samedi 13 décembre 2025

De la souveraineté…

 

Un vingtième texte de notre rubrique « Souvenez-vous de nos doctrines » est à retrouver aujourd’hui, de Pierre Boutang, extrait de Reprendre le pouvoir, paru en 1978.

[Avant de parler de pouvoir, il faut parler de souveraineté, car] le pouvoir est dérivé à tous égards, en expérience et dans le langage (…) Ce qui naît, c’est un enfant pas un homme (…) La déclaration des droits, elle, faisait naître des hommes au présent éternel ; on sait comment ses dévots traitèrent ceux qu’ils avaient sous la main (et les traitent encore).

L’enfant naît, dépend, reçoit. Le verbe pouvoir, quand il s’essaie à l’employer, ce n’est pas pour mesurer ou démesurer ses forces, c’est pour questionner sur un droit, obtenir une permission, sur ce qu’il peut, en fait, hors du regard, il n’interroge pas, il veut, exécute. Souvent, en retour, « tiens, je pourrais ». Et, plus tard, rebelle, « je peux bien » (avec parfois « tout de même »), ce qui prépare le « je suis bien libre, après tout » de l’adolescence en franche révolte. Le phénomène premier, c’est qu’il y a quelqu’un, une souveraineté que j’interroge, afin de pouvoir ou pour savoir si je peux (…).

Ces adultes pourtant, en leur « gloire » imitable et participable, l’enfant ne les nomme pas des maîtres, apprend pour eux des noms plus tendres ; pas des « puissants » non plus (…) Voilà décrit, selon une dimension et un regard d’enfant, le phénomène de la souveraineté ; le regard de l’enfant est tourné vers une hauteur « souveraine », le passage de l’imitation au recours et la découverte d’un autre « en dessus » sont les données premières de l’expérience politique.

Je reste fidèle à l’intuition qui domine la Politique (publiée en 1947), celle de la naissance, c’est-à-dire le paradoxe d’une liaison absolue à la contingence même, comme fondement de la société humaine. Et, par ailleurs, l’ordre des propositions presque axiomatiques énuméré dans mon Court traité d’il y a 20 ans ne me semble pas modifiable, si la formulation est différente et si leur illustration empirique, c’est-à-dire dans l’actualité politique s’est, évidemment, déplacée.

Voici donc cet ordre : 1. que la souveraineté existe2. qu’elle est au centre d’une lutte, vulgairement dite « lutte pour le pouvoir », mais n’est pas l’enjeu de cette lutte, dont la nature commande le déroulement. 3. elle est nécessaire, d’un type de nécessité d’essence, non comme effet de volonté ni de hasard, mais comme égale à la part de nature humaine qui instaure et délimité le politique4. elle est naturellement limitée : par cette nature politique et par le monde dans quoi elle se projette. 5. elle est extérieure, ou « transcendante » à la société (ne coïncidant jamais avec elle, et, dans le temps, à la fois en retard et en avance sur elle). 6. elle est légitime, quand elle existe, et là où elle n’est pas légitime, elle ruine sa propre essence et il n’y a plus ni souverain ni sujet. 7. elle est un projet temporel autant que la propriété d’un domaine et qu’une figure dans l’espace, et précisément le projet d’unité et de continuité de ce domaine en toute sa durée.

https://www.actionfrancaise.net/2025/12/13/de-la-souverainete/

vendredi 12 décembre 2025

Quand Trump fait du Maurras : la Maison Blanche vient de publier un texte historique et fondamental !

 

Par Gwendal Keraliès

Lorsque la Maison Blanche a publié, le 5 décembre 2025, son nouveau document National Security Strategy, peu de commentateurs ont réellement mesuré l’ampleur de ce qu’ils avaient sous les yeux. Techniquement, il s’agit d’un texte officiel fixant pour plusieurs années les principes conducteurs de la politique extérieure et de sécurité des États-Unis. Politiquement, c’est tout autre chose : c’est le premier exposé doctrinal cohérent, complet, assumé, de ce que l’on peut appeler le trumpisme.

Jusqu’ici, le personnage de Donald Trump laissait perplexes ceux qui tentaient de classer son orientation profonde : centrisme pragmatique, puisque, par exemple, il finança Hillary Clinton dans les années 2000 ; tentation néo-conservatrice, puisqu’il gouverna sous son premier mandat avec des faucons comme John Bolton ; élan libertarien avec Elon Musk, héritier d’une Amérique farouchement individualiste ; réflexes paléo-conservateurs hérités de Pat Buchanan. On flottait dans l’incertitude.

Avec ce nouveau NSS, la première nouvelle, c’est que l’ambiguïté disparaît. La Maison Blanche parle enfin d’une seule voix. Et cette voix n’a plus rien à voir avec l’ordre globalisé que Washington entendait maintenir depuis 1945.

C’est un document historique, au sens littéral puisque ce NSS n’est pas un énième rapport technocratique. C’est un basculement. Pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, un président des États-Unis annonce que l’architecture du monde occidental ne repose plus – et ne reposera plus – sur le modèle atlantiste, supranational, universaliste, qui dominait sans partage depuis près de quatre-vingts ans.

Ce texte marque la fin d’une époque. Et, paradoxe délicieux, ce sont les États-Unis eux-mêmes qui enterrent l’ordre mondial qu’ils avaient imposé. On chercherait en vain, dans les grandes démocraties occidentales, un dirigeant qui oserait renouer avec les mots qui furent ceux de Charles Maurras : primauté de la civilisation ; centralité des nations charnelles ; rejet des constructions abstraites et supranationales ; droit naturel des peuples à persévérer dans leur être. Or, voilà que cette doctrine – honnie sur le vieux continent – ressurgit… à Washington.

Il est question de civilisation, souveraineté, nations ; l’ossature du texte est maurrassienne : le chapitre introductif du NSS suffirait déjà à provoquer un scandale permanent dans les capitales européennes. On y lit que l’État-nation est l’unité fondamentale du monde et que chaque peuple doit reconnaître sa souveraineté, la défendre, en refuser la dilution.

La Maison Blanche affirme désormais que les organisations transnationales ne doivent pas pouvoir restreindre l’autorité d’un État sur son territoire, sa culture et son avenir. Pour tout lecteur familier de la pensée maurrassienne, la convergence saute aux yeux : les nations sont organiques ; les constructions supranationales sont mécaniques. Les premières survivent ; les secondes s’effondrent. Cette philosophie était bannie d’Occident depuis 1945. Elle revient aujourd’hui par la porte principale.

Ici l’Europe rappelée à l’ordre – et à ses mensonges. Il fallait bien que les Européistes hurlent à « l’ingérence ». Ils ne s’en privèrent pas. Mais où étaient leurs cris lorsque Barack Obama imposait ses vues sur les gouvernements européens ? Lorsque la NSA écoutait les conversations des dirigeants européens ? Où étaient-ils lorsque Joe Biden conditionnait l’aide militaire, la politique énergétique et même les régulations numériques des pays de l’Union ? L’indignation est sélective : elle n’apparaît que lorsque Washington cesse d’être globaliste. Les Européistes défendront leur religion jusqu’à son dernier souffle.

Car l’analyse que fait ce texte « NSS » sur l’Europe est d’une sévérité inédite, mais d’une lucidité parfaite. Il décrit un continent : désarmé psychologiquement, ravagé par l’immigration de masse, bâillonné par une idéologie normative, incapable de maintenir ses taux de natalité, en voie d’effacement civilisationnel. Et, encore une fois, l’écho maurrassien est clair : sans continuité historique, sans identité durable, il n’existe pas de nation vivante. Trump ne dit pas autre chose. On est très surpris que ça vienne d’une personnalité comme la sienne, mais c’est ainsi (encore que son vice-président JD Vance semble avoir un discours réactionnaire un peu plus construit qui pourrait avoir influencé l’homme à la casquette rouge).

C’est la fin de la globalisation, le retour du monde multipolaire. En effet, un autre point est essentiel : le document acte la fin du rôle américain de « gendarme du monde ». L’administration Trump ne veut plus soutenir l’ordre planétaire tel qu’il avait été pensé en 1945 ; elle souhaite que les États-Unis défendent avant tout leur propre civilisation, sans se sacrifier pour maintenir des illusions universalistes, confirmant ainsi le slogan de Trump : « America First ».

Cette acceptation du multi-polarisme constitue évidemment une excellente nouvelle. Elle reconnaît que chaque civilisation possède une logique qui lui est propre, une forme, une tradition, une langue politique.

S’agissant de la Russie et l’Ukraine, c’est une lecture fondée sur la force et la faiblesse qui est faite. Le document affirme que l’Europe est agressive envers la Russie parce qu’elle est faible et pas de taille à lui faire face. L’idée est claire : les nations solides négocient ; les nations faibles gesticulent. Quant à l’Ukraine, l’objectif américain semble évident : Trump souhaite la paix, Zelensky la refuse (actuellement il refuse de céder le moindre territoire), La guerre va donc continuer. En conclusion, on peut penser que l’aide américaine diminuera probablement. Non par sympathie pour Moscou, mais parce que l’Amérique ne veut plus soutenir indéfiniment des conflits qui n’appartiennent pas à sa priorité civilisationnelle.

Pour ce qui concerne le soutien aux mouvements souverainistes européens, c’est un séisme politique. Au-delà de l’analyse, le NSS affirme clairement que Washington souhaite soutenir les mouvements patriotiques européens, ceux qui défendent l’héritage civilisationnel du continent.

Là encore, les Européens globalistes crient à l’ingérence. Pourtant, ce soutien correspond simplement à un principe, que l’Action française défend depuis un siècle : les nations ont le droit et le devoir de s’organiser.

Si l’Europe s’effondre, dit en substance la Maison Blanche, c’est toute la civilisation occidentale qui se décompose. Et les États-Unis n’ont aucun intérêt à voir disparaître leur sœur civilisationnelle. « Si les tendances actuelles se poursuivent, le continent sera méconnaissable d’ici 20 ans, voire moins. Dans ces conditions, il est loin d’être certain que certains pays européens disposeront d’économies et d’armées suffisamment fortes pour rester des alliés fiables. Nombre de ces nations persistent actuellement dans cette voie. Nous souhaitons que l’Europe reste européenne, qu’elle retrouve sa confiance en elle sur le plan civilisationnel et qu’elle abandonne son approche inefficace de réglementation excessive. Ce manque de confiance en soi est particulièrement manifeste dans la relation de l’Europe avec la Russie. (…) »

Un renversement des lignes idéologiques est possible… Le diagnostic posé dans le récent ouvrage de Mathieu Bock-Côté, Les Deux Occidents, trouve ici une résonance nouvelle. Oui, écrit-il, l’Occident est aujourd’hui divisé : une Amérique conservatrice, une Europe post-nationale, progressiste, idéologiquement épuisée. Mais qu’en sera-t-il dans un an, avec les élections de mi-mandat aux États-Unis ? Les Américains sont-ils vraiment tous devenus maurrassiens vendredi dernier ? Ça reste à confirmer !!!!! Si maintenant on regarde l’Europe, a contrario les partis conservateurs (et/ou populistes) semblent progresser partout. Malheureusement, sans cette dimension civilisationnelle et souverainiste conseillée par Trump.

