mardi 24 février 2009

13 juillet 1793 : Charlotte Corday

« II suffirait peut-être d'un geste pour que tout commence de s'orienter autrement. Un geste issu du génie surprend les hommes. Ils ne peuvent y résister. Le vent tourne sur la nier, ô fille des Vikings. Dieu dans le ciel attend, mais il ne peut remuer si au moins une de ses créatures libres. ne lui fait signe ». En ces quelques lignes, rapportées dans le beau livre, le livre fondateur que Jean Mabire lui a consacré, Pierre Drieu La Rochelle a donné le sens profond du tragique destin de Charlotte Corday.
Marie-Charlotte De Corday d'Armont est une Normande, née en 1768. Arrière-petite-nièce du grand Pierre Corneille, elle a été élevée dans le culte des auteurs anciens et nourrie, donc, d'un univers où la tragédie est mère d'un héroïsme marqué de stoïcisme. Une telle école apprend l'horreur de la médiocrité et façonne des âmes d'airain. Mais ces nobles fréquentations n'empêchent pas la jeune Charlotte de se passionner pour les philosophes de son temps, en tête desquels arrive tout naturellement Jean-Jacques Rousseau. Voilà de bonnes raisons d'accueillir favorablement cette Révolution qui affiche, telle une nouvelle religion, le culte de la liberté.
Tout bascule, pour Charlotte Corday, lorsqu'elle apprend l'exécution du roi, les flots de sang que fait couler à Paris la Terreur. Se peut-il donc que de beaux et nobles principes débouchent, en prétendant la justifier, sur l'horreur institutionnalisée ? A Caen, où elle habite, Charlotte voit arriver Pétion, Barbaroux, Guadet et d'autres Girondins en fuite, essayant de sauver leur vie. Les atroces récits qu'ils livrent d'une voix lasse, vaincue, horrifient la jeune Normande. Ainsi, voici ce qu'ont fait de son bel idéal des doctrinaires fanatiques, s'enivrant eux-mêmes de leurs discours sanguinaires jusqu'à perdre toute raison ? Il faut les punir par un geste exemplaire, capable de réveiller le pays.
Sans parler à quiconque de sa détermination, Charlotte Corday prend la diligence pour Paris. Elle a choisi une cible emblématique : ce sera Marat, ce Marat qui réclame dans son journal l'Ami du peuple, toujours plus de sang, après avoir provoqué les massacres de Septembre, la mort du roi et l'adoption d'un terrorisme systématique et aveugle.
Souffrant d'une maladie de peau qu'il soigne par des bains d'eau sulfureuse, Marat ne quitte plus guère son domicile et n'est donc pas facile à joindre. D'autant que sa compagne Simone Evrard, qui lui voue une passion dévorante, veille jalousement sur lui et écarte les importuns. Refoulée à plusieurs reprises, Charlotte Corday finit par forcer la porte de Marat en affirmant qu'elle apporte une liste de Girondins en fuite réfugiés à Caen. La veille, elle a acheté un long couteau de cuisine et rédigé une Adresse aux Français où elle adjure ses compatriotes de rejeter la sanglante dictature des Montagnards.
Introduite auprès de Marat, qui lit son courrier dans sa baignoire, Charlotte lui tend son placet et, calmement, le poignarde d'un coup mortel. Jugée et condamnée quatre jours plus tard, elle est aussitôt conduite à la guillotine et meurt avec un courage qui impressionne l'assistance.
Elle a laissé, en testament, quelques mots : « Il faut rester là à crier la vérité jusqu'à ce qu'on vous assomme. Il ne faut jamais s'en aller ». Nous ne nous en irons pas, Charlotte Corday ...
P.V National Hebdo du 10 au 16 juillet 1997

