jeudi 5 février 2009

Le Professeur Gérard Lucotte : « Les races existent, et il est très important que cette diversité soit maintenue »

Depuis les propos tenus par Jean-Marie Le Pen, à l'automne dernier, sur « l'inégalité des races », la question agite la société française. Pas de semaine et presque pas de jour où ce thème n'apparaisse dans la presse écrite ou parlée. Au fil des semaines, la querelle sur l' «inégalité» des races s'est muée en un débat plus fondamental : celui même de l' «existence» ou de la non-existence des races.
Sur la réalité du discours scientifique, sur l'écho conforme ou déformé qui en est donné par les médias et surtout sur l'utilisation qui en est faite à des fins politiques, nous avons voulu faire le point avec un spécialiste de la question. Nous avons donc rencontré le Professeur Gérard Lucotte, professeur à l'Ecole d'anthropologie de Paris.

❏ National Hebdo - Professeur, nous assistons depuis plus de deux mois maintenant à une querelle qui dépasse très largement les experts dont vous êtes. On veut, en gros, classer la société française en deux camps opposés : les fascistes qui croient à l'existence des races et les généreux bien pensants qui n'y croient pas. Le camp politiquement correct a un porte-parole : c'est le professeur Langaney, auquel les médias tentent de vous opposer. Comment expliquez vous cela ?
❍ Pr Lucotte : Simplement. La question des races est un problème d'anthropologie biologique. Or, il n'y a en France que deux professeurs dans cette discipline : André Langaney et moi-même.

❏ Le journal Le Monde, récemment (15/16 décembre), dans un papier qui cherchait apparemment à vous discréditer et auquel vous avez répondu par une mise au point, écrivait : « le professeur Lucotte qui enseigne dans un établissement privé ». Cela pour vous opposer, sans doute, au sérieux de l'établissement public où officie le Pr Langaney, à savoir le Musée de l'homme. Alors, dites-nous : qui fait quoi ?
❍ L'Ecole d'anthropologie de Paris a été créée par Broca, un immense anthropologue français, en 1875. C'est un établissement, reconnu d'utilité publique, d'enseignement supérieur des sciences anthropologiques. Le Musée de l'homme, lui, n'a pas, que je sache, vocation d'enseignement. Son domaine est la muséologie et M. Langaney s'y occupe principalement des expositions. J'ajouterai néanmoins qu'il y a un professeur qui enseigne l'anthropologie biologique au 3ème cycle d'Evolution humaine du Muséum d'histoire naturelle - dont dépend le Musée de l'Homme - et ce professeur n'est pas M. Langaney mais... moi-même, et ce depuis cinq ans.

❏ Le Pr Langaney n'enseigne donc pas ?
❍ Pas en France, en tout cas que je sache. En revanche, il enseigne à Genève depuis de nombreuses années. Je me pose à ce sujet des questions : vous savez que le cumul des fonctions est interdit dans la fonction publique. Comment se fait-il alors que l'administration ne l'ait pas sommé de choisir entre son poste en France et son traitement apparemment très conséquent en Suisse ?

❏ Pour les béotiens que nous sommes, pourriez-vous nous donner une définition de votre discipline : qu'est-ce que l'anthropologie ?
❍ L'anthropologie est la science qui étudie l'homme. On distingue trois grandes branches dans l'anthropologie. Tout d'abord, l'anthropologie physique qui consistait principalement en l'étude des mesures anatomiques. Cette branche est maintenant devenue l'anthropologie biologique, essentiellement génétique. C'est ma propre spécialité. Il y a ensuite l'anthropologie sociale et culturelle, qui est très développée chez nous. Il y a enfin la paléontologie humaine, c'est-à-dire l'étude de l'évolution humaine par les fossiles.

❏ D'où vient la difficulté, pire, l'impossibilité de débattre sereinement de cette question de l'existence des races, puisque c'est bien là le cœur du problème ?
❍ L'anthropologie était une science florissante avant la dernière guerre mondiale, et notamment en Allemagne. Les nazis ont multiplié le nombre de chaires d'anthropologie et ceci a abouti finalement à tous les malheurs que l'on sait, en particulier pour le peuple juif. Les déclarations de l'UNESCO dans les années cinquante ont réuni un certain nombre d'experts qui ont considéré que la race n'avait pas de fondement scientifique, et qu'il fallait bannir ce terme de la littérature scientifique.

❏ Et tout le monde a suivi ?
❍ Globalement. En Europe, oui, le cas des Anglais étant particulier. En France, il a existé une chaire d'anthropologie physique au Collège de France, qu'on avait confiée au professeur Ruffié, et dont j'ai été le collaborateur très proche pendant plus de vingt ans. Le message officiel propagé par M. Ruffié dans son enseignement et ses nombreux livres était effectivement que les races n'existaient pas.

