Le 15 octobre 1943 un message part d'Alger, où siège le Comité Français de Libération Nationale dirigé par le seul De Gaulle après que celui-ci eut réussi à évincer le général Giraud, censé codiriger, depuis le 3 juin, le CFLN. Ce message, adressé aux organisations de Résistance présentes sur le sol français, leur enjoint de prévoir, le moment venu, « en quelques heures la répression révolutionnaire de la trahison conforme aux légitimes aspirations de représailles des militants de la Résistance ». Ce pathos, directement inspiré du vocabulaire en vigueur lors de la Terreur de 1793, va légitimer la guerre civile et les pires abominations d'une "Epuration" qui, en 1944-1945, visera à l'élimination physique de tous ceux qui auraient pu se dresser contre la prise de pouvoir des communistes. Ceux-ci, convaincus que l'évolution de la Seconde Guerre Mondiale allait leur apporter sur un plateau le déclenchement du «Grand Soir», avaient entrepris - avec succès - de noyauter la Résistance intérieure, grâce aux nombreux sous-marins infiltrés dans les rouages d'organisations que les gaullistes croyaient naïvement contrôler.
Le message du 15 octobre 1943 s'inscrit dans cette perspective. Il émane en effet d'un des personnages qui illustre au mieux le travail d'infiltration communiste. Il s'agit d'Emmanuel d 'Astier de La Vigerie, commissaire à l'Intérieur dans le gouvernement provisoire d'Alger et futur ministre de l'Intérieur du Gouvernement provisoire de septembre 1944, installé à Paris par De Gaulle dans la foulée du départ des Allemands, pour faire pièce aux projets américains de vassalisation de la "France libérée". Autrement dit, Emmanuel d'Astier de La Vigerie était un élément-clef du dispositif gaulliste. Alors même que De Gaulle ne pouvait ignorer qui était, réellement, le personnage.
En l'occurrence, celui-ci revenait de loin et avait beaucoup à se faire pardonner. D'abord ses origines. Descendant du comte de Montalivet, ministre de l'Intérieur de Louis-Philippe, le «baron rouge» appartenait à une famille marquée à droite. Son frère Henri milita très jeune dans les rangs de l'Action Française, fut un de ces monarchistes très engagés dans la Résistance (il fonda le très actif réseau Orion) par germanophobie maurrassienne et participa au débarquement en Provence, puis aux combats en France et en Allemagne jusqu'à la fin de la guerre. Il prit ensuite la défense des pétainistes envoyés devant les tribunaux de l'épuration en raison de leurs convictions... et son fils Jean-Bernard d'Astier devait être jusqu'à sa mort un très fidèle «Ami de RIVAROL». Un autre frère, François, général d'aviation, fut à Londres l'un des proches collaborateurs de De Gaulle, ce qui ne l'empêcha pas, la paix venue, de publier une brochure dénonçant les excès de l'épuration.
Emmanuel eut lui-même un début d'existence assez sulfureux : officier de marine, il se reconvertit, après deux mariages successifs très mondains (avec une actrice américaine, puis la fille d'un ambassadeur soviétique), dans le journalisme. Tendance nationaliste, nuance (fortement) antisémite (entre autres, il dénonçait, le 28 mai 1935, une « juiverie occidentale, assaisonnée du ghetto d'Europe centrale »). Puis la sagesse vint : il se lança dans les affaires immobilières mais aussi dans celles liées au cinéma.
Nouvelle reconversion, pendant la guerre, dans la Résistance. Fondateur cette fois du mouvement Libération Sud, destiné à concurrencer le mouvement Combat de Frénay, jugé (à juste titre) très à droite, il dirigea le journal clandestin Libération qui publia dès janvier 1943 des «listes noires» de pétainistes à assassiner. Qualifiés, par L'Humanité qui publiait le même type de listes, de « monstres à abattre comme des chiens enragés ». De son côté, Maurice Schumann lançait les mêmes appels au meurtre sur les antennes de la BBC.