En conclusion, souhaitons que l’Europe se ressaisisse – enfin. L’histoire retiendra peut-être ce NSS comme l’un des textes fondateurs du XXIᵉ siècle. Un document qui rompt avec l’illusion mondialiste et propose un retour au réel : la civilisation, les frontières, la souveraineté, les nations. Espérons que les peuples européens sauront entendre l’avertissement venu d’outre-Atlantique. Espérons que leurs dirigeants sauront s’inspirer de cette réhabilitation du politique, du réel, de l’héritage et de la continuité historique. Et espérons, surtout, que la majorité du peuple américain confirmera cette orientation, permettant au monde occidental de renouer avec son génie propre : une civilisation consciente de sa valeur et fidèle à ses nations.

Une précision est, bien sûr, nécessaire : si ce texte est fondamental et inspirant, ça ne valide néanmoins pas la totalité de la politique trumpiste.

https://www.actionfrancaise.net/2025/12/12/quand-trump-fait-du-maurras-la-maison-blanche-vient-de-publier-un-texte-historique-et-fondamental/

mercredi 10 décembre 2025

Le dogme du dérèglement climatique anthropique et ses dissidents

 

Le dogme du dérèglement climatique anthropique et ses dissidents

Ancien dirigeant d’entreprise, Guy Barbey est le président de l’association Climat et Vérité, qui publie chaque semaine sur internet une revue de presse gratuite en vue de « favoriser un débat ouvert et pluraliste sur la science climatique et sur la transition énergétique ». Dans un livre très documenté, Les dissidents du climat — Les thèses du GIEC en question (Éditions Bookelis, 286 pages, 18 euros), préfacé par le professeur Paul Deheuvels, membre de l’Académie des sciences, et par le polytechnicien Michel Vieillefosse, vice-président de l’association des anciens du Centre national d’études spatiales, l’auteur démontre comment l’ONU, via le GIEC, poursuit des objectifs politiques en imposant « la culpabilisation du CO2 anthropique à la communauté internationale ».

Le GIEC est un organisme politique

L’Intergovernmental panel on climate change (IPCC) a été créé en 1988 par l’ONU, suite à une initiative du G7 impulsée par Ronald Reagan et Margaret Thatcher qui souhaitaient notamment réduire l’influence des syndicats de mineurs dans leurs pays respectifs.

La traduction en français, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), laisse à penser que ses participants possèdent un statut d’expert alors qu’ils ne sont que des représentants désignés par les États membres.

La mission de cet organisme consiste à s’intéresser à l’influence humaine sur le climat, et non à étudier les causes naturelles pouvant l’affecter telles que les rôles du soleil et de l’océan, les changements d’orbite de la terre, etc.

« Comment le GIEC peut-il prétendre procéder à des analyses neutres alors que sa maison-mère, l’ONU, a décrété et fait approuver en 1992, dans la Convention cadre des Nations-Unies sur le changement climatique, la condamnation du CO2 anthropique par anticipation ? »

Son premier objectif a consisté à « étouffer toute velléité des scientifiques indépendants de contester la thèse du rôle central du CO2 anthropique dans le réchauffement climatique ».

Aujourd’hui encore, « de nombreux scientifiques n’osent plus s’exprimer car ils craignent des représailles », tandis qu’« une douzaine de pétitions internationales comportant parfois des milliers de signatures de scientifiques sont restées sans réponse ».

Une scientificité douteuse

Guy Barbey a initialement adhéré aux conclusions formulées par le GIEC, dont la crédibilité scientifique lui paraissait établie, avant de lire les critiques argumentées de scientifiques renommés qui subissaient une véritable omerta.

L’auteur ne conteste pas le réchauffement climatique en cours mais s’efforce d’en comprendre les causes : « C’est le rôle central accordé aux gaz à effet de serre et en particulier au CO2 anthropique dans le réchauffement climatique ainsi que l’objectif de neutralité carbone en 2050 qui sont en question. »

Depuis l’origine, « le GIEC a multiplié les prédictions apocalyptiques sur l’évolution du climat, qui se sont révélées largement fausses chaque fois qu’il a été possible de les vérifier ».

Sur la base de modèles mathématiques très simplifiés et en désaccord avec les mesures de la température de l’atmosphère, des rapports, régulièrement publiés, concluent à la culpabilité du CO2, tandis que les thèses critiques sont passées sous silence.

Contrairement au principe de la démarche scientifique qui consiste à émettre des hypothèses puis à comparer les théories à la réalité, ces rapports partent des conclusions voulues par les rédacteurs finaux, tout en utilisant un artifice qui consiste à apposer les noms de tous les contributeurs pour suggérer que chacun d’eux valide lesdites conclusions.

Des falsifications graves sont avérées, comme dans le rapport de 1995 où les conclusions de scientifiques n’ayant pas attribué les changements climatiques à l’augmentation des gaz à effet de serre ont été modifiées dans la rédaction finale.

Par ailleurs, malgré le haut degré de confiance qui leur est attribué, « les prévisions ou projections faites à partir des modèles ne sont pas fiables », d’autant plus que la complexité du sujet étudié est accentuée par l’existence d’une trentaine de climats différents et non d’un seul, selon la classification retenue par les géographes.

Une manipulation d’envergure est apparue lorsque l’évolution des températures admise par les scientifiques depuis le Moyen Âge a été contestée par un certain Michael E. Mann en 1998. L’histoire du climat démontre que des périodes de fort réchauffement ont alterné avec des périodes de fort refroidissement, sans que ces variations puissent être attribuées à l’activité humaine du fait de l’existence d’un optimum médiéval plus chaud que la période actuelle, suivi d’un petit âge glaciaire et d’une remontée des températures vers 1850. Les conclusions de ce « jeune climatologue fraîchement diplômé », effaçant à la fois cet optimum et ce petit âge glaciaire tout en mettant en évidence « une accélération très marquée de la température de la planète depuis le début du XXe siècle », ont été retenues par le GIEC qui leur a donné une publicité considérable, malgré le fait que la courbe des températures présentée par l’intéressé ait fait l’objet de solides critiques scientifiques et déclarées fausses par une commission sénatoriale américaine en 2006.

En 2011, le GIEC a également « annoncé en grande pompe » que « 77 % des besoins énergétiques de la planète pourraient être fournis par les énergies renouvelables en 2050 », alors que l’Agence internationale de l’énergie estimait leur potentiel à 10 %. Cette information erronée a servi de référence aux travaux préparatoires des Accords de Paris en 2015.

L’Occident doit payer et s’appauvrir

Les énergies fossiles (pétrole, charbon et gaz naturel) fournissent près de 80 % de l’énergie primaire dans le monde. Selon l’Agence internationale de l’énergie, ce pourcentage ne pourra faiblir que lentement car tous les pays en ont grandement besoin, soit pour sortir de la pauvreté, soit pour défendre leur niveau de vie.

L’objectif de la « neutralité carbone », fixé à l’horizon 2050, entraînerait de fait les nations occidentales vers la décroissance économique et l’appauvrissement, pendant que d’autres puissances ne se restreindraient nullement.

Les thèses avancées par le GIEC conduisent en réalité à un « grand marchandage financier planétaire » dans lequel les pays industrialisés sont déclarés responsables du réchauffement climatique et sommés de « payer des sommes substantielles au reste du monde pour l’aider à faire face à cette situation nouvelle ».

Un haut dirigeant du GIEC, Ottmar Edenhofer, a ainsi déclaré : « Il faut dire clairement que nous redistribuons en fait la richesse du monde par la voie de la politique climatique. »

L’exigence d’un débat scientifique

À l’inverse de ce qui est couramment avancé, de nombreux scientifiques (dont des prix Nobel), universitaires et experts n’adhèrent pas au dogme du réchauffement climatique anthropique lié à la combustion des énergies fossiles.

L’auteur consacre de longues pages à recenser en détail « les voix des Dissidents du climat, étouffées par l’omerta » (dont l’association de scientifiques belges Science, climat et énergie, qui propose sur son site internet une excellente recension du livre de Guy Barbey).

Au moment où cette contestation scientifique ne peut plus être ignorée, le risque est réel que, sous prétexte de sauver la planète, ces dissidents climatiques soient l’objet de mesures liberticides : « On pourrait très bien entrer en France dans une nouvelle phase où la censure sera officialisée et les contrevenants sanctionnés. »

Il est pourtant indispensable d’exiger une confrontation honnête et publique entre les tenants des thèses opposées : « La France s’honorerait à prendre la tête d’une telle initiative visant à faire revivre le pluralisme scientifique écrasé par trente ans d’hégémonie onusienne. »

Johan Hardoy
09/12/2025

https://www.polemia.com/le-dogme-du-dereglement-climatique-anthropique-et-ses-dissidents/

L’enjeu de la bataille de Bretton Woods en 1944 : leçons pour aujourd’hui

 

Poutine appelle à l’élaboration d’un nouveau système financier international

Alors que le monde d’aujourd’hui vacille au bord d’un effondrement financier plus important que ce que le monde a connu à Weimar en 1923, ou pendant la Grande Dépression de 1929, les dirigeants de la Russie et de la Chine ont entamé une discussion sérieuse sur les termes du nouveau système qui doit inévitablement remplacer l’ordre néolibéral en voie de disparition. Plus récemment, Vladimir Poutine a relancé son appel du 16 janvier 2020 pour une nouvelle conférence économique d’urgence afin de faire face à la catastrophe imminente dans le cadre d’une session publique avec les représentants des cinq puissances nucléaires du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Alors que l’engagement de Poutine pour ce nouveau système repose sur des principes multipolaires de coopération et de respect des souverainetés nationales, l’oligarchie financière et les structures étatiques profondes plus larges infestant les nations occidentales, qui ont déclenché cette crise au cours de décennies de globalisation, ont appelé à leur propre version d’un nouveau système. Ce nouveau système, comme nous l’avons vu, promu par des entités comme la Banque d’Angleterre et les principaux technocrates au cours de l’année écoulée, est basé sur un système unipolaire anti-nation qui se présente généralement sous le nom de «Green New Deal». En d’autres termes, il s’agit d’un système dirigé par une élite technocratique gérant la diminution de la population mondiale grâce à la monétisation des pratiques de réduction du carbone sous un gouvernement mondial.