❏ Et outre-Atlantique ?
❍ Aux Etats-Unis, la situation est totalement différente car les professeurs d'anatomie, en médecine, sont souvent des anthropologues, et non des médecins comme en France. Il y a donc beaucoup de postes d'enseignement et les options au sujet de la race sont souvent très divergentes selon les individualités. De plus, comme vous le savez, les universités américaines sont «privées», chacune d'entre elles défendant jalousement son originalité, sur ce point comme sur beaucoup d'autres.

❏ Donc, le discours des scientifiques, contrairement à ce que l'on veut nous faire croire, n'est pas du tout uniforme ?
❍ Aux Etats-Unis, sûrement pas. En Europe, le discours s'est uniformisé pour les raisons que je vous ai dites. Il semble intéressant de faire remarquer que Langaney a été nommé en pleine mouvance socialiste; il répercute bien entendu, le moment venu, le bon discours. Je ne crois pas cependant - pour bien le connaître - qu'il soit intimement convaincu de la non-existence des races humaines et de leur non-fondement héréditaire.

❏ L'anthropologie physique a donc cédé la place à l'anthropologie génétique. Dites-nous, alors : les conclusions de la génétique sont-elles différentes de celles de l'anthropologie ? Que disent-elles ou que ne disent-elles pas ?
❍ L'anthropologie physique partait de la constatation «commune», de la reconnaissance des races : les Noirs, les Jaunes. et les Blancs. Le sens commun conclut à la reconnaissance visuelle et aussi à la nature héréditaire des races : tout le monde sait que lorsqu'un Noir Bantou se marie avec une Noire Bantou, ils ne peuvent donner naissance qu'à un petit Noir Bantou. Carl von Linné a, le premier, établi une classification générale des êtres vivants, dans laquelle il a fait entrer l'homme, tout naturellement. L'homme appartient au règne animal, à l'embranchement des Vertébrés, à la classe des Mammifères, à l'ordre des Primates, à la famille des Hominidés et au genre Homo, famille et genre dont le seul représentant actuel est l'espèce Homo sapiens. Celle-ci, à son tour, se divise en races. Linné - qui parlait de variétés - distinguait l'Européenne, l'Africaine, l'Asiatique et l'Américaine, découpant ainsi notre espèce, comme les autres espèces animales ou végétales, selon leur répartition géographique et leurs traits descriptifs et biologiques distinctifs.
L'un des rôles du scientifique est de donner une explication de ce qui peut être constaté par le sens commun. Exemple : tout le monde voit que la pomme tombe et Newton arrive pour nous expliquer les règles de la gravitation, c'est-à-dire comment et pourquoi la pomme tombe. Or aujourd'hui, dans l'anthropologie majoritaire, le discours est inverse. Langaney et les autres disent : nous sommes trompés par le message de nos sens. Quoi que voient nos yeux, quoi que nous constations, les races n'existent pas. Elles ne reposent de plus sur rien de tangible du point de vue biologique et génétique.

❏ Pourquoi ce discours contre le sens commun ?
❍ Sans doute pour un motif louable, mais quelque peu naïf. On pense que si l'on dit que les races n'existent pas, le racisme va disparaître. Il y a différentes sortes de racisme : le racisme économique, le racisme religieux ... et puis le racisme dit «zoologique», c'est-à-dire celui basé sur la réalité biologique de la race. Il est évident que si les races n'existent pas, il ne peut y avoir de fondement biologique au racisme.

❏ Cela, on l'a compris, c'est le discours officiel. Néanmoins, si on s'intéresse un petit peu aux sciences connexes de l'anthropologie - on pense à la biologie, à la médecine, à la médecine légale, etc. - on s'aperçoit que tout va dans le sens contraire, c'est-à-dire la recherche des particularismes, non ?
❍ Exactement. La biologie tout entière est contre cette notion que les races n'existent pas. Au contraire, et de nombreux travaux vont dans ce sens, on étudie les particularismes «ethniques» (on a le droit de parler d'ethnie, pas de race). Dans tous les travaux, repris par tous les grands périodiques de médecine, on démontre par exemple une susceptibilité différente à la plupart des maladies, y compris les maladies infectieuses, selon les races. Principalement dans les études américaines qui comparent les Noirs avec les Blancs ou les Hispaniques, on trouve pratiquement toujours des différences du point de vue physiologique, L'autre champ d'application est la médecine légale. La police scientifique - et en particulier le FBI - ont ainsi, en travaillant sur les marqueurs génétiques modernes (technique des empreintes génétiques), mis au point des techniques ultrasophistiquées. En cas de viol, par exemple, elles permettent pratiquement d'identifier l'ethnie à laquelle appartient le coupable - en particulier s'il est de race noire ou bien caucasienne. On constitue donc des fichiers d'empreintes génétiques, comme on a actuellement les fichiers d'empreintes digitales. C'est une recherche très développée aux Etats-Unis et qui commence à l'être un peu en France.

❏ II y a donc, effectivement, une réalité pratique qui vient démentir le discours officiel ?
❍ Mais bien sûr, et on peut chaque semaine le constater. Prenez des revues scientifiques comme The Lancet, ou bien The New England journal of medicine. Dans chaque livraison, au moins un article à chaque fois consiste à comparer des performances physiologiques selon les races et on trouve des différences notables.

