigration allemande, celui de la marine et, enfin, la question du prestige du Reich.
1 - Pays d’émigration durant tout le XIXe siècle, l’Allemagne avait vu partir sans espoir de retour 3 500 000 des siens entre 1819 et 1885. Il s’agissait d’une véritable hémorragie humaine et les groupes de pression coloniaux, dont la Ligue coloniale fondée en 1883, militèrent pour que ce flot soit détourné vers ces colonies de peuplement appartenant à l’Allemagne.
2 - L’Allemagne s’était lancée dans un ambitieux programme maritime destiné à garantir la liberté commerciale sur toutes les mers du Globe. Mais encore fallait-il disposer de points d’appui sûrs ; il était donc nécessaire de posséder des colonies.
3 - Les initiatives commerciales privées permettaient, certes, à l’Etat de ne pas être engagé dans un engrenage colonial, mais, en cas de menace pesant sur des ressortissants allemands, là où aucune autre autorité européenne ne s’exerçait, fallait-il les laisser massacrer sans intervenir ?
Bismarck, qui ne pouvait plus s’opposer au mouvement de course aux colonies, tente alors de le contrôler, afin de le freiner ; il affirma alors que la constitution d’un empire colonial n’était pas un but, une fin en soi mais simplement un moyen de soutenir, d’aider le commerce de l’Allemagne. C’est précisément pour faire respecter la liberté des activités commerciales allemandes qu’il accepta la constitution des premiers noyaux de colonisation en Afrique orientale, au Togo et au Cameroun.
Le 24 avril 1884, après de longues hésitations, Bismarck télégraphia au consul allemand du Cap qu’à partir de ce jour les 1 500 kilomètres situés entre les fleuves Orange et Cunene (au sud de l’Angola) étaient placés sous protection du Reich. L’Allemagne se lançait donc à son tour dans la course aux colonies. Le 6 juillet 1884, le drapeau allemand fut hissé à Lomé (Togo) et, le 12 juillet, le protectorat proclamé au Cameroun.
Avec retard, mais avec résolution, l’Allemagne venait donc de prendre place parmi les nations intéressées par l’Afrique. Le contexte international imposait qu’une tractation coloniale se fasse au niveau européen. Afin que les rivalités coloniales ne se transforment pas en conflits armés entre les puissances, et pour que l’Allemagne ait une "part" d’Afrique à la hauteur de sa puissance en Europe, Bismarck réunit une conférence internationale à Berlin. Elle se tint du 15 novembre 1884 au 26 février 1885. Le partage du continent y fut organisé et codifié.
En 1890, Bismarck fut écarté des affaires par l’empereur Guillaume II. A partir de cette époque, une nouvelle politique fut suivie.
Ne se contentant plus de réclamer la liberté pour ses maisons de commerce, le Reich exigea une place en Afrique correspondant à sa véritable puissance. Vecteur de cette volonté, la Ligue pangermaniste (Alldeutscher Verband) diffusa ses idées au moyen de nombreuses publications ; ses relais dans la presse nationale et régionale étaient très influents. Divers comités coloniaux soutenaient, favorisaient ou encourageaient les initiatives gouvernementales. Les milieux industriels et financiers acquis à l’expansion coloniale agissaient auprès de différents organes de presse et l’ensemble entretenait un climat favorable à la revendication d’une "place au soleil" pour l’Allemagne.
A partir de 1890 toujours, l’Etat allemand prit la place des compagnies coloniales incapables de mener cette nouvelle politique qui était d’assurer au Reich une place en Afrique digne de sa puissance.
Un problème se posait, cependant, qui était de savoir comment faire un Empire à partir d’une poussière de modestes comptoirs. Ce fut l’oeuvre d’un homme, le Dr. Kayser, directeur de la Section coloniale du ministère des Affaires étrangères.