Peu importe comment vous le voyez, un nouveau système sera créé à partir des cendres de l’ordre mondial actuellement en train d’agoniser. La question est seulement : cela bénéficiera-t-il à l’oligarchie ou au peuple ?

Afin d’éclairer la prise de décision nécessaire à cette conférence d’urgence, il est utile de revoir la dernière conférence d’urgence de ce type, qui a défini les termes d’une architecture économique mondiale en juillet 1944, afin que les erreurs qui ont ensuite été commises par les forces anti-impérialistes ne soient pas renouvelées.

Qu’est-ce que Bretton Woods ?

Alors qu’il devenait évident que la guerre allait bientôt prendre fin, un combat majeur a éclaté lors d’une conférence de deux semaines à Bretton Woods, dans le New Hampshire, où des représentants de 44 nations se sont réunis pour établir les termes du nouveau système d’après-guerre. La question était : ce nouveau système sera-t-il régi par des principes impériaux britanniques similaires à ceux qui dominaient le monde avant le début de la guerre ou bien sera-t-il façonné par une communauté d’États-nations souverains ?

D’un côté, des personnalités ralliées à la vision du président américain Franklin Delano Roosevelt pour un ordre mondial anti-impérialiste se sont alignées derrière le champion de FDR, Harry Dexter White, tandis que les forces puissantes engagées à maintenir les structures de la dictature des banquiers – la Grande-Bretagne a toujours été essentiellement un empire banquier – se sont alignées derrière la figure de John Maynard Keynes.

Aparté

Vous pensez peut-être « Attendez ! FDR et son New Deal n’étaient-il pas fondés sur les théories de Keynes ? » Comment Keynes aurait-il pu représenter une force opposée au système de FDR si tel est le cas ? Ce paradoxe n’existe, dans l’esprit de nombreuses personnes aujourd’hui, qu’en raison du succès de l’armada d’historiens révisionnistes de la Fabian Society et du Round Table Movement, qui ont constamment soutenu un récit mensonger de l’histoire, pour faire croire aux générations futures essayant d’apprendre des erreurs passées, que les personnages comme FDR qui s’opposaient à l’empire suivaient en réalité eux-mêmes les principes impériaux. Un autre exemple de ce tour de passe-passe peut être vu par le grand nombre de personnes qui se pensent sincèrement informées et croient pourtant que la révolution américaine de 1776 a été conduite par la pensée philosophique impériale britannique issue d’Adam Smith, Bentham et John Locke.

John Maynard Keynes était l’un des principaux leaders de la Fabian Society et trésorier de la British Eugenics Association – qui a servi de modèle aux protocoles eugéniques d’Hitler avant et pendant la guerre.

Au cours de la conférence de Bretton Woods, Keynes a fortement insisté pour que le nouveau système soit fondé sur une monnaie mondiale entièrement contrôlée par la Banque d’Angleterre, monnaie connue sous le nom de Bancor. Il a proposé qu’une banque mondiale appelée Clearing Union soit contrôlée par la Banque d’Angleterre qui utiliserait le Bancor, échangeable avec les monnaies nationales, et servirait d’unité de compte pour mesurer les excédents ou les déficits commerciaux dans le cadre du mandat de maintenir «l’équilibre» mathématique du système.

Harry Dexter White, de son côté, a lutté sans relâche pour garder la ville de Londres hors du siège des pilotes de la finance mondiale et a plutôt défendu l’institution de la souveraineté nationale et des monnaies souveraines sur la base d’une croissance scientifique et technologique à long terme. Bien que White et FDR aient exigé que les dollars américains deviennent la monnaie de réserve dans le nouveau système mondial de taux de change fixes, cela n’a pas été fait pour créer un «nouvel empire américain» comme la plupart des analystes modernes l’ont supposé, mais a plutôt été conçu pour utiliser le statut américain de puissance mondiale productive la plus forte, pour assurer une stabilité anti-spéculative parmi les monnaies internationales qui manquaient totalement de stabilité au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

La bataille pour des taux de change fixes et les principes de «prix de parité» a été conçue, par FDR et White, strictement autour de la nécessité d’abolir les flux chaotiques des marchés non réglementés, engendrant la spéculation rampante sous le régime du libre-échange britannique en détruisant la capacité de penser et planifier le développement à long terme nécessaire pour moderniser les États-nations. Ce n’était pas une recherche de «l’équilibre mathématique» mais plutôt une volonté de «mettre fin à la pauvreté» grâce à une vraie croissance de l’économie physique des colonies qui gagneraient ainsi une véritable indépendance économique.

Des personnalités comme Henry Wallace, fidèle vice-président de FDR et candidat du 3e parti en 1948, le représentant William Wilkie, assistant républicain de FDR et négociateur du New Deal, et Dexter White ont tous insisté, à plusieurs reprises, sur le fait que les mécanismes de la Banque mondiale, du FMI et des Nations Unies devaient devenir les moteurs d’une internationalisation du New Deal qui avait sorti l’Amérique du cloaque en 1932, pour en faire, douze ans plus tard, une puissance manufacturière moderne et avancée. Tous ces adeptes du New Deal international étaient de fervents défenseurs du leadership américano-russo-chinois dans le monde de l’après-guerre, ce qui est un fait oublié, mais néanmoins d’une importance capitale.

Dans son livre de 1944, Our Job in the Pacific, Wallace a déclaré :

«Il est vital pour les États-Unis, il est vital pour la Chine et il est vital pour la Russie qu’il y ait des relations pacifiques et amicales entre la Chine et la Russie, la Chine et l’Amérique, et la Russie et l’Amérique. La Chine et la Russie se complètent sur le continent asiatique et les deux complètent la position de l’Amérique dans le Pacifique.»

Contredisant le mythe selon lequel FDR était un keynésien, l’assistante de FDR, Frances Perkins, a noté le contact entre les deux hommes en 1934 lorsque Roosevelt lui a dit :

«J’ai vu votre ami Keynes. Il m’a submergé de  chiffres. Il doit être mathématicien plutôt qu’économiste politique. »

En réponse, Keynes, qui essayait alors de récupérer le récit intellectuel du New Deal, a déclaré qu’il avait «supposé que le président était plus littéraire, économiquement parlant».

Dans son édition allemande de 1936 de sa General Theory of Employment, Interest and Money, Keynes écrivait :

«Car j’avoue qu’une grande partie du livre est illustrée et exposée principalement en référence aux conditions existantes dans les pays anglo-saxons. Néanmoins, la théorie de la production dans son ensemble, ce que le livre prétend fournir, est beaucoup plus facilement adaptée aux conditions d’un État totalitaire.»

Tandis que Keynes représentait «l’impérialisme doux» de la «gauche» de l’intelligentsia britannique, Churchill représentait l’impérialisme «pur et dur» et sans vergogne de l’Ancien empire, moins sophistiqué, qui préférait l’usage intensif de la force brute pour maîtriser les sauvages. Tous deux étaient aussi des racistes et des fascistes invétérés – Churchill a même parlé avec admiration des chemises noires de Mussolini – et tous deux incarnaient les pratiques les plus viles de l’impérialisme britannique.

Révision de la vision anti-colonialiste oubliée de FDR

La bataille de FDR contre Churchill sur la question de l’empire est mieux connue que ses divergences avec Keynes qu’il n’a rencontré qu’à quelques reprises. Cet affrontement bien documenté est mieux illustré dans le livre de son fils et assistant Elliot Roosevelt, As He Saw It (1946), qui cite son père :

«J’ai essayé de faire comprendre… que même si nous sommes alliés [de la Grande-Bretagne] et que nous voulons la victoire à leurs côtés, ils ne doivent jamais imaginer que nous y sommes juste pour les aider à conserver leur idée d’empire, archaïque et médiévale… J’espère qu’ils se rendent compte qu’ils ne sont pas des partenaires seniors ; que nous n’allons pas rester les bras croisés et regarder leur système freiner la croissance de tous les pays d’Asie et de la moitié des pays d’Europe.»

FDR a poursuivi :

«Le système colonial signifie la guerre. Exploiter les ressources de l’Inde, de la Birmanie, de Java ; enlever toutes les richesses de ces pays, mais n’y remettre jamais rien, comme l’éducation, un niveau de vie décent, des exigences minimales de santé. Tout ce que vous faites, c’est accumuler le genre de problèmes qui mènent à la guerre. Tout ce que vous faites, c’est nier la valeur de tout type de structure organisationnelle pour la paix avant même qu’elle ne commence.»

Écrivant de manière hystérique à Churchill, depuis Washington, le ministre britannique des Affaires étrangères Anthony Eden a déclaré que Roosevelt «envisage le démantèlement des empires britannique et néerlandais».

Malheureusement pour le monde, FDR mourut le 12 avril 1945. Un coup d’État au sein de l’establishment Démocrate, alors rempli de Fabians et Rhodes Scholars [disciples de Cecil Rhodes], s’étaient déjà assurés qu’Henry Wallace perdrait la vice-présidence de 1944 au profit du larbin anglophile de Wall Street, Harry Truman. Truman n’a pas tardé à balayer toutes les intentions de FDR, nettoyant les renseignements américains de tous les patriotes restants avec la fermeture de l’OSS et la création de la CIA, le lancement inutile et criminel de bombes nucléaires sur le Japon et l’établissement de relations spéciales anglo-américaines. L’adhésion de Truman au nouvel ordre mondial de Churchill a détruit la relation positive avec la Russie et la Chine que recherchaient FDR, White et Wallace, et bientôt l’Amérique était devenue l’idiot utile géant de la Grande-Bretagne.

La prise de contrôle de l’État profond moderne après 1945

FDR, avant sa mort, a averti son fils qu’il avait compris la prise de contrôle britannique de la politique étrangère américaine, mais ne pouvait toujours pas inverser ce programme. Son fils a raconté la perspicacité inquiète de son père :

«Vous n’imaginez pas le nombre de fois où les hommes du Département d’État ont essayé de me cacher des messages, les retarder, les retenir en quelque sorte, simplement parce que certains de ces diplomates de carrière, là-bas, ne sont pas d’accord avec ce qu’ils connaissent de mes idées. Ils devraient travailler pour Winston. En fait, la plupart du temps, ils le font [travailler pour Churchill]. Arrêtez de penser à eux : un certain nombre d’entre eux sont convaincus que la façon pour l’Amérique de mener sa politique étrangère est de comprendre ce que font les Britanniques, puis de les copier ! On m’a dit… il y a six ans, de nettoyer ce Département d’État. Il est comme le British Foreign Office…»

Avant d’être renvoyé du cabinet de Truman pour son plaidoyer en faveur de l’amitié américano-russe pendant la guerre froide, Wallace a évoqué «Le fascisme américain», connu depuis quelques années sous le nom d’État profond. Il a dit :

«Le fascisme de l’après-guerre poussera inévitablement de façon constante en faveur de l’impérialisme anglo-saxon et, finalement, à la guerre avec la Russie. Déjà, les fascistes américains parlent et écrivent sur ce conflit et l’utilisent comme excuse pour leurs haines internes et leurs intolérances envers certaines races, croyances et classes.»