❏ Donc, les races existent. Maintenant, y a-t-il une inégalité des races, et si oui, dans quel domaine ?
❍ Il faut s'entendre sur le terme d'égalité et d'inégalité. Pour moi, ce ne sont pas des termes scientifiques. Prenons l'art, par exemple : il n'y a aucune «supériorité» de l'art Inca par rapport aux pyramides d'Egypte ou à la polyphonie des chants Pygmées. C'est différent, c'est tout, et chaque race peut aboutir, à sa façon, à des performances extraordinaires. En revanche, on peut dire qu'il y a une «inégalité» [précisé, «entre guillemets» NDLR] génétique profonde entre les races. Par exemple, chez les Européens, la mucoviscidose est une maladie très commune que les Noirs n'ont pas, ou très peu. A l'inverse, les Noirs souffrent de l'anémie falciforme qui est due à une mutation de l'hémoglobine, Les Juifs Ashkénazes ont la maladie de Tay-Sachs, une terrible atteinte neurologique des enfants. Pour des populations méditerranéennes, c'est la thalassénie, une autre mutation de l'hémoglobine. On peut donc dire que les races sont «inégales» dans le sens où chacune d'elles a un fardeau génétique particulier qui n'existe pas chez les autres.

❏ Langaney dit qu'il n'y a pas de races parce que nous avons une origine commune. Etes-vous d'accord avec cela ?
❍ Sur l'origine commune, tout à fait. Il y a origine commune de l'humanité, et divergence selon les continents à partir de cette origine. Chaque race est l'aboutissement d'une longue histoire biologique d'où résulte l'adaptation génétique au climat et aux conditions de vie. Chaque race est bien entendu adaptée au biotope dans lequel elle vit.

❏ Donc, à la base, Langaney et vous dites la même chose. Pourquoi, alors, lui et ses semblables nient-ils les races quand ils devraient les considérer comme l'apothéose de l'évolutionnisme biologique auquel, je pense - et s'agissant des espèces autres que l'espèce humaine- ils sont fort attachés ?
❍ Il y a bien une seule espèce humaine, et non plusieurs comme certains le croyaient à une époque. A l'intérieur de cette seule espèce, il y a diversification, c'est-à-dire différentes adaptations que sont les grandes races. Et à mon avis, il est très important que cette diversité - véritable trésor délicat de l'adaptation différentielle - soit maintenue.

❏ Sur quels sujets de recherche travaillez-vous ?
❍ Principalement sur la mucoviscidose en Europe, où je retrouve tous les particularismes ethniques (Bretons, Germaniques, Méditerranéens, Basques, Juifs ... ) et sur les marqueurs du chromosome Y, le chromosome de la masculinité, dont les variants présentent la particularité de rester inchangés au cours des générations pères-fils successives, ce qui en fait d'excellents traceurs de la différenciation humaine dans le sexe masculin.

❏ Sur toutes ces questions que nous avons évoquées, la société française développe donc comme dans bien d'autres domaines - une attitude complètement schizophrénique, en obligeant les scientifiques, relayés par les médias, à tenir un discours en contradiction totale avec les faits. Comment réagit votre milieu ?
❍ La plupart des scientifiques sont des gens honnêtes. Ils savent cependant que « la question de la race » sent le soufre et qu'il vaut mieux ne pas trop s'y attarder, ni surtout s'y prononcer. D'un côté il y a ceux qui caquettent avec la basse-cour et de l'autre - beaucoup plus nombreux - ceux qui restent à ce sujet silencieux. Personnellement, au cours de ma carrière, je n'ai jamais [avec insistance NDLR] rencontré de scientifiques niant objectivement l'existence des races et leur base héréditaire.

❏ Une dernière question : hors le motif, louable, de vouloir éradiquer le racisme, quel est à votre avis le but de ce détournement d'une vérité scientifique à des fins politiques ? Pourquoi s'acharner contre la nature et cela, si l'on vous comprend bien, contre l'intérêt même de l'humanité ?
❍ A mon avis, le débat scientifique devrait plutôt porter sur les difficultés de l'application du concept de race ! dans le cas de l'espèce humaine. Nous sommes en effet une espèce « très jeune » - de l'ordre de 200 000 ans seulement - et la «raciation» que nous observons actuellement n'est qu'un début du processus de différenciation.
Propos recueillis par Marie-Claire ROY National Hebdo du 30 janvier au 5 février 1997

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Absolutment d'accord, je suis d'origine berbère et nous sommes autochtone en Afrique du Nord sub saharienne aucunement batardé européens et tenons à le rester.

Dans la schyzophrénie anti race, hypocritement obsédée par l'éthnie bizarrement, on se gargarise des métis, mais cher ami, s'il n'y a pas de race, pourquoi y aurait il des métis ?

Anonyme a dit…

"En Afrique du Nord" tout court ! (rectification)