vendredi 20 février 2009

1er juillet 1925 : Pétain et De Gaulle

Lorsqu'il pénètre, le 1er juillet 1925, dans les fastueux appartements qui abritent, au 4 bis boulevard des Invalides, l'état-major particulier du maréchal Pétain, le capitaine Charles De Gaulle a trente-quatre ans. Sa carrière d'officier, sorti de Saint-Cyr en 1912, a été vite assombrie par un pénible épisode : fait prisonnier en 1916 à Verdun, il a fini la guerre en captivité. Amer d'avoir ainsi vécu une partie du conflit en spectateur, De Gaulle exprime en novembre 1918, dans une lettre à sa famille, « le regret indescriptible de n'y avoir pas pris une meilleure part ». Il lui faut se réadapter, par un stage à Saint-Maixent destiné aux officiers rentrant de captivité. Il saisit au vol l'occasion de quitter la France, pour participer à une mission d'instruction d'officiers polonais : face aux menaces de l'Armée Rouge, les puissances occidentales ont décidé d'armer la Pologne.
De retour en France, De Gaulle est chargé d'un cours d'histoire à Saint-Cyr. Mais il a d'autres ambitions et, en mai 1922, il est admis à l'Ecole supérieure de guerre. L'Ecole est, normalement, pour les sujets doués, un tremplin naturel vers les hautes fonctions. Doué, De Gaulle l'est (il a d'ailleurs dans son dossier une appréciation - révélatrice - du commandant en second de Saint-Cyr : « Officier de haute valeur et qui le sait. ») Hautement convaincu, donc, de sa valeur, il entre vite en conflit avec l'enseignement reçu à l'Ecole de guerre. Car cet enseignement est basé sur la doctrine de la défensive : pour jouir au mieux des fruits de sa victoire, la France doit se protéger en s'installant derrière une solide muraille, fortement armée, et en refusant tout aventurisme. Cette doctrine est professée par le général Debeney, qui commande l'Ecole de guerre. Mais l'inspirateur en est le maréchal Pétain.
Le vainqueur de Verdun a, au lendemain de 1918, la haute main sur l'armée française. Vice-président du Conseil supérieur de la guerre, inspecteur général de l'armée, il contrôle l'état-major. Mais il est plus encore, comme le souligne Lacouture : « Pétain, dans la première partie des années vingt, c'est une sorte de divinité militaire. Il est à la fois le chef et le père, chargé de toutes les gloires et détenteur de tous les pouvoirs ( ... ). Tout concourt à faire de lui beaucoup plus qu'un généralissime ou qu'un chef victorieux : une sorte de figure tutélaire où se reconnaît non seulement une armée, mais aussi une nation saignée à blanc par sa victoire. Aussi bien tout ce qui touche au métier des armes gravite-t-il, ces années. là, autour de lui. » Pétain fait l'unanimité : Léon Blum dit de lui qu'il est « le plus humain des chefs ».
Pour avoir manifesté beaucoup d'indépendance d'esprit, De Gaulle sort mal noté de l'Ecole de guerre. Avenir bouché ? Le capitaine De Gaulle se retrouve affecté au 4e bureau de l'état-major de l'armée du Rhin, à Mayence (le 4e bureau est chargé de l'intendance : le peu exaltant « riz-pain-sel »... ). C'est de cet exil que le tire Pétain, en le faisant affecter à son état-major personnel.
De Gaulle a déjà été sous les ordres de Pétain : sa première affectation, à la sortie de Saint-Cyr, fut le 338 RI d'Arras, que commandait alors le futur maréchal. Celui-ci, à l'évidence sans rancune à l'égard du bouillant élève de l'Ecole de guerre qui a osé critiquer la « doctrine Pétain », est intervenu pour que soient relevées ses notes finales, peu glorieuses ... Il a distingué, chez ce contestataire, un sujet hors du commun. En 1925, donc, la collaboration entre les deux hommes s'annonce fructueuse. Les orages viendront plus tard ..
P.V National Hebdo du 26 juin au 2 juillet 1997