Dans sa mission soviétique en Asie en 1946, Wallace a déclaré :

«Alors que le sang de nos garçons n’a pas encore séché sur le champ de bataille, ces ennemis de la paix tentent de jeter les bases de la troisième guerre mondiale. Ces gens ne doivent pas réussir leur immonde entreprise. Nous devons neutraliser leur poison en suivant la politique de Roosevelt et en cultivant l’amitié de la Russie dans la paix comme dans la guerre.»

En effet, c’est exactement ce qui s’est produit. Les trois années passées par Dexter White à la tête du Fonds monétaire international ont été assombries par des attaques constantes, le présentant comme une marionnette soviétique, qui le hanteront jusqu’au jour de sa mort en 1948 après une session d’enquête exténuante de la Chambre des représentants pour ses activités anti-américaines. White avait précédemment soutenu l’élection de son ami Wallace à la présidence, aux côtés de ses amis patriotes Paul Robeson et Albert Einstein.

Aujourd’hui, le monde a saisi une deuxième chance de raviver le rêve de FDR d’un monde anticolonialiste. Au XXIe siècle, ce grand rêve a pris la forme de la Nouvelle Route de la Soie, dirigée par la Russie et la Chine, et rejointe par un nombre croissant de nations aspirant à sortir de la cage invisible du colonialisme.

Si les pays occidentaux souhaitent survivre à l’effondrement imminent, ils feraient bien de répondre à l’appel de Poutine pour un nouveau système international, de rejoindre la Nouvelle Route de la Soie et de rejeter les technocrates keynésiens prônant un faux «New Bretton Woods» sous le masque d’un «Green New Deal».

Matthew Ehret

Source The Saker Blog

Traduit par jj, relu par Marcel pour le Saker Francophone

via:https://lesakerfrancophone.fr/lenjeu-de-la-bataille-de-bretton-woods-en-1944-lecons-pour-aujourdhui

https://reseauinternational.net/lenjeu-de-la-bataille-de-bretton-woods-en-1944-lecons-pour-aujourdhui/

mardi 9 décembre 2025

Maurras et la géopolitique européenne

 

Combat royaliste 103

Par Philippe Germain

Alors que le centre de la planète se déplace en indopacifique, l’Action française se souvient qu’en 1934 Maurras défendait la « plus grande France », notre outre-mer, dont les nationalistes cohérents perçoivent aujourd’hui la puissance géopolitique.

Il n’est pas pour autant nécessaire de reprendre le refrain de la Légion, « Adieu vieille Europe, que le Diable t’emporte », ni le vieux chant d’Action française « Crève l’Europe, pour notre bien », non l’Europe meurt lentement de son impérialisme progressiste vers l’Est. L’Europe démasquée est prise la main dans le sac ; et que restera-t-il de sa crédibilité et peut-être même de son existence une fois la guerre d’Ukraine terminée ?

C’est donc le moment de s’interroger sur la vision géopolitique maurrassienne sur l’Europe. Maurras voyait trois blocs civilisationnels : le bloc latin, le bloc anglo-saxon et le bloc germanique, chacun caractérisé par des particularités culturelles profondes, influençant leur organisation politique et sociale.

Le bloc latin regroupant principalement la France, l’Italie, l’Espagne et le Portugal. Ces nations héritières des ordres romain et catholique. Leur culture favorise l’autorité monarchique et une vision de l’État qui privilégie l’unité et la stabilité. L’État y est une entité forte et hiérarchisée, garantissant la prospérité et l’ordre social. La France doit y jouer le rôle majeur en préservant les valeurs traditionnelles et en combattant les forces extérieures qui cherchent à imposer des modèles opposés.

Le bloc anglo-saxon, incarné par le Royaume-Uni, tourné vers les États-Unis d’Amérique, représente la culture du libéralisme, de l’individualisme et du protestantisme. Ce modèle se distingue par une forte démocratie parlementaire et une liberté économique qui favorisent la concurrence et l’indépendance individuelle. Sa culture est déstabilisante pour l’Europe, car elle tend à affaiblir les structures hiérarchiques et à promouvoir une vision du monde capitaliste et démocratique incompatible avec l’ordre traditionnel du bloc latin.

Le bloc germanique, représenté par l’Allemagne, rêvant d’un « Nouvel Ordre Européen » est une menace due à son militarisme et son centralisme autoritaire. L’Allemagne repose sur une bureaucratie rigide, où l’État et l’armée exercent un contrôle absolu. L’expansionnisme de l’Allemagne est une menace pour l’équilibre européen. Sa culture, soutenue par un fort militarisme, contraste avec les valeurs latines de hiérarchie douce et de stabilité sociale.

Maurras considère la France comme le pivot du bloc latin, destinée à défendre l’ordre et la tradition monarchique contre l’influence des deux autres blocs, fondés sur l’individualisme anglo-saxon et le militarisme allemand. D’où la nécessité nationaliste du combat royaliste d’Action française.

https://www.actionfrancaise.net/2025/12/09/combat-royaliste-103/

lundi 8 décembre 2025

Les ONG d’ultra-gauche condamnent les éoliennes… en Norvège, pas en France

 

@Pexels
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Les ONG internationalistes sont vent debout contre un projet d’éoliennes qui menace les populations locales… en Norvège.

Les Samis ne veulent pas des éoliennes

Entre les mers de Norvège et de Barents, sur des territoires immenses situés au nord de la Norvège, de la Suède et de la Finlande, les Samis ont fait et gagné un procès contre l’installation de vastes champs d’éoliennes qui mettraient en danger leurs élevages traditionnels de rennes. En 2013, ces éleveurs ont déposé plainte contre les acteurs de l’éolien responsables de ces projets, auprès du ministère du Pétrole et de l’Énergie norvégien. Mais le gouvernement faisant la sourde oreille, l’affaire a été portée devant les tribunaux, et avec succès, puisqu’en 2021, la Cour suprême de Norvège leur a donné raison, déclarant « illégales les 151 éoliennes de Storheia, installées sur les terres autochtones, validant la plainte des [Samis] du Sud pour violation du droit de la communauté autochtone à la culture selon l’art. 27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de l’ONU ».

Ce jugement est d’autant plus dommageable pour les acteurs de l’éolien de Norvège qu’il crée un précédent et pourrait donc faire jurisprudence, si des plaintes venaient dénoncer d’autres projets du même type à l’avenir. Or, il semble que le gouvernement norvégien, aussi « éoliénophile » que son homologue français, ait peu tenu compte des conclusions du tribunal et poursuive imperturbablement ses projets en la matière.

Vérité au nord du cercle polaire arctique, erreur au-delà…

L’affaire est d’importance mondiale. Aussi, avec le savoir-faire qu’on lui connaît, l’Internationale associative altermondialiste s’est donc promptement et massivement mobilisée pour relayer et soutenir les actions « d’agit-prop’ » (agitation propagande, en dialecte d’ultra-gauche), des « militant·e·s pour les droits des Saami·e·s et pour le climat ». Parce que là, contrairement à ce que l’on nous explique dans nos pays tempérés, lutter pour le climat, c’est lutter contre les éoliennes. Vérité au nord du cercle polaire arctique, erreur au-delà…

La mobilisation internationale est décrétée : manifestation sous les fenêtres de Jonas Gahr Støre, le Premier ministre norvégien, et engagement de la « guest star » et voisine suédoise Greta Thunberg, pour qui « il n’y a pas d’autre solution que d’écouter les peuples autochtones, dont les droits sont violés ». Un discours aux relents nationalistes et bien peu inclusifs, mais dont l’exotisme a fait la joie de la presse de gauche. « L’industrie "verte" s’accapare les terres des Samis, dernier peuple autochtone d’Europe » (sic) dont les droits historiques remonteraient à 10.000 ans, s’égosillent les activistes de La Relève et la Peste, pour qui il urge de lutter contre ce « Grand Remplacement » polaire. Les Suisses de Voices revendiquent avoir « soutenu la demande des communautés concernées pour un démantèlement et une renaturation de la région » et relaient ardemment les revendications des « militant·e·s [samis qui] ont insisté sur le fait que la transition vers l’énergie "verte" ne devait pas se faire au détriment des droits des autochtones ». Parce qu’avec les éoliennes, « les animaux ont peur du bruit et des ombres projetées par les rotors, et de multiples routes coupent leur chemin de transhumance ».

« Colonialisme vert »

Courrier international, qui ne saurait être en reste, tend le micro à « Ellinor Guttorm Utsi, une Samie face aux vents industriels norvégiens » (sic), une héroïne qui « lutte pour préserver un mode de vie ancestral », et « refuse de sacrifier les coutumes ancestrales au nom de la transition climatique ». Ne manquait plus à l’appel qu’Amnesty International, qui s’est fendue d’une pétition intitulée « Stop aux projets industriels éoliens qui menacent les terres des Sámis en Norvège ! » et dont on serait admiratif des 25.000 signatures engrangées, si elles n’avaient été obtenues au niveau mondial…

Le texte d’accompagnement vaut son pesant de steak de renne, puisqu’il nous explique qu’en ignorant le consentement des Samis au projet éolien, le gouvernement norvégien pratiquerait un « colonialisme vert » (re-sic) et que celui-ci ferait perdurer « l'oppression historique dont ils sont victimes, sous le couvert de la transition écologique ». Quand ils « s'emparent de nos terres, ils détruisent notre culture », se désespère Ellinor, porte-parole des Samis... « Notre culture et notre langue ne peuvent survivre sans nos terres », précise-t-elle. Et pour Amnesty International, pas de doute, c’est bien là « une lutte qui reflète des enjeux à la croisée de la justice climatique, des droits des peuples autochtones et de la justice raciale ». Justice raciale ? Il fallait oser, tout de même. Mais tout est grâce, dans le camp du Bien...

