Le
24 août 79, une violente éruption du Vésuve provoque l'enfouissement de
la riche cité romaine de Pompéi sous une pluie de cendres volcaniques.
Le même jour, le port voisin d'Herculanum, à l'habitat plus populaire,
est écrasé, lui, sous une coulée de roches et de laves.
Pompéi disparaît sous 6 mètres de lapilli
(fines particules de roches volcaniques) et Herculanum sous 16 mètres
de boues. Sorties de l'oubli 1700 ans plus tard, ces deux cités nous ont
permis, grâce à leur malheur soudain, de connaître la civilisation
romaine à son apogée avec autant de précision que si elle s'était
éteinte hier.
Fabienne Manière.
Un volcan que l'on croyait éteint
La
précédente éruption du Vésuve remontait à 3.500 ans avant JC et n'avait
laissé aucun souvenir dans la mémoire des hommes. Aussi les Romains ne
savaient-ils même pas que la montagne fertile dominant la baie de Naples
était un volcan !
Sans attendre, les riches propriétaires avaient reconstruit les superbes demeures décorées de fresques, de statues, de mosaïques et de fontaines, où ils venaient se reposer des turbulences de la vie romaine.
La
reconstruction était à peine terminée que le volcan se réveillait pour
de bon en l'an 79, sous le règne de Titus, celui-là même qui écrasa avec
son père une révolte juive.
Une surprise de taille
En
une heure, le volcan propulse dans l'atmosphère un énorme nuage de
cendres brûlantes en forme de pin parasol. À plusieurs kilomètres de
hauteur, ces cendres d'un total de plusieurs millions de tonnes se
refroidissent et retombent sous forme de poussières et de pierres ponce
sur Pompéi. On parle de nuées ardentes.
Quelques heures plus tard, une coulée composée de roches en fusion et de cendres, dite pyroclastique,
dévale la pente du Vésuve et carbonise instantanément Herculanum et ses
habitants. On retrouvera deux mille ans plus tard des débris de
squelettes. Au total, en près de 24 heures, le Vésuve entraîne la mort
de plusieurs milliers de personnes dans les villes et les campagnes du
golfe de Naples.
À
Misène, à la pointe nord du golfe de Naples, un jeune homme de 17 ans,
Pline le Jeune, assiste à l'éruption et en rédige le compte-rendu
détaillé dans deux lettres. Les vulcanologues donneront bien plus tard
le qualificatif de plinéen à une éruption volcanique comme celle qu'il a décrite.
L'oncle du jeune homme, Pline l'Ancien, est un savant connu pour une gigantesque Histoire naturelle en 37 volumes (on lui doit aussi cette critique des excès gastronomiques de ses concitoyens : «Un cuisinier coûte plus cher qu'un triomphe»).
Au
moment de la catastrophe, il commande la flotte romaine qui mouille à
Misène. Mû par la curiosité scientifique et par un sentiment d'humanité,
il meurt asphyxié sur la plage de Stabies après avoir tenté avec ses
navires d'apporter de l'aide à des habitants.
Mode posthume
La
disparition de Pompéi et d'Herculanum est une tragédie humaine comme on
en voit hélas à toutes les époques et sur tous les continents. Si elle a
gardé une place à part dans l'Histoire, c'est qu'elle s'est avérée être
une bénédiction pour les archéologues et les artistes des temps
modernes.
L'éruption
du Vésuve et les villes martyres sont tombées dans l'oubli pendant
plusieurs siècles. Puis, au XVIIIe siècle, des paysans, en poussant
leur charrue, sortent de terre des vestiges antiques. Ceux-ci suscitent
la curiosité du prince d'Elbeuf, un noble de la cour des Habsbourg.
Il
dirige en 1710 une campagne de fouilles sur ce qui s'avèrera être
l'amphithéâtre d'Herculanum et extrait trois belles statues féminines de
marbre. Il en fait don à son cousin, le prince Eugène de Savoie.
Ce
premier acte de pillage va être de nombreux autres jusqu'à ce que les
autorités napolitaines interdisent l'exportation des vestiges.
À la
fin du XVIIIe siècle, sous le règne du falot Ferdinand VII et de sa
brillante épouse Marie-Caroline de Habsbourg, le site de Pompéi devient
une destination à la mode pour les nobles de toute l'Europe comme pour
les savants.
Les
trésors de l'empire romain recueillis à Pompéi deviennent une source
d'inspiration pour les décorateurs et les artistes qui inaugurent en
France les styles Directoire et Empire. Ainsi le sculpteur Canova a-t-il
réalisé dans le style antique la statue de Pauline Bonaparte nue que
l'on peut voir à la villa Borghèse, à Rome.
Bénéfices d'une tragédie
Dès
le XVIIIe siècle, les archéologues se mettent à excaver les traces
presque intactes de la vie quotidienne des riches Romains, faisant de
Pompéi le premier et le plus grand de tous les chantiers
archéologiques.
L'archéologue Giuseppe Fiorelli a l'idée d'injecter du plâtre dans ces cavités de façon à restituer la forme des disparus.
D'où ces moulages saisissants des habitants de Pompéi figés dans l'attitude où la mort les a surpris.
On
peut aujourd'hui visiter les ruines des deux villes et y retrouver le
souvenir de l'ancienne Rome ainsi que dans le musée archéologique de
Naples, qui abrite plus d'un million d'objets retrouvés sur les sites.
Reste
à souhaiter qu'aucune éruption ne vienne à nouveau recouvrir les sites
de Pompéi et Herculanum (la dernière éruption remonte au 26 avril
1872)... D'aucuns pensent toutefois que le plus grand danger qui les menace aujourd'hui tient à l'incurie du gouvernement italien.
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