lundi 16 février 2009

27 novembre 1431 : LA TOISON D'OR

La première réunion du chapitre de l'ordre de la Toison d'or, tenue à Lille le 27 novembre 1431, fut un moment fort du '"règne" de Philippe le Bon, ce duc de Bourgogne qui voulut reconstituer la vieille Lotharingie fut surnommé le « Grand duc d'Occident » et aimait dire « Je veux qu'on sache que si je l'eusse voulu, j'eusse été roi. » A vrai dire, sans porter le titre royal, le Bourguignon pouvait se permettre de traiter d'égal à égal avec tous les souverains, tant était grande sa puissance.
Son troisième mariage le démontra puisqu'il obtint sans peine la main de l'infante Isabelle de Portugal, fille du roi Jean 1er d'Avis et de Philippa de Lancastre, princesse de la Maison royale d'Angleterre. Le mariage fut fastueux, dans des décors mis en place pour la circonstance afin d'accueillir les réjouissances où les franches ripailles à la flamande et les joutes entretenaient cette ambiance de « fougueuse kermesse, joyeuse et brutale » que décrit Michelet. Philippe le Bon choisit ce moment, peut-être afin de rehausser les fastes du mariage princier, pour annoncer solennellement la foudation du « Très noble Ordre de la Toison d'Or », destiné à réunir les preux d'entre les preux de tous les Etats bourguignons, sur le modèle évident de cette chevalerie de la Table Ronde qui faisait flamber, à la fin du Moyen Age, l'imaginaire de toute l'aristocratie européenne. Philippe le Bon avait pris soin de faire savoir, par la voix du « roi d'armes de Flandre » (le premier des hérauts flamands du prince), qu'il s'agissait d'exhorter les membres du nouvel ordre à se hisser au niveau de vaillance des anciens preux.
Au début de son principat, Philippe le Bon s'était vu proposer, par le duc de Bedford, Régent d'Angleterre, d'entrer dans l'ordre de la Jarretière. Il avait décliné l'offre. Il ne se voyait qu'en Grand Maître d'un ordre créé par lui. Il ne faisait en cela qu'imiter nombre d'autres princes. Charles VI n'avait-il pas créé en 1410 la « Chevalerie du Roi du Soleil d'Or » ? Et Amédée de Savoie, en 1362, l'« Ordre du Collier », qui devait devenir plus tard l'''Annonciade'' ? Le roi René, mais également les ducs de Bourbon, avaient leur ordre bien à eux.
Le duc de Bourgogne, mécène de sculpteurs et de peintres de génie, était homme de culture mais aussi et surtout grand politique. En un temps où les mythes antiques retrouvaient, par le biais de l'Italie, une place d'honneur dans la culture européenne, la force symbolique de l'histoire de la Toison d'Or lui semblait bien digne d'exalter son pouvoir. Et Jason, parti vivre avec ses Argonautes une aventure surhumaine en Colchide pour en rapporter cette Toison si chargée de sens mythique, n'avait-il pas naturellement, comme héritier spirituel, le « Grand Duc d'Occident », qui avait vocation à réanimer l'idéal de croisade ?
C'est dans les rues de Bruxelles, où se trouvait le duc Philippe à la Toussaint 1431, que fut annoncée par le « roi d'armes » de Brabant et ses hérauts la tenue du premier chapitre de la Toison d'or : « Oyez, princes, seigneurs, chevaliers et écuyers. De par très haut et très excellent, très puissant prince de mon redouté seigneur Philippe, par la grâce de Dieu duc de Bourgogne, de Lothier, de Brabant et de Limbourg, comte de Flandre, d'Artois et de Bourgogne, palatin, est à savoir à tous les nobles seigneurs et compagnons de l'Ordre de la Toison, et à tous les autres princes, seigneurs, chevaliers et écuyers, que vous soyez en la bonne ville de Lille en Flandre, la nuit de Saint-André prochainement, pour accompagner le duc, lequel a intention et volonté de commencer la fête du noble Ordre de la Toison d'Or. Si fera très bonne chère à ceux qui y voudront venir ! »
Les premiers statuts du nouvel Ordre furent transcrits en « langue bourguignonne », non en latin. Au cours d'un office, le chancelier de la Toison d'Or, l'évêque Jean Germain, profita de l'occasion pour dénoncer, au cours de son homélie, le caractère franchement trop païen du héros grec Jason, qui devait donc être remplacé par le juge biblique - Gédéon. Le duc l'écouta bien sûr poliment... et, comme on le voit à Dijon et à Anvers sur son beau portrait réalisé par Van der Weyden, n'en garda pas moins Jason comme référence, en portant autour du cou, comme tous les membres de l'Ordre, le collier d'or marqué de l'emblème bourguignon (les "fusils" ou briquets entrecroisés et la « pierre à feu » lançant des étincelles) auquel était suspendue la toison du bélier divin.
Après la mort du dernier duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, le mariage de sa fille Marie fit passer l'Ordre de la Toison d'or dans la maison de Habsbourg. Mais la Toison fit rêver, jusqu'en plein xxe siècle, ceux qui voulurent faire revivre une Grande Bourgogne.
P. V. Rivarol 2008

samedi 14 février 2009

Les Gaulois, nos ancêtres.