Les amis de nos Samis sont nos ennemis

Nous aurions pu poursuivre longtemps l’évocation de cette impressionnante et désarmante unanimité à soutenir un peuple souhaitant protéger ses intérêts, assurer son avenir, préserver ses libertés et sauvegarder ses terres contre l’envahissement des ventilateurs verts. Engageons donc juste ici nos lecteurs à remplacer les « Samis » par les « Français » et les autochtones de ces terres polaires par les « Auvergnats », « Bretons », « Provençaux » ou autres « Vendéens. » Et rappelons-nous que chez nous, refuser les éoliennes est immédiatement assimilé à une réaction passéiste, climato-sceptique et d’extrême droite, qui ne mérite évidemment pas le soutien d’Amnesty International ni de quelques autres bonnes âmes.

Etienne Lombard

dimanche 7 décembre 2025

L’invasion barbare dans notre histoire

 

Un dix-neuvième texte de notre rubrique « Souvenez-vous de nos doctrines » est à retrouver aujourd’hui de Fustel de Coulanges…

Il semble que cet événement ait changé la face du pays et qu’il ait donné à ses destinées une direction qu’elles n’auraient pas eue sans lui. Il est pour beaucoup d’historiens, et pour la foule, la source d’où est venu tout l’Ancien Régime. Les seigneurs féodaux se sont vantés d’être les fils des conquérants ; les bourgeois et les paysans ont cru que le servage de la glèbe leur avait été imposé par l’épée d’un vainqueur.

Chacun s’est ainsi figuré une conquête originelle d’où étaient venus son bonheur ou sa souffrance, sa richesse ou sa misère, sa condition de maître ou sa condition d’esclave. Une conquête, c’est-à-dire un acte brutal, serait ainsi l’origine unique de l’ancienne société française. Tous les grands faits de notre histoire ont été appréciés et jugés au nom de cette iniquité première ; la féodalité a été présentée comme le règne des conquérants, l’affranchissement des communes comme le réveil des vaincus, et la Révolution de 1789 comme leur revanche.

Il faut d’abord reconnaître que cette manière d’envisager l’histoire de France n’est pas très ancienne ; elle ne date guère que de trois siècles. Les anciens chroniqueurs, qui étaient contemporains de l’établissement des Germains et qui l’ont vu de leurs yeux, mentionnent sans nul doute beaucoup de ravages et de violences ; mais ils ne montrent jamais une race vaincue, une population entière assujettie. Nous possédons d’innombrables écrits de ce temps-là, ils ne présentent jamais l’idée d’un peuple réduit au servage. Le Moyen Âge a beaucoup écrit : ni dans ses chroniques, ni dans ses légendes, ni dans ses romans, nous ne voyons jamais que la conquête germanique ait asservi la Gaule. On y parle sans cesse de seigneurs et de serfs ; on n’y dit jamais que les seigneurs soient les fils des conquérants étrangers, ni que les serfs soient les Gaulois vaincus. Philippe de Beaumanoir, au XIIe siècle, Commines au XVIe et beaucoup d’autres écrivains cherchent à expliquer l’origine de l’inégalité sociale et il ne leur vient pas à l’esprit que la féodalité et le servage dérivent d’une ancienne conquête. Le Moyen Âge n’eut aucune notion d’une différence ethnographique entre Francs et Gaulois. On ne trouve, durant dix siècles, rien qui ressemble à une hostilité des races.

Ni les écrits, ni les traditions de toute cette époque ne portent la trace de la douceur qu’un universel asservissement eût mise dans l’âme des vaincus.

L’opinion qui place au début de notre histoire une grande invasion, et qui partage dès lors la population française en deux races inégales, n’a commencé à poindre qu’au XVIe siècle, et a surtout pris crédit au XVIIIe. Elle est née de l’antagonisme des classes, elle a grandi avec cet antagonisme. Elle pèse encore sur notre société présente : opinion dangereuse, qui a répandu dans les esprits des idées fausses sur la manière dont se constituent les sociétés humaines et qui a aussi répandu dans les cœurs des sentiments mauvais de rancune et de vengeances. C’est la haine qui la engendrée et elle perpétue la haine.

https://www.actionfrancaise.net/2025/12/06/linvasion-barbare-dans-notre-histoire/

Écologie politique, crépuscule d’une religion sans nature

 

Je longeais la plage, comme presque chaque matin lorsque la marée et le vent s’y prêtent, entre Lechiagat et Lesconil. Un kilomètre à peine, une poignée de mouettes qui piaillent, l’odeur de goémon mouillé, et cet exercice un peu maniaque que je pratique depuis des années, compter les déchets plastiques. Les écologistes professionnels m’avaient promis un apocalypse en PVC, des rivages croulant sous les bouteilles et les sacs, des océans transformés en déchetterie flottante. Or, sur ce ruban de sable qui regarde plein sud, vers le golfe de Gascogne, je ne trouve presque rien. Trois bouchons, un fragment de caisse à poisson, parfois un vieux bidon, rarement davantage, moins de cinq déchets au kilomètre, certains jours aucun.

Je ne prétends pas faire œuvre de scientifique, encore moins nier la pollution des mers. Je constate seulement ce que mes yeux voient et que tant d’articles et de rapports semblent ignorer. Cette dissonance entre l’invocation permanente de la catastrophe et l’expérience concrète, ce décalage entre le sermon et le rivage, dit quelque chose de plus profond, la crise de l’écologie politique. Non de l’écologie au sens noble, cet art d’habiter la maison commune qu’est la nature, mais de ce petit clergé vert qui a voulu transformer une sensibilité légitime en programme de gouvernement et, plus encore, en religion de substitution. Cette tentative a échoué, spectaculairement. Hors des centres villes où pédalent des bobos à lunettes, hors des rédactions et des ONG financées par nos sous, le public décroche, les électeurs s’éloignent, les abonnés se raréfient comme peau de chagrin.

Les trois livres que viennent de publier Cécile Duflot, Yannick Jadot et Pascal Canfin ont au moins ce mérite, offrir une fenêtre sur l’ampleur de cette déroute intellectuelle. Ils se veulent diagnostics, ils sont aveux. Tous trois tentent de comprendre pourquoi l’écologie politique de gauche est rejetée, et tous trois tournent autour du pot avec une admirable constance, incapables d’envisager l’hypothèse la plus simple, ce rejet n’est pas un malentendu, c’est un jugement. Il ne suffit pas d’aimer les petits oiseaux, les rivières claires et le tri sélectif pour être aimé en retour. Encore faut il ne pas haïr la civilisation dans laquelle on vit, ni traiter comme délinquants en sursis ceux qui la maintiennent, paysans, pêcheurs, artisans, classes moyennes motorisées.

Le petit pamphlet de Cécile Duflot, significativement titré Gagnons !, est l’exemple le plus saisissant de cette impuissance à penser. Soixante douze pages vendues comme une sorte de bréviaire de la victoire future, mais que la critique, même de gauche, a reçues comme une offre de service tardive. L’ancienne ministre y renie à demi ses frondes passées, se rapproche de la gauche de gouvernement, prend ses distances avec les maximalistes et laisse entendre que, bien conseillée, elle pourrait encore servir. L’ouvrage n’intéresserait personne si ses lecteurs les plus sévères n’étaient pas eux mêmes des compagnons de route. Or ce qu’ils lui reprochent, ce n’est pas d’avoir sacrifié la France périphérique sur l’autel des normes, c’est d’avoir mal géré les symboles, de s’être trompée d’alliés, de s’être brouillée au mauvais moment.

Sur le fond, rien ne bouge. La vision est intacte, celle d’une société sommée de se convertir, de renoncer, de se réduire, le tout enveloppé d’un langage de réconciliation. On promet une transition non punitive, on finit toujours par punir les mêmes, ceux qui se chauffent au fioul, ceux qui vivent loin des métros, ceux qui prennent leur voiture pour travailler. L’échec de l’écologie politique se lit déjà là, dans cette incapacité à dire clairement qui paiera et pourquoi, dans ce refus obstiné de regarder l’éthologie réelle des sociétés humaines, leurs besoins, leurs peurs, leur attachement aux continuities.

Le livre de Yannick Jadot, Climat, la drôle de guerre, prétend aller plus loin. L’ancien candidat à la présidentielle raconte sa peur, il confesse le grand renoncement, il fustige le ton moralisateur de ses amis, il s’inquiète du « backlash » contre l’écologie, il s’alarme d’une France caniculaire qui voterait massivement pour l’extrême droite. Un peu comme ces généraux de 1914 qui, découvrant les mitrailleuses ennemies, réclamaient davantage de panache au lieu de revoir leurs plans de bataille. L’ouvrage a été accueilli par une salve de critiques, souvent issues de son propre camp, qui lui reprochent tantôt son ralliement implicite au centre, tantôt son alarmisme stérile, tantôt sa prose indigeste.

J’y vois pour ma part autre chose, une forme de fatigue civilisationnelle. Jadot diagnostique correctement quelques symptômes, la lassitude des classes populaires face à la culpabilisation permanente, le fossé entre militants urbains et ruraux, la dérive vers le slogan. Cependant il ne tire pas la conclusion qui s’impose, si son discours ne passe pas, ce n’est pas seulement qu’il serait mal empaqueté, c’est qu’il heurte de plein fouet des instincts biologiques et sociaux. On peut demander à un peuple des efforts, on ne peut pas lui demander de se sacrifier unilatéralement pour une cause abstraite, tandis que l’on ouvre sans limites ses frontières, que l’on renonce à toute maîtrise démographique, que l’on nie jusqu’à l’existence des peuples comme formes vivantes. On lui explique qu’il faut consommer moins de viande, mais jamais moins de béton, moins de routes, moins de flux migratoires. L’écologie politique refuse obstinément de voir l’homme comme un animal territorial, attaché à un milieu, à des formes de vie, à une continuité historique.

Le troisième opus, Gagner le combat du Pacte vert, de Pascal Canfin, pousse jusqu’à la caricature cette déconnexion du réel. On y trouve tous les ingrédients de la technocratie bruxelloise, coulisses de négociations, acronymes, pactes, deals, graphiques implicites, le tout cuisiné dans une rhétorique de révolution verte. L’ancien ministre s’y présente comme l’architecte d’une Europe qui sauverait le climat tout en augmentant la compétitivité. Les critiques soulignent le caractère indigeste du récit, sa tendance à tronquer les citations, son absence de chair. Au delà des maladresses littéraires, c’est l’imaginaire même qui frappe. Le vivant disparaît derrière les normes, la mer derrière les règlements sur les rejets, les campagnes derrière les tableaux Excel sur les émissions agricoles. Les paysans deviennent des variables d’ajustement, les peuples du Sud des élèves récalcitrants qu’il faut convaincre, tout au plus dédommager.