Il ne fut guère encouragé par le chancelier Caprivi, successeur de Bismarck ; il lui fallut en effet attendre 1894 pour que le chancelier Hohenlohe, après avoir définitivement engagé l’Allemagne dans une véritable politique coloniale, accepte une augmentation significative des crédits coloniaux.
par Bernard Lugan http://www.francecourtoise.info
1 - Pays d’émigration durant tout le XIXe siècle, l’Allemagne avait vu partir sans espoir de retour 3 500 000 des siens entre 1819 et 1885. Il s’agissait d’une véritable hémorragie humaine et les groupes de pression coloniaux, dont la Ligue coloniale fondée en 1883, militèrent pour que ce flot soit détourné vers ces colonies de peuplement appartenant à l’Allemagne.
2 - L’Allemagne s’était lancée dans un ambitieux programme maritime destiné à garantir la liberté commerciale sur toutes les mers du Globe. Mais encore fallait-il disposer de points d’appui sûrs ; il était donc nécessaire de posséder des colonies.
3 - Les initiatives commerciales privées permettaient, certes, à l’Etat de ne pas être engagé dans un engrenage colonial, mais, en cas de menace pesant sur des ressortissants allemands, là où aucune autre autorité européenne ne s’exerçait, fallait-il les laisser massacrer sans intervenir ?
Bismarck, qui ne pouvait plus s’opposer au mouvement de course aux colonies, tente alors de le contrôler, afin de le freiner ; il affirma alors que la constitution d’un empire colonial n’était pas un but, une fin en soi mais simplement un moyen de soutenir, d’aider le commerce de l’Allemagne. C’est précisément pour faire respecter la liberté des activités commerciales allemandes qu’il accepta la constitution des premiers noyaux de colonisation en Afrique orientale, au Togo et au Cameroun.
Le 24 avril 1884, après de longues hésitations, Bismarck télégraphia au consul allemand du Cap qu’à partir de ce jour les 1 500 kilomètres situés entre les fleuves Orange et Cunene (au sud de l’Angola) étaient placés sous protection du Reich. L’Allemagne se lançait donc à son tour dans la course aux colonies. Le 6 juillet 1884, le drapeau allemand fut hissé à Lomé (Togo) et, le 12 juillet, le protectorat proclamé au Cameroun.
Avec retard, mais avec résolution, l’Allemagne venait donc de prendre place parmi les nations intéressées par l’Afrique. Le contexte international imposait qu’une tractation coloniale se fasse au niveau européen. Afin que les rivalités coloniales ne se transforment pas en conflits armés entre les puissances, et pour que l’Allemagne ait une "part" d’Afrique à la hauteur de sa puissance en Europe, Bismarck réunit une conférence internationale à Berlin. Elle se tint du 15 novembre 1884 au 26 février 1885. Le partage du continent y fut organisé et codifié.
En 1890, Bismarck fut écarté des affaires par l’empereur Guillaume II. A partir de cette époque, une nouvelle politique fut suivie.
Ne se contentant plus de réclamer la liberté pour ses maisons de commerce, le Reich exigea une place en Afrique correspondant à sa véritable puissance. Vecteur de cette volonté, la Ligue pangermaniste (Alldeutscher Verband) diffusa ses idées au moyen de nombreuses publications ; ses relais dans la presse nationale et régionale étaient très influents. Divers comités coloniaux soutenaient, favorisaient ou encourageaient les initiatives gouvernementales. Les milieux industriels et financiers acquis à l’expansion coloniale agissaient auprès de différents organes de presse et l’ensemble entretenait un climat favorable à la revendication d’une "place au soleil" pour l’Allemagne.
A partir de 1890 toujours, l’Etat allemand prit la place des compagnies coloniales incapables de mener cette nouvelle politique qui était d’assurer au Reich une place en Afrique digne de sa puissance.
Un problème se posait, cependant, qui était de savoir comment faire un Empire à partir d’une poussière de modestes comptoirs. Ce fut l’oeuvre d’un homme, le Dr. Kayser, directeur de la Section coloniale du ministère des Affaires étrangères.
Il ne fut guère encouragé par le chancelier Caprivi, successeur de Bismarck ; il lui fallut en effet attendre 1894 pour que le chancelier Hohenlohe, après avoir définitivement engagé l’Allemagne dans une véritable politique coloniale, accepte une augmentation significative des crédits coloniaux.
par Bernard Lugan http://www.francecourtoise.info
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