IIIe millénaire : apparition des indo-européens, considérés comme les ancêtres des Celtes.
Vers 800 avant J.C venant de l'est de l'Europe par vagues successives, les Celtes s'installent dans l'ouest européen.
Dont les Gaulois, peuple ancien et nouveau, ancien car faisant partie des Celtes, nouveau par la jeunesse de leur dénomination.
Lorsque les Celtes de ce qui deviendra la Gaule se déplaçaient, ils emmenaient des cages de volailles vivantes pour avoir toujours de la nourriture et quand ils déferlèrent sur Rome à la suite de Brennus (saccage de Delphes), les Romains les surnommèrent «poulets» : «Galli», ce nom leur restera, «Gaulois».
Leur pays pris le nom de «Gaule» «Gallia». La Gaule mosaïque de peuples ou de nations gauloises qui occupait ce qui est la France d'aujourd'hui et la Belgique alors que les territoires celtes s'étendaient de l'Irlande jusqu'à deux milles kilomètres vers l'est. Pour certains historiens, ce serait César qui aurait inventé la Gaule afin d'unifier ses conquêtes, les Grecs quant à eux les appelaient Galataï.
« L'ensemble de la Gaule est divisé en trois partie : l'une est habitée par les Belges, l'autre par les Aquitains, la troisième par ceux qui dans leur propre langue, se nomment Celtes et, dans la nôtre, Gaulois. Tous ces peuples diffèrent entre eux par le langage, les coutumes, les lois. Les Gaulois sont séparés des Aquitains par le cours de la Garonne, des Belges par la Marne et la Seine » César au début de la Guerre des Gaules ( de Bello Gallico, I,1 ), les Latins quand ils parlaient de ce pays y ajoutaient toute l'Italie padane ainsi qu'une partie de la côte adriatique jusqu'à Ancone, région conquise par les Celtes au début du IVe siècle av. J.C.
Lorsque les Romains s'installent dans ce qui deviendra la Narbonnaise, ils lui donneront le nom de Gallia togata, la gaule en toge, la Gaule indépendante prenant le nom de Gallia comata, la Gaule chevelue.
La Gaule était principalement agricole, forêts remplacées par des champs et des prés. La campagne gauloise est riche, prospère, bien cultivée et la taille des fermes est variable. Seule la polyculture est employée, on y cultivait le blé, l'orge qu'ils utilisaient pour fabriquer la cervoise (une sorte de bière ) et le millet. Les Gaulois pratiquaient l'élevage de bovins, d'ovins de chevaux et de porcs. ( les animaux à l'époque étaient plus petits que ceux de maintenant )
« Ils sont si riches en ovins et en porcins ( Strabon 1er siècle avant J.C ) qu'ils fournissent à profusion de leurs sayons ( manteau à capuche ) et de leurs salaisons non seulement les marchés de Rome mais aussi la plupart de ceux d'Italie. » (IV,4)
Les Gaulois sont réputés pour leur artisanat, principalement la métallurgie (par exemple, les populations celtiques sont les seules dans l'antiquité à réaliser les fourreaux de leurs épées en métal) dont les oppidas comme Bribracte (sur les pentes du Mont Beuvray au sud de la Bourgogne) capitale des Eduens, conservent encore les traces des ateliers.
Ils étaient aussi réputés et appréciés comme mercenaires.
Les oppidas, centre politique pouvaient servir aussi de centre de marché et de foire mais aussi de refuge en cas d'agression. Cependant, au vu de la faiblesse défensive de certains remparts, ils auraient eu une fonction de « tape à l'œil ». Les gaulois habitaient généralement des villages.
Sur le plan religieux, les Gaulois ont de multiples divinités ( qu'ils refusèrent longtemps de représenter ).
Taranis : dieu du tonnerre, Cernunnos : le dieu aux bois de cerf qui symbolise le renouveau des forces de la nature, Teutatès : symbolise le serment donné, Lug : dispensateur de richesses, Sucellus « le dieu frappeur » : il passe pour aider les mourants à gagner sans crainte l'au-delà, Epona ( déesse) : la protectrice des chevaux, Esus : dieu bûcheron.
Les Gaulois portaient un culte particulier aux éléments de la nature, astres, sources, eaux dormantes, sommets, fleuves.
Au moins dans les derniers siècles de notre ère, différents types de sanctuaires sont élevés . Ce sont des autels non couverts à l'origine puis couverts au centre d'un enclos doublé d'un fossé où se trouvent des fosses et un bosquet.
La Gaule était très peuplée, divisée en peuples tantôt alliés, tantôt rivaux dont on retrouve les noms, Arvernes ⇒ Auvergne, Bituriges ⇒ Bourges, Vénètes ⇒ Vannes, Parisii ⇒ Paris, Andégaves ⇒ Anjou....
Beaucoup de ces peuples s'enrichissaient grâce aux péages installés aux passages obligés sur les fleuves ou dans les vallées, la Gaule étant un pays où le commerce était très développé, notamment avec les Grecs et les Romains ( le vin ).
Comme les Romains ou les Grecs, les Gaulois se divisent en deux catégories, les hommes libres et les esclaves qui tant qu'ils ne sont pas affranchis, n'ont aucune action dans la vie sociale et donc dans les affaires politiques.
Les Gaulois se divisent en trois classes,
- religieux ⇒ les druides, ils suivent un enseignement purement orale qui peut durer vingt ans, ils se cooptent les uns les autres, n'importe qui peut le devenir. Grâce à la pratique cultuelle, ils ont pu développer des connaissances en astronomie, calcul et anatomie. Ils se verront confier l'éducation des jeunes nobles. Ils enseignent entre autre l'immortalité de l'âme.
( les bardes personnages importants, ils faisaient perdurer l'histoire des tribus ( poèmes et légendes ), ils connaissent les chants et étaient adroits dans les rîmes. Ils allaient aussi au combat (il était interdit de tuer un barde car avec sa mort l'histoire de la tribu mourrait avec lui. )
- les guerriers ⇒ les chevaliers,
- la plèbe ⇒ les agriculteurs, artisans... etc
( s'y ajoutaient les esclaves provenant souvent des peuples vaincus )
- Les druides ne paient pas l'impôt et sont dispensés du service militaire.
- Les chevaliers paient l'impôt et sont soumis au service militaire.
- Les plébéiens paient l'impôt et sont soumis au service militaire.