Oswald Spengler, que la Nouvelle droite française a sorti de l’oubli, avait déjà pressenti ce moment où les grandes constructions intellectuelles, épuisées, se détachent de la vie et se mettent à tourner à vide. L’écologie politique de gauche en est là, à sa phase crépusculaire. Elle parle toujours de nature, alors qu’elle ne connaît plus que le droit, la communication, les alliances électorales. Elle invoque sans cesse le vivant, mais elle le nie partout, dans les corps, dans les sexes, dans les peuples. Elle recouvre le réel d’un filet de concepts, « racisé », « inclusif », « décolonial », qui finit par étouffer ce qu’elle prétend protéger.

Au Guilvinec, les marins ne lisent ni Duflot, ni Jadot, ni Canfin. Ils se lèvent à des heures où les sénateurs dorment encore, ils regardent le ciel, la houle, les courants, ils savent où se tiennent les poissons et ce que deviennent les quotas. Leur écologie est d’abord une pratique, une prudence, un art de durer. Ils ne supportent déjà plus qu’on les désigne comme des prédateurs du vivant, eux qui ont appris à en respecter les cycles. Les agriculteurs des terres intérieures vivent la même chose, sommés d’entrer dans une transition pilotée depuis des bureaux, culpabilisés par des urbains qui n’ont jamais tenu une pelle ni soigné un veau.

Les trois livres dont il est question ici, sous des formes différentes, témoignent d’un même malentendu, la conviction qu’il suffirait de corriger le message, d’adoucir la punition, de mieux vendre le Pacte vert pour que le peuple suive enfin. Or la crise est ailleurs, elle est anthropologique. L’écologie politique s’est construite contre la civilisation européenne, contre son histoire, contre ses rythmes, contre ses enracinements, non avec eux. Elle a voulu substituer à l’amour concret des lieux une culpabilité généralisée, à la fidélité à un pays un sentiment d’appartenance abstrait à l’humanité, à la mesure paysanne des choses une comptabilité carbone aussi sophistiquée qu’inintelligible.

Je le vois sur cette plage qui me sert de laboratoire à ciel ouvert. Ce qui fait la beauté de ce bout de côte, ce n’est pas son absence de déchets, c’est la forme du rivage, la lumière qui change, le silence qui n’est jamais tout à fait silencieux. L’écologie véritable commence là, dans ce consentement au réel, dans l’acceptation des limites naturelles, dans le respect des cycles, et aussi dans la reconnaissance lucide de ce que nous sommes, une espèce animale, douée de raisons certes, mais prise dans des lois de reproduction, de territoire, de compétition. Une politique écologique qui nie ces données, qui refuse de penser la démographie, l’urbanisation, les flux humains, ne se préoccupe pas du vivant, elle gère un récit.

C’est ici que se joue la différence entre une écologie de gauche, telle qu’elle s’exprime dans ces trois volumes, et une écologie enracinée dans le vivant. La première veut refaire l’homme, l’arracher à son appartenance, le réduire à un consommateur rééduqué, solvable, contrôlé. La seconde commence par regarder comment les sociétés fonctionnent réellement, comment les familles se constituent, comment les métiers s’inscrivent dans des paysages, comment les peuples défendent leurs frontières, matérielles et symboliques. Non pour sanctifier l’existant, mais pour ne pas prétendre reconstruire la maison en ignorant son plan.

Les Duflot, Jadot, Canfin ne comprennent pas pourquoi leurs campagnes patinent. Ils déplorent la montée d’un vote qu’ils abominent, ils accusent les médias, la fatigue, les réseaux sociaux. Ils ne voient pas qu’en voulant faire de l’écologie un vecteur de transformation totale de la société, ils l’ont détachée de ce qui la rendait aimable. L’amour des oiseaux, des rivières, des haies, des paysages, ne conduit pas naturellement à l’adoration d’un Pacte vert écrit à Bruxelles ni à l’acceptation joyeuse de taxes et de normes tombant d’en haut. Il conduit plutôt à protéger ce qui est à portée de main, ce qui nourrit, ce qui enchante, ce qui relie.

L’écologie politique telle qu’ils la promeuvent est inutile parce qu’elle est désincarnée, elle se situe dans un au delà du vivant, dans une morale abstraite, dans une liturgie de rapports et de COP. L’écologie authentique, celle qui pourrait réconcilier les peuples européens avec leur milieu, se situera ailleurs, au croisement de la biologie, de l’éthologie, de la mémoire des lieux et des métiers. Elle ne parlera plus de rééduquer les hommes, elle parlera de les réaccorder à la réalité. Elle sera moins bruyante, moins moralisatrice, moins bavarde, et beaucoup plus attentive. Elle comptera les plastiques sur la plage, certes, mais aussi les enfants dans les écoles, les exploitations qui ferment, les ports qui se vident, les oiseaux qui disparaissent ou reviennent.

En attendant, les pamphlets verts se succèdent, comme ces vagues trop petites qui meurent avant d’atteindre le pied de la dune. Ils roulent leurs phrases, ils invoquent le climat, ils promettent la révolution et ne produisent que de la lassitude. Pendant ce temps, le vent tourne, au sens propre comme au figuré. Les peuples, qu’on croyait acquis à cette religion douce, commencent à se souvenir confusément qu’ils sont des formes de vie parmi d’autres, et non des variables dans un modèle. Le jour où l’écologie se remettra au service du vivant, et non au service d’idéologies hors sol, alors peut être la plage, la forêt, le bocage redeviendront des maîtres plus crédibles que les tribunes et les plateaux télé.

Balbino Katz
Chroniqueur des vents et des marées
balbino.katz@pm.me.

Illustration : DR
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.

Breizh-info.com, 2025, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

https://www.breizh-info.com/2025/12/07/254496/ecologie-politique-crepuscule-dune-religion-sans-nature/

mardi 2 décembre 2025

Environnement Éolien en Mer : une étude révèle qu’il réchauffe la surface des océans

 

Alors que les parcs éoliens offshore se multiplient au large des côtes américaines et européennes, une étude publiée dans la revue Science Advances alerte sur un effet secondaire inattendu : le réchauffement de la surface des océans à proximité de ces installations, et ses rétroactions sur l’atmosphère.

Réalisée par une équipe de chercheurs issus de plusieurs institutions américaines, cette étude s’est penchée sur les interactions complexes entre les grands parcs éoliens en mer et l’environnement océanique. En utilisant des modélisations couplées atmosphère-océan, les scientifiques ont mis en évidence une élévation de la température de surface de l’eau pouvant atteindre 0,4°C sous certaines conditions, en lien direct avec la présence des éoliennes.

Moins de vent, plus de chaleur

Les turbines des parcs éoliens ralentissent naturellement la vitesse du vent en extrayant son énergie. Ce ralentissement, constaté à la fois à 10 mètres et à hauteur de moyeu (138 m), s’accompagne d’un affaiblissement du mélange vertical dans l’océan, réduisant la profondeur de la couche de surface (mixed layer). Résultat : la chaleur solaire s’accumule plus facilement en surface, provoquant une stratification accrue et une élévation des températures marines.

Ce phénomène a été observé principalement durant l’été, période marquée par une faible turbulence de fond et une stratification déjà naturelle des couches océaniques. L’étude s’est concentrée sur la côte est des États-Unis, notamment au large du Massachusetts, du Rhode Island et du New Jersey, zones déjà largement investies par l’industrie éolienne offshore.

Une rétroaction climatique locale

Ce réchauffement marin a un effet de retour sur l’atmosphère, appelé feedback océan-atmosphère. La surface de l’océan, plus chaude que l’air ambiant, libère davantage de chaleur dans l’atmosphère, modifiant la stabilité de la couche limite atmosphérique. En clair, cela favorise une instabilité locale, renforçant les échanges verticaux dans l’air, ce qui peut, paradoxalement, contribuer à atténuer légèrement la perte de vent induite par les turbines.

Mais ces effets restent confinés aux basses altitudes. L’étude précise que cette instabilité atmosphérique, bien qu’observable, n’a pas d’impact significatif sur les vitesses de vent à hauteur des rotors et donc sur la production énergétique globale. Les pertes de rendement induites par l’effet océanique sont estimées à moins de 0,3 %.

Un signal non négligeable

Si 0,3 à 0,4°C peuvent sembler peu, les auteurs soulignent que ce signal représente jusqu’à 60 % de la variabilité interannuelle naturelle des températures de surface dans cette zone. En d’autres termes, l’effet des éoliennes sur le climat marin est loin d’être anecdotique à l’échelle régionale, surtout dans des zones déjà fragilisées par le réchauffement global et l’évolution des courants.

Les conséquences écologiques potentielles sont multiples : perturbation de la stratification saisonnière, impact sur les remontées d’eau froide riches en nutriments, altération des habitats de certaines espèces marines, et effets possibles sur la pêche.

L’étude conclut que ces résultats justifient une meilleure intégration des modèles océan-atmosphère couplés dans l’évaluation environnementale des projets éoliens offshore. Jusqu’ici, la majorité des analyses se focalisait sur les flux atmosphériques seuls, sans prendre en compte la réponse dynamique de l’océan.

Dans un contexte où la planification énergétique se fait à l’échelle de décennies, ces travaux plaident pour une approche plus holistique de l’impact environnemental des énergies dites renouvelables.

Les élus bretons qui cherchent à implanter de l’éolien en mer absolument partout, au détriment de tout bon sens, liront ils cette étude ?

Illustration : DR
[cc] Article relu et corrigé (orthographe, syntaxe) par ChatGPT.
Breizh-info.com, 2025, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

lundi 1 décembre 2025

Raphaël Ayma : « L’écologie ne se résume pas au réchauffement climatique ! »

 

Raphaël Ayma : « L’écologie ne se résume pas au réchauffement climatique ! »

Le Forum de la Dissidence organisé par Polémia et dédié à l’alarmisme climatique s’est tenu à Paris ce samedi 15 novembre 2025. Découvrez l’intervention de Raphaël Ayma, figure de la jeunesse militante de droite, qui a évoqué le rapport de la jeunesse engagée à l’écologie. Entre réalité du réchauffement climatique et monopole de la gauche sur la question écologique, un discours très intéressant sur les enjeux militants d’aujourd’hui et de demain.
Polémia

Moi, je vais avoir un peu le mauvais rôle dans ce colloque, parce que je dois vous avouer que je suis effectivement de la génération climat et que je suis plutôt quelqu’un qui souscrit au constat de la pensée écologiste, et même engagé en faveur de l’écologie. Mais vous allez voir, cette conférence va avoir deux objectifs. Le premier, c’est de vous parler du rapport de ma génération avec l’écologie, parce qu’on ne peut pas, selon moi, se contenter de dénoncer une partie de l’alarmisme climatique, qui a un fond réel, sans comprendre quelles sont les motivations de ma génération et pourquoi cela a autant pris dans ma génération. Le deuxième point que je vais aborder, c’est le rapport que, selon moi humblement, la droite politique doit avoir avec l’écologie.

Il se trouve que, comme vous disait Floriane, je suis militant identitaire dans une structure activiste qui s’appelle Tenesoun, en Provence. C’est l’un de ces nombreux groupes militants qui parsèment le pays, où en général on est engagé surtout sur les questions d’identité, d’immigration, d’opposition au grand remplacement. Mais il se trouve qu’on a une particularité, et c’est pour cela que je vous parle aujourd’hui : mes premières médiatisations, les premières fois où j’ai été contacté par des journalistes en tant que porte-parole de cette structure, ont concerné l’écologie, pour une raison assez amusante. Tenesoun est un mouvement qui possède des locaux politiques, des sièges, une sorte de local-bar, un en Provence, un autre dans le Vaucluse, mais aussi deux potagers. Cela peut sembler curieux pour une structure politique, mais nous avons ces potagers parce que nous sommes dans une logique de circuits courts et de localisme. Ces potagers intriguent les journalistes, qui se demandent : « Que font ces fachos à faire de la permaculture ? »

Ces potagers nous servent notamment à alimenter notre local, qui possède une cuisine. Les fruits et légumes qui y poussent sont ensuite utilisés dans la cuisine du local.

Je vais commencer par une incise personnelle pour vous raconter comment j’ai vécu la vague climat. J’ai 23 ans, et lorsque les marches pour le climat débutent — ces grandes mobilisations qui ont lieu en 2018-2019, c’est-à-dire à peu près à la période des gilets jaunes — je suis au lycée en Provence. Je vais prendre cela de plein fouet, comme tous les gens nés en 2002. Je vais voir mon lycée bloqué plusieurs jours, avec des manifestations où les jeunes participent à l’appel de Greta Thunberg et à celui d’une tribune écologiste signée par des personnalités diverses, de Kassovitz à Carla Bruni, qui avaient alerté après un rapport du GIEC annonçant une hausse des températures.

Il est important de comprendre que, pour ma génération, ces marches pour le climat ont été un rituel d’initiation politique. Au lycée, je vois mes camarades se mobiliser pour le climat, alors même qu’il y a une mobilisation sociale importante avec les gilets jaunes. Je vais avouer qu’à cette époque, je ne comprends pas trop ce phénomène. Je viens d’un village rural, et chaque fois que je prenais le bus pour rentrer chez moi, ce n’était pas l’engagement écologiste que je voyais, mais le combat social de la France périphérique, les gilets jaunes sur les ronds-points. Quand je vois cette jeunesse d’Aix-en-Provence se mobiliser massivement, je me dis que ce sont des enfants de bourgeois qui ignorent totalement les gilets jaunes, mais s’engagent pour le climat. Avec le recul, j’ai pu analyser que c’était un phénomène profond dans ma génération.

Je vais vous donner quelques chiffres pour que vous mesuriez la prégnance de la question écologiste dans ma génération. Ipsos établit dans un sondage que plus de 79 % des moins de 25 ans se disent préoccupés par le changement climatique. Ce n’est pas négligeable. Si l’on regarde les clivages de classe ou de diplôme, il n’y a qu’une différence minime : les jeunes diplômés bac +3 sont préoccupés à 91 %, et les jeunes ayant un niveau inférieur au bac à 70 %. Dans les deux cas, plus des deux tiers des jeunes ressentent cette préoccupation. Ce sentiment écologiste a un terme que l’on a beaucoup entendu dans les médias, et que l’on a tendance à dénoncer à droite : l’écoanxiété. Au lever de main, presque tout le monde connaît ce terme.

Les écologistes se sont appuyés sur ce sentiment, parfois pour des raisons légitimes, pour forger une sorte de sentiment générationnel, expliquant que ma génération adopterait certains comportements sociaux en réaction à cette anxiété écologique. L’exemple le plus connu — évoqué dans les conférences précédentes — est le non-désir d’avoir des enfants, qui est, je crois, l’une des conséquences politiques les plus graves, et l’un des exemples de pourquoi il faut proposer une écologie de droite. Si la gauche s’en charge, on se retrouve avec des mesures antivie. Je vous citerai Salomé Saqué, qui avait expliqué qu’il fallait banaliser le sentiment de ne pas vouloir d’enfant. On a vu aussi des tribunes dans Le Point allant dans ce sens. Il y avait une vidéo très connue dans ma génération, publiée par Konbini, où une femme témoignait : elle voulait vivre sans enfant et était allée jusqu’à la stérilisation volontaire, parce qu’à ses yeux avoir un enfant représentait une charge carbone, une attaque contre la planète.

Ce sentiment d’écoanxiété n’est pas négligeable politiquement, puisqu’il a des conséquences concrètes dans la vie des gens. La question est de savoir comment prendre ce sentiment et l’orienter politiquement. Je crois qu’on ne peut pas simplement opposer à ma génération — sincèrement engagée dans l’écologie — une démarche climato-sceptique, si vous me permettez le terme.

Comme je vous le disais, je viens de Provence, dans le sud-est de la France. Il y fait plus chaud et plus beau qu’à Paris. Et en Provence, la prise de conscience écologique est très concrète, loin de l’image d’une préoccupation de bourgeois des centres-villes. Je vais vous donner deux exemples, l’un personnel, l’autre politique, avec des conséquences directes.

Le premier exemple : un ami viticulteur. Pour ceux qui travaillent dans le vin, vous savez peut-être que les vendanges se font de plus en plus tard. Dans mon village, dans un petit village qui s’appelle Pourrières, spécialisé dans le vin — on y fait du rosé, si l’on considère que c’est du vin — les viticulteurs sont intimement écologistes. Ils ne le sont pas comme Europe Écologie – Les Verts, ni comme les bobos de centre-ville, mais ils réclament des mesures politiques sur l’écologie.

Deuxième exemple : les syndicats de riziculteurs en Camargue. La Camargue est au niveau de la mer. Or, les Saintes-Maries-de-la-Mer perdent environ un mètre de plage par an. C’est visible, la mairie en témoigne, les habitants aussi. La montée de l’eau, plus salée, asphyxie les cultures et tue les rizières. Les riziculteurs ont interpellé les autorités publiques à ce sujet.

Avez-vous déjà entendu parler d’André Siegfried et de la théorie des sols ? C’est une intuition que j’ai sur la question écologique. André Siegfried, auteur du XIXᵉ siècle, est un précurseur de la sociologie électorale, qui a inspiré Jérôme Fourquet. Siegfried a écrit un tableau politique sous la IIIᵉ République, analysant le vote en Vendée selon la nature du sol : granit au nord, calcaire au sud.

Le granit, avec ses bocages, favorise la dispersion de l’habitat, la ruralité, la grande propriété foncière, les corps intermédiaires : l’Église, les notables, les nobles. Cela incline à voter à droite : “le granit produit le curé”. Le calcaire, qui favorise des habitats plus resserrés, plus urbains, incline à voter à gauche : “le calcaire produit l’instituteur”.

C’est intéressant, parce que cela montre que la géologie, l’environnement, conditionnent les modes de vie et donc les comportements électoraux. Faire l’impasse sur un changement écologique, c’est se condamner à ne pas pouvoir prévoir les changements possibles de comportements politiques.

Nous parlions tout à l’heure de l’écoanxiété. J’aimerais vous proposer une perspective : il est intéressant de comparer les questionnements identitaires que l’on peut avoir sur d’autres sujets — immigration, grand remplacement — avec l’écoanxiété. Je crois que ces deux sentiments évoluent sur un même plan sentimental et psychologique. Cette peur d’une fin de quelque chose d’existant rappelle notre propre inquiétude quant à une possible disparition de notre peuple.

Ces deux sentiments peuvent être définis par une notion intéressante : la solastalgie. La solastalgie, selon la définition donnée par Glenn Albrecht, philosophe australien, est une forme de souffrance ou de détresse psychique ou existentielle causée par des changements environnementaux et sociaux passés. Il avait d’abord utilisé ce concept pour évoquer les populations indigènes aborigènes qui, en Amazonie ou en Tasmanie, voyaient disparaître leurs forêts, leurs terres. Des militants écologistes ont ensuite récupéré cette notion pour la mettre sur le même plan que l’écoanxiété.

Je crois que l’on ne doit pas demander à ma génération de choisir entre le combat contre le réchauffement et le combat identitaire. Ma génération ressent à la fois l’inquiétude écologique et l’inquiétude identitaire. Il faut donc proposer une solution politique à ces deux préoccupations.

J’en viens à parler un peu de la gauche. Vous savez que la gauche adore étudier ce que nous faisons. Ils ont des journalistes qui passent leur temps à cela, des universitaires qui cherchent à définir les contours de notre pensée. Certains écrivent sur ce qu’ils appellent l’écofascisme : pour eux, dès que la droite parle d’écologie, c’est de l’écofascisme. Ils identifient trois rapports possibles de la droite à l’écologie.

Le premier serait un rapport climatosceptique : utiliser la question écologique pour s’opposer à l’idée de réchauffement, ou en tout cas analyser scientifiquement pour refuser le discours écologiste ambiant. Le deuxième serait une approche décroissante, qu’on retrouve plutôt chez Alain de Benoist et d’autres racines philosophiques : évoquer l’écologie pour proposer la décroissance. Le troisième, plus marginal, est la solution techno-enthousiaste : croire que la technique réglera les problèmes, qu’il suffit d’attendre les progrès technologiques et qu’il n’y a donc pas lieu d’agir immédiatement.

La gauche met le doigt sur quelque chose : il n’y a pas de quatrième voie dans leur schéma. Or je crois que parler d’écologie n’implique pas, pour la droite, d’accepter le matraquage médiatique et le chantage idéologique qu’on lui oppose. Quand on demande à la jeunesse d’arrêter de faire des enfants, quand on demande au « prolo blanc » de jeter sa voiture diesel et de ne plus entrer en centre-ville, quand on culpabilise les Européens — qui ne sont pas les plus grands émetteurs de carbone comparés à la Chine ou aux États-Unis — de produire moins, de se désindustrialiser, on utilise un levier idéologique pour culpabiliser. Là, oui, on peut parler d’alarmisme climatique.

Mais cela ne nous dispense pas d’avoir une véritable proposition politique en matière d’écologie. D’abord parce que l’écologie ne se résume pas, même selon les experts, à la question du réchauffement. Aujourd’hui, il y a effectivement une hausse des températures globales à laquelle je souscris. Mais il y a surtout — et c’est l’éléphant au milieu de la pièce — la question de la pollution, sous toutes ses formes.