Emmanuel d'Astier avait gagné Londres en 1942, où le colonel Passy, chef des services secrets de la France libre, disait de lui qu'il faisait partie des « anarchistes en escarpins ». Ce profil faisait de lui un «compagnon de route» idéal pour les communistes. Elu député d'llle-et- Vilaine en 1945, il prit l'étiquette commode de "progressiste". Vice-président du Conseil Mondial de la Paix - l'une des efficaces courroies de transmission du Parti communiste -, il reçut en 1957 le « Prix Lénine pour la consolidation de la Paix ». En rétribution de ses bons et loyaux services.
✍ Pierre VIAL. Rivarol 31 octobre 2008
Le message du 15 octobre 1943 s'inscrit dans cette perspective. Il émane en effet d'un des personnages qui illustre au mieux le travail d'infiltration communiste. Il s'agit d'Emmanuel d 'Astier de La Vigerie, commissaire à l'Intérieur dans le gouvernement provisoire d'Alger et futur ministre de l'Intérieur du Gouvernement provisoire de septembre 1944, installé à Paris par De Gaulle dans la foulée du départ des Allemands, pour faire pièce aux projets américains de vassalisation de la "France libérée". Autrement dit, Emmanuel d'Astier de La Vigerie était un élément-clef du dispositif gaulliste. Alors même que De Gaulle ne pouvait ignorer qui était, réellement, le personnage.
En l'occurrence, celui-ci revenait de loin et avait beaucoup à se faire pardonner. D'abord ses origines. Descendant du comte de Montalivet, ministre de l'Intérieur de Louis-Philippe, le «baron rouge» appartenait à une famille marquée à droite. Son frère Henri milita très jeune dans les rangs de l'Action Française, fut un de ces monarchistes très engagés dans la Résistance (il fonda le très actif réseau Orion) par germanophobie maurrassienne et participa au débarquement en Provence, puis aux combats en France et en Allemagne jusqu'à la fin de la guerre. Il prit ensuite la défense des pétainistes envoyés devant les tribunaux de l'épuration en raison de leurs convictions... et son fils Jean-Bernard d'Astier devait être jusqu'à sa mort un très fidèle «Ami de RIVAROL». Un autre frère, François, général d'aviation, fut à Londres l'un des proches collaborateurs de De Gaulle, ce qui ne l'empêcha pas, la paix venue, de publier une brochure dénonçant les excès de l'épuration.
Emmanuel eut lui-même un début d'existence assez sulfureux : officier de marine, il se reconvertit, après deux mariages successifs très mondains (avec une actrice américaine, puis la fille d'un ambassadeur soviétique), dans le journalisme. Tendance nationaliste, nuance (fortement) antisémite (entre autres, il dénonçait, le 28 mai 1935, une « juiverie occidentale, assaisonnée du ghetto d'Europe centrale »). Puis la sagesse vint : il se lança dans les affaires immobilières mais aussi dans celles liées au cinéma.
Nouvelle reconversion, pendant la guerre, dans la Résistance. Fondateur cette fois du mouvement Libération Sud, destiné à concurrencer le mouvement Combat de Frénay, jugé (à juste titre) très à droite, il dirigea le journal clandestin Libération qui publia dès janvier 1943 des «listes noires» de pétainistes à assassiner. Qualifiés, par L'Humanité qui publiait le même type de listes, de « monstres à abattre comme des chiens enragés ». De son côté, Maurice Schumann lançait les mêmes appels au meurtre sur les antennes de la BBC.
Emmanuel d'Astier avait gagné Londres en 1942, où le colonel Passy, chef des services secrets de la France libre, disait de lui qu'il faisait partie des « anarchistes en escarpins ». Ce profil faisait de lui un «compagnon de route» idéal pour les communistes. Elu député d'llle-et- Vilaine en 1945, il prit l'étiquette commode de "progressiste". Vice-président du Conseil Mondial de la Paix - l'une des efficaces courroies de transmission du Parti communiste -, il reçut en 1957 le « Prix Lénine pour la consolidation de la Paix ». En rétribution de ses bons et loyaux services.
✍ Pierre VIAL. Rivarol 31 octobre 2008
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