lundi 5 mai 2008

Et si l'Europe ne devait rien à l'islam ?

A une heure où Monsieur Nicolas Sarkozy s’est vanté des apports de la civilisation islamique dans la culture européenne – en confondant islam et monde arabe – un étonnant ouvrage de Sylvain Gouguenheim risque de susciter débats et polémiques.
Son thème concerne la filiation culturelle entre le monde occidental et le monde musulman. Or ce professeur d'histoire médiévale à l'Ecole normale supérieure de Lyon, remet en cause un certain nombre de préjugés qui sont souvent les piliers idéologiques des apôtres du multiculturalisme. Notamment le fait que la culture européenne et principalement grecque serait redevable du monde musulman dans de nombreux domaines -philosophie, médecine, mathématique, astronomie –.
Selon Sylvain Gouguenheim, il n’y a pas eu de rupture entre l'héritage grec antique et l'Europe chrétienne du haut Moyen Age. Des manuscrits grecs circulaient, avec des hommes lettrés parfaitement à même de les lire et se seraient transmis sans passer par le prisme de la civilisation arabo-musulmane.
A titre d’exemple, au VIIIème siècle, Pépin le Bref se fit envoyer par le pape Paul Ier des textes grecs, notamment la Rhétorique d'Aristote.
Selon l’auteur, cet intérêt médiéval pour les sources grecques trouve sa source dans la culture chrétienne elle-même. Les Evangiles furent en effet rédigés en grec, comme les épîtres de Paul. Nombre de Pères de l'Eglise, formés à la philosophie, citent Platon et bien d'autres auteurs païens, dont ils ont sauvé des pans culturels entiers.
L'Europe est donc demeurée consciente de sa filiation à l'égard de la Grèce antique, et se montra soucieuse d'en retrouver les textes.
L’auteur cite également le travail des traducteurs du Mont-Saint-Michel. Ils auraient fait passer presque la totalité des ouvrages d’Aristote directement du grec au latin, plusieurs décennies avant qu'à Tolède on ne traduise les mêmes oeuvres en partant de leur version arabe.
En résumé, la culture européenne, dans son histoire et son développement, ne devrait pas grand-chose à l'islam. Loin des lieux communs assénés et considérés comme des évidences, cet ouvrage précis, scientifique et courageux participe lui aussi de la réinformation face au rouleau compresseur à broyer les peuples en particulier les peuples d’Europe.
ARISTOTE AU MONT SAINT-MICHEL. LES RACINES GRECQUES DE L'EUROPE CHRÉTIENNE de Sylvain Gouguenheim. Seuil, "L'Univers historique"
http://www.europaegentes.com/

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