On parle souvent de natalité à droite, en chargeant le féminisme ou l’alarmisme climatique, en expliquant que Mai 68 aurait découragé les Européens de faire des enfants. Mais on évoque beaucoup moins les raisons structurelles de la dénatalité. Or l’une d’elles vient directement de nos modes de consommation : microplastiques, PFAS, perturbateurs endocriniens, polluants internes présents dans notre nourriture, notre eau, qui stérilisent structurellement les Européens et les Occidentaux. Ce n’est pas un fantasme. Et il y a des solutions politiques à proposer : alternatives dans la consommation, réglementation, interdictions ciblées, etc.

Il y a également une pollution moins visible mais tout aussi décisive : la bétonisation. On a évoqué les épisodes de sécheresse et de canicule dans le Sud. Nous avons, là-bas, des problèmes concrets de résilience en eau. À Aix-en-Provence, ville des mille fontaines, les fontaines sont coupées jusqu’en novembre à cause des sécheresses. En Corse, certaines communes tombent en panne d’eau avec l’arrivée des touristes et doivent expérimenter la réutilisation des eaux usées. La désalinisation, quant à elle, pollue davantage : pour un litre d’eau potable, cinq litres de déchets. Des hydrogéologues en Corse travaillent sérieusement sur ces questions.

La bétonisation empêche l’irrigation des sols. Aix-en-Provence, encore une fois, est beaucoup trop bétonnée. C’est une ville très vulnérable aux épisodes de chaleur et de sécheresse. Toutes ces questions sont des racines sur lesquelles on doit construire un programme écologiste de droite. L’écologie de droite, contrairement à celle de gauche, doit se fonder sur le concret et le réel de la vie quotidienne.

La gauche n’aborde jamais la question de l’amélioration de la qualité de vie, trop focalisée sur un discours catastrophiste abstrait. Je crois que notre famille politique a la vocation, en raison de sa vision de l’homme, à proposer des initiatives qui améliorent la qualité de vie et de consommation. Et politiquement, ce serait plus efficace que ce que propose la gauche.

Pour aller plus loin, je crois que nous avons un enjeu majeur : une très mauvaise intégration des profils scientifiques à droite. L’écologie est un domaine où l’on peut faire appel à des architectes, des urbanistes, des géologues, des environnementalistes, et plus largement à des personnes ayant des formations scientifiques, qu’il faut évidemment cadrer philosophiquement. Mais à droite, ces profils sont peu intégrés. C’est un trait récurrent : nous avons beaucoup de juristes et d’historiens, mais nous perdons les ingénieurs, les géologues, les spécialistes des sciences du vivant.

J’aimerais conclure cette conférence, avant de laisser place aux questions, par un appel : si, dans cette pièce, certains d’entre vous ont une sensibilité écologiste et souhaitent participer à la conception d’un programme écologiste de droite, et si vous avez des formations ou des compétences scientifiques — en architecture, en urbanisme, en ingénierie, en hydrologie, en biologie, que sais-je — venez me voir à la fin. L’écologie est le domaine de tous les possibles, et surtout celui de la réinvention du monde. Abandonner cette puissance politique, ce mythe de la réinvention du monde, et le laisser à la gauche serait dramatique. Il y a urgence à fournir à la droite, dans les canaux militants comme institutionnels, les outils pour affronter la gauche sur un terrain où elle semble aujourd’hui légitime.

Un participant pose alors une question scientifique. Il explique que les organismes de recherche, en France, sont verrouillés par la gauche, tout comme le journalisme. S’il n’y a pas de chercheurs de droite, dit-il, c’est parce que les institutions ne les acceptent pas.

Je n’ai aucune intention de nier le monopole de la gauche sur les universités. Le microcosme universitaire impose effectivement un plafond de verre : il est presque impossible d’y progresser si l’on a des opinions identitaires, nationalistes ou patriotes. On se heurte inévitablement à la marginalisation. Mais quand j’évoquais les scientifiques, je pensais surtout à « l’esprit scientifique », en opposition à l’esprit littéraire. Certains ont les deux ; ce n’est pas mon cas, je suis plus littéraire que scientifique. Mais il y a selon moi un déficit d’intégration de ces esprits scientifiques dans notre camp. Peut-être ont-ils aussi tendance à moins s’intéresser à la vie civique et aux affaires du monde, mais peut-être aussi que nous ne leur offrons pas la place qu’ils méritent.

Dans mon expérience militante, je connais pourtant de jeunes identitaires qui « virent au vert », comme dit l’article, et qui ont des formations scientifiques : géologues, mathématiciens, physiciens. Ils partagent nos opinions et sont prêts à aider. C’est un problème récurrent : à droite, nous avons souvent une approche philosophique des sujets, mais moins de compétences techniques pour formuler des programmes concrets. En économie, par exemple, nous produisons des conférences de philosophie économique, mais très peu d’analyse économique concrète. C’est similaire en écologie : nous avons des slogans, des arguments théoriques expliquant que l’écologie serait intrinsèquement de droite, mais nous avons du mal à concevoir des programmes. Cela se traduit même chez les mouvements institutionnels.

Le Rassemblement national, par exemple, avait promis un livret sur l’écologie, dirigé par Hervé Juvin et Andréa Kotarac, via leur microparti interne « Les Localistes ». Ce livret n’a jamais vu le jour, pas plus que celui sur l’économie. L’écologie implique parfois de prendre des décisions électoralement impopulaires. La santé des gens est un enjeu d’intérêt général. Quand le RN vote sur les PFAS ou le téflon, et suit les consignes de certains lobbies agricoles, cela se fait parfois au détriment de l’intérêt général pour des raisons électoralistes ou clientélistes. L’écologie impose parfois des décisions impopulaires — c’est un fait.

Un participant pose ensuite une autre question, en expliquant que le catastrophisme touche d’autres domaines, notamment l’usage excessif des outils numériques, qui abîme le cerveau. Selon lui, les IRM montrent l’évolution des structures cérébrales. Il évoque aussi un autre problème : la représentation politique. Il demande si le regard électoraliste n’est pas complètement archaïque. Son intervention exprime l’idée que nous serions dans une impasse et qu’il faut reconstruire un imaginaire et une organisation, fondés sur l’action des jeunes, une conscience planétaire et des initiatives locales dont la jeunesse serait le moteur principal.

Je réponds que je n’ai pas abordé ce point dans la conférence parce qu’il me semblait évident : l’écologisme tel qu’il est présenté aujourd’hui est un mondialisme vert. Il y a un défaut d’analyse qui consiste à dire que puisque le problème est global, la solution doit l’être également. Cela peut mener à des décisions globales, certains évoqueraient même une forme de dictature planétaire. Je prends l’inverse : les identitaires, les nationalistes et les patriotes sont les plus légitimes à parler d’écologie, car s’il existe un enjeu fondamentalement local — et même anti-mondialiste — c’est bien l’écologie. Le localisme est une doctrine que nous devons défendre. Il faut produire en France, produire en Europe. Consommer des produits venus de Chine est une aberration écologique.

Vous évoquez l’imaginaire. C’est effectivement un point crucial. L’écologie tire sa force de sa capacité à proposer un imaginaire. C’est pourquoi elle a tant de succès dans la jeunesse. La gauche a le monopole de la réinvention du monde. Quand elle parle d’écologie, elle convoque des images de cités vertes, d’aménagements nouveaux, d’immeubles recouverts de végétation. Elle explique que dans le monde écologiste de demain, la vie sera belle. Nous, nous avons peu de choses à opposer, et parfois nos positions anti-écologistes nous font ressembler à des figures passéistes défendant les dernières industries à charbon. C’est une défaite idéologique d’avoir perdu l’horizon de la réinvention du monde.

La lutte n’est donc pas seulement programmatique. Elle consiste moins à démontrer que la gauche se trompe qu’à construire un imaginaire écologiste de droite. On peut évoquer, par exemple, la vision archéo-futuriste de Guillaume Faye, qui propose une écologie non décroissante, conciliant tradition identitaire et modernité technique. Cela permettrait de rénover et d’avancer sans tomber dans l’ascétisme décroissant.

Vous évoquiez l’électoralisme : les partis politiques seront toujours menottés par des calculs électoraux. Peut-être qu’une véritable refondation écologique à droite ne viendra pas des partis, mais de mouvements sans ambitions électorales : des think tanks, des associations comme Academia Christiana, des mouvements identitaires comme Tenesoun. D’ailleurs, je serais bien en peine de citer aujourd’hui un seul militant identitaire qui se dirait clairement climatosceptique.

Un autre intervenant prend la parole. Il dit avoir apprécié le point de vue du jeune intervenant et propose un commentaire de bon sens : selon lui, l’écologie est profondément, par nature, une idée de droite. C’est une aberration que la gauche s’en soit emparée. Il reconnaît des exagérations dans le discours climatique, mais insiste sur d’autres problèmes très réels : l’épuisement de l’énergie et des matières premières, qui entraînera des conséquences majeures pour notre avenir économique et social ; la disparition des espèces, qui n’est pas un fantasme. Il conclut que le discours écologiste est profondément vrai et justifié, et qu’il est de droite.

Je réponds que la disparition des espèces, et plus largement la perturbation des écosystèmes, a des conséquences graves. On perd toujours les batailles qu’on ne livre pas. Si nous avons perdu l’écologie, alors qu’elle pourrait être philosophiquement de droite, c’est parce que nous n’avons pas livré la bataille. Aujourd’hui encore, nous ne la livrons pas. Les trois rapports identifiés par la gauche — décroissantisme, climatoscepticisme ou techno-enthousiasme — sont insuffisants. La décroissance n’est pas un programme mais une réalité qui s’imposera mécaniquement avec l’épuisement des ressources. L’opposition systématique au discours écologiste ne parle pas à la jeunesse. Le techno-enthousiasme est une illusion qui nous dispense d’agir.

Vous évoquiez aussi la pollution numérique, les effets du tout-écran sur le cerveau, le rythme de vie, la qualité de vie : ce sont des sujets concrets. Je reviens à cette notion de qualité de vie : une écologie de droite doit être centrée sur cela. Concernant l’extinction des espèces, on peut rappeler qu’il n’y a pas que l’immigration humaine : il y a aussi les espèces invasives, comme les frelons asiatiques, qui posent de graves problèmes. On peut être identitaire pour nos propres espèces européennes. Dans ma première interview sur l’écologie, j’avais d’ailleurs répondu au journaliste que mon combat consistait à sauver à la fois les Européens et les pandas.

Raphaël Ayma
Intervention lors du Forum de la Dissidence du 15 novembre 2025 – Publiée sur notre site le 01/12/2025

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