lundi 13 décembre 2010

Algérie : l’héritage était trop beau

En 130 ans, la France créa l’Algérie, l’unifia, lui offrit un Sahara qu’elle n’avait jamais possédé, draina ses marécages, bonifia ses terres et équipa le pays. Elle fit entrer dans la modernité des tribus jusque-là dissociées et qui n’avaient jamais eu conscience d’appartenir à un tout commun supérieur aux limites de leurs douars ou des terrains de transhumance de leurs troupeaux.

Quand, après les douloureux événements que l’on sait, le drapeau tricolore fut ramené et des centaines de milliers d’Européens lancés sur les routes de l’exode, l’Algérie algérienne était, de tous les anciens pays "coloniaux", celui qui avait le plus reçu de son ancienne métropole.

L’Algérie avait, en effet, coûté très cher à la France qui y subventionna des productions qu’elle achetait fréquemment au-dessus des cours mondiaux. Dans le cas présent, ce n’est pas d’un prétendu "pillage colonial" qu’il nous faut parler, mais de la ruine de la métropole qui ne cessa à aucun moment de tenter de combler le "tonneau des Danaïdes" d’outre-Méditerranée.

La désinformation marxisto-tiers-mondiste a tellement faussé la réalité de l’histoire de l’Algérie française qu’il importe, une fois encore, de nous effacer devant les chiffres bruts et de ne jamais perdre de vue que tout ce qui a été créé en Algérie le fut durant la parenthèse française, que toutes les sources d’énergie découvertes et mises en valeur au Sahara le furent durant la même période.

Au bout de 132 années de présence, la France laissait en héritage à l’Algérie :

- 70 000 km de routes, 4 500 km de voies ferrées, 4 ports équipés aux normes internationales, une douzaine d’aérodromes principaux, des centaines d’ouvrages d’art (ponts, tunnels, viaducs, etc.) ;

- des milliers de bâtiments administratifs, de casernes, de bâtiments officiels qui étaient propriété de l’État français ;

- 31 centrales hydroélectriques ou thermiques ;

- une agriculture non seulement autosuffisante, mais encore largement exportatrice ;

- des milliers d’écoles, d’instituts de formation, de lycées, d’universités, d’hôpitaux, de maternités, de dispensaires, de centres de santé, etc.

Cette comptabilité permet de faire un éloquent bilan. Il tient en peu de mots : l’Algérie a dilapidé son héritage et elle en subît les conséquences. Quelques chiffres permettront de mesurer le recul de ce pays que les progressistes présentaient comme le futur phare du tiers-mondisme socialisant :

- le pays est contraint d’importer entre 50 et 60 % de ses besoins en céréales. En 1961, l’Algérie exportait 600 000 quintaux de grain et 700 000 de semoule ; aujourd’hui, la moyenne des importations se situe entre 5 et 30 millions de quintaux par an ;

- le pays n’exporte plus d’oranges, alors qu’avant 1962 les exportations étaient de 200 000 tonnes ;

- l’Algérie n’exporte plus de tomates, de carottes, d’oignons, de haricots verts, de melons, de courgettes, etc. Or, toutes ces productions faisaient la richesse des maraîchers européens. Avant 1962, les primeurs algériens débarquaient à Marseille par bateaux entiers. Sans parler des dattes ou des légumes secs ;

- avant 1962, l’Algérie exportait environ 120 000 quintaux de figues sèches, 100 000 hectolitres d’huile d’olive et 50 000 quintaux d’olives. Aujourd’hui, la production locale ne suffit même plus à alimenter le marché local ;

- quand elle était encore française, l’Algérie exportait entre 500 000 et un million de quintaux de pommes de terre nouvelles. Aujourd’hui, il s’agit d’un souvenir...

L’Algérie algérienne a tellement dilapidé son héritage "colonial" qu’elle doit consacrer le quart de ses recettes en hydrocarbures - ses seules recettes - à l’importation de produits alimentaires de base dont elle était exportatrice avant 1962.

Que s’est-il donc passé ? Le désert du Sahara ne s’est tout de même pas avancé jusqu’à la Mitidja... Et le Maroc, son voisin nord-africain, a connu une évolution inverse de celle de l’Algérie.

La faillite algérienne tient en trois réalités :

1 - un dogmatisme doctrinal qui, en ayant privilégié les industries "industrialisantes", a ruiné l’agriculture ;

2 - un suicide démographique (10 millions d’habitants en 1961, probablement 30 millions aujourd’hui) ;

3 - une corruption généralisée.

Les partisans métropolitains de l’Algérie algérienne ont commis une bien mauvaise action en portant les valises du FLN.

par Bernard Lugan Le Libre Journal de la France Courtoise -n° 52 du 30 novembre 1994

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