« Partout en Gaule il y a deux classes d'hommes qui comptent et sont considérés. Quant aux gens du peuple, ils ne sont guère traités autrement que des esclaves, ne pouvant se permettre aucune initiative, n'étant consultés sur rien. La plupart, quand ils se voient accablés de dettes, ou écrasés par l'impôt, ou en butte aux vexations de plus puissants qu'eux, se donnent à des nobles ; ceux-ci ont sur eux tous les droits qu'ont les maîtres sur leurs esclaves.
« Pour en revenir aux deux classes dont nous parlions, l'une est celle des druides, l'autre des chevaliers. [...] Ceux-ci, quand il le faut, quand quelque guerre éclate ( et avant l'arrivée de César cela arrivait à peu près chaque année, soit qu'ils prissent l'offensive, soit qu'ils eussent à se défendre ), selon sa naissance et sa fortune, a autour de soit un plus ou moins grand nombre d'ambacts ( guerrier qui dépend d'un personnage important et qui le suit au combat. ) et de clients. Ils ne connaissent pas d'autre signe du crédit et de la puissance » César (BG VI, 13 et 165).
La Gaule comme les autres Celtes, pratique le système de clientèle, en échange de services ou de biens, les hommes libres apportent leur service pour les combats ou les péripéties de la vie politique.

Vers 390 av JC des Gaulois de la tribu des Sénons, dans le centre-est de la Gaule traversent l'Italie, battent les Romains à Allia et parviennent jusqu'à Rome qui à part le Capitole est incendiée. Ils massacrent les patriciens et infligent une terrible humiliation aux Romains.
Tite-Live en parle dans son Histoire de Rome .
« Alors le Sénat se réunit et chargea les tribuns militaires de traiter avec l'ennemi. Il y eut une entrevue du Tribun militaire Quintus Sulpicius et du chef des Gaulois Brennus. Un accord fut conclu et on estima à mille livres d'or la rançon d'un peuple appelé à devenir le maître du monde. A cette honte vint s'ajouter un outrage : les Gaulois avaient apporté des poids et comme le tribun refusait, l'insolent ennemi y ajouta une épée et fit entendre ces paroles intolérables pour les Romains : "Vae victis" : Malheur aux vaincus. »
Vers 279 av JC, une troupe de Gaulois ayant participé au raid sur Delphes et après le suicide de Brennus ( un autre Brennus ) s'installent en Asie Mineure et fonde le royaume éphémère des Galates d'où elle menaçait la puissance de Bysance.

Après des années de guerres provoquées par César pour des raisons politiques intérieurs romaines, la Gaule indépendante disparaît pour laisser la place à une nouvelles province romaine et un nouveau peuple les Gallo-Romains.
Sources : Nos ancêtres les Gaulois , Renée Grimaud
Les Gaulois Jean-Louis Brunaux
Les Celtes Barry Cluniffe
L'Histoire décembre 2003, décembre 2007
Dossier pour la science octobre-décembre 2008

Pat

vendredi 13 février 2009

26 mai 1944 : des morts sans importance

Le joli mois de mai mérite bien son nom, à Lyon, en 1944. Le 26, le ciel est d'un bleu intense sur la ville. Dans les rues, les filles, malgré la dureté des temps, ont sorti ces robes claires qui font rêver les garçons. L'ambiance est à la joie, au bonheur de vivre.
Pourtant des oiseaux de mort s'approchent. Près de huit cