par Boris Egorov
Cela a été l’un des conflits politico-militaires les plus violents et meurtriers de l’histoire de l’humanité. Les combats, les répressions et la terreur, la famine et les épidémies ont emporté jusqu’à dix-sept millions de personnes.
En mars 1917, la monarchie en Russie a été renversée en faveur d’une forme de gouvernement républicain. Pourtant, cela n’a fait qu’empirer les problèmes sociaux, politiques et économiques cumulés dans un pays affaibli par sa participation à la Première Guerre mondiale.
En novembre de la même année, la Russie a subi une deuxième révolution, à l’issue de laquelle le pouvoir est passé aux bolcheviks. Cependant, la majorité de la population ne partageait pas les points de vue de ces socialistes fanatiques. C’est pourquoi le début de la guerre civile est lié au 7 novembre 1917 – le jour du coup d’État bolchévique dans la capitale de l’époque – Petrograd (Saint-Pétersbourg).
En voulant sortir à tout prix la Russie de la Première Guerre mondiale, le gouvernement de Lénine a signé le traité de Brest-Litovsk le 3 mars 1918 avec les Allemands. Selon ses rudes clauses, le pays a perdu la Pologne, l’Ukraine et les pays baltes. La dénommée « paix infâme » a été un choc pour la société russe et a drastiquement fait augmenter le nombre d’opposants aux soviétiques, refusant de céder des territoires à l’ennemi.
Ainsi, à partir de l’été 1918, la guerre civile n’a fait que s’intensifier sur tout l’énorme territoire russe. À part les bolcheviks et leurs opposants politiques directs, de nombreux éléments anarchistes s’y sont joints, des armées rebelles, des États « indépendants » apparus aux extrémités de l’Empire détruit, ainsi que des puissances occidentales qui voulaient tirer un profit maximal de la situation.
L’apogée du conflit a eu lieu en 1919, lorsque les combats les plus importants ont eu lieu aux abords de Moscou et de Petrograd. La fin de cette sanglante guerre est attribuée à l’année 1922, lorsque le pouvoir soviétique a été instauré en Extrême-Orient russe.
Par conséquent, le socialisme l’a largement emporté en Russie, ce qui a eu un impact colossal sur toute l’histoire du XXe siècle.
Dans notre article vous allez savoir qui a combattu pendant cette guerre et pourquoi, qui étaient les « Rouges », les « Blancs » et les « Verts », quel rôle ont joué les interventionnistes, et pourquoi, enfin, les bolcheviks sont sortis vainqueurs de cette lutte acharnée.
Qui sont les « Rouges » ?
Les sympathisants de Vladimir Lénine et du Parti bolchévique étaient dans le camp des « Rouges ». La vive couleur du sang est devenue symbole de la lutte révolutionnaire, du mouvement de la gauche, du socialisme et du communisme.
D’abord, les membres volontaires de la Garde rouge sont devenus le support armé du nouveau gouvernement. À la fin de janvier 1918, l’Armée rouge des ouvriers et paysans s’est formée. Malgré son nom, elle comptait aussi des représentants de différentes classes sociales russes, qui partageaient les idéaux révolutionnaires.
Ainsi, un nombre important d’officiers du tsar ont rejoint l’Armée rouge où ils étaient appelés « spécialistes militaires ». Le premier chef suprême des forces armées de la Russie soviétique a été un ancien colonel de l’armée de l’empereur, Jukums Vācietis.
Un grand soutien aux bolcheviks durant la guerre a été accordé par de nombreuses unités de partisans, agissant dans le dos de l’ennemi. Ils étaient autant établis par les organes locaux du Parti que spontanément créés par l’initiative de la population.
Qui sont les « Blancs » ?
Les adversaires des « Rouges » durant la guerre civile étaient les « Blancs » (pendant la révolution française, cette couleur était également assignée aux opposants). Selon les bolcheviks, ils combattaient pour « le pouvoir du tsar, des propriétaires fonciers et des capitalistes ».
Cependant, tous les « Blancs » n’étaient pas dévoués au monarchisme. Le mépris des idées bolchéviques a uni des adeptes de tous partis et bords politiques.
En prenant compte du caractère spécifique de la guerre civile, il est compliqué d’établir une ligne de front nette. Néanmoins, il existait certaines régions du pays qui ont été contrôlées par différentes parties du conflit durant presque toute la guerre.
Ainsi, les régions de l’Ouest, incluant Moscou et Petrograd, étaient sous le contrôle des Soviétiques, tandis que les « Blancs » se sont installés sur le Don, dans le Sud, en Sibérie, dans l’Est, et, dans le nord, à Arkhangelsk et Mourmansk.
Qui sont les « Verts » ?
La troisième force importante de la guerre civile étaient les « Verts ». Ils comptaient dans leurs rangs des paysans et des cosaques, ainsi que différents anarchistes, qui n’étaient convaincus ni par les « Blancs », ni par les « Rouges ».
Les « Verts » fuyaient la mobilisation des différentes armées et se réfugiaient dans les forêts (d’où leur nom). Souvent, ils réussissaient à établir de grandes formations militaires et à étendre leur pouvoir sur de vastes territoires.
Ainsi, en 1920, une rébellion massive a eu lieu dans la province de Tambov, au sud de Moscou, dirigée par Alexandre Antonov. Son Armée partisane unie comptait plus de 50 000 hommes, et les forces soviétiques ont eu du mal à les écraser.
Les « Verts » combattaient habituellement tant contre les « Blancs », que contre les « Rouges », mais pouvaient aussi parfois s’allier à l’une des parties adversaires. Le chef de l’Armée révolutionnaire insurrectionnelle ukrainienne, l’anarchiste Nestor Makhno, s’est notamment allié aux bolcheviks, mais, en fin de compte, s’est vu rentrer à nouveau en conflit avec ces derniers, a été vaincu et a fui le pays.
Qui a participé à l’intervention ?
À la suite du traité de Brest-Litovsk, les troupes allemandes ont occupé l’Ukraine et les pays baltes (la Pologne était déjà sous leur contrôle). Seulement après la révolution de novembre 1918 et la défaite du kaiser, ils ont commencé à quitter les territoires de l’ancien Empire russe.
Ce même traité de Brest-Litovsk a conduit à une intervention massive des membres de l’Entente en Russie. Les alliés comptaient faire retourner l’armée russe sur le champ de bataille de la Première Guerre mondiale et ont soutenu les « Blancs » (notamment en armement), qui avaient promis de mener la guerre contre l’Allemagne jusqu’à la victoire, une fois qu’ils auraient récupéré le pouvoir. Des troupes militaires limitées britanniques, françaises, américaines, italiennes, canadiennes, australiennes et grecques ont ainsi débarqué dans les ports du sud, du nord et de l’est du pays.
Même après la fin de la Première Guerre mondiale, l’Entente n’a pas cherché à évacuer ses troupes, cherchant des profits politiques et économiques dans le chaos russe. Les interventionnistes se tenaient pourtant loin des régions de combats intenses, menant la guerre majoritairement aux partisans. Ils ont commencé à quitter le pays dans la seconde moitié de 1919, lorsque le mouvement « blanc » était clairement condamné.
Les Japonais ont été les plus tenaces sur le territoire russe. Leur plan consistait à acquérir de vastes territoires de l’Extrême-Orient russe et de la Sibérie jusqu’au lac Baïkal – soit directement, soit par la création d’un gouvernement factice.
Sans la possibilité d’entrer en conflit armé avec les interventionnistes japonais, les bolcheviks les ont repoussés de leurs territoires par la diplomatie et l’augmentation de mouvements partisans dans le dos de l’ennemi. Le nord de Sakhaline, en revanche, n’a pu être récupéré qu’en 1925.
À quel point la terreur « rouge » et « blanche » était horrible ?
La cruauté est caractéristique de n’importe quelle guerre civile, et le conflit en Russie ne fait pas exception. La violence envers les ennemis de classe et les éléments contrerévolutionnaires a été établie dans la Russie soviétique au niveau gouvernemental le 5 septembre 1918 par le décret « À propos de la terreur rouge ».
Le nombre de victimes de la terreur « rouge » sanctionnée par l’État a atteint jusqu’à deux millions de personnes. La terreur dite « blanche » a quant à elle emporté la vie de plus d’un demi-million d’individus. Cependant, il ne s’agissait pas d’un humanisme particulier de la part des adversaires des bolcheviks, mais plutôt du fait que les régions contrôlées par ces derniers étaient moins peuplées.Les adversaires ne se différenciaient pas par leur cruauté. Par exemple, dans l’est du pays, la politique de répression menée par les « Blancs » de l’amiral Alexandre Koltchak a conduit à des émeutes massives à l’arrière de ses troupes, ce qui a été l’une des plus importantes raisons de l’échec du régime de cet autoproclamé chef suprême de la Russie.
Les forces des interventionnistes ont elles aussi participé à cette terreur. Ils sont responsables de plus de 111 000 morts russes.
Pourquoi les bolcheviks ont-ils gagné ?
L’une des plus grandes raisons de la défaite des « Blancs » dans la guerre civile a été la dispersion de leurs forces. En se trouvant à d’énormes distances les uns des autres, les généraux ne pouvaient pas coordonner leurs actions efficacement. De plus, certaines formations antisoviétiques étaient parfois en conflit ouvert.
Les « Blancs » n’avaient pas d’unité politique, ni d’idéologie formulée (à part l’antibolchévisme et l’intégrité du pouvoir) qu’ils pourraient transmettre à la population. Les bolcheviks, en revanche, possédaient des programmes politiques, sociaux et économiques travaillés, et savaient faire de la propagande efficace.
Des régions industrielles et bien peuplées ont atterri entre les mains des « Rouges », où, par des méthodes violentes, ils ont su construire une structure claire de commandement civil et militaire. Ils ont rapidement établi un système d’entraînement du corps des chefs et spécialistes techniques, et, également, ont recruté autour de 70% des officiers de l’ancienne armée du tsar.
Les bolcheviks ont réussi à mener la guerre civile en force monolithique. Ils réagissaient efficacement aux menaces de tous les fronts et regroupaient momentanément leurs troupes pour les éliminer. Ainsi, après la victoire face à Koltchak au printemps 1919 dans l’Oural, en automne, l’Armée rouge a su successivement éclater l’offensive des Forces armées du Sud de la Russie d’Anton Denikine sur Moscou et de l’Armée du nord-ouest de Nikolaï Ioudenitch sur Petrograd. À la suite de ces lourdes défaites, le mouvement « blanc » était condamné.
source : Russia Beyond
https://reseauinternational.net/tout-ce-quil-faut-savoir-sur-la-guerre-civile-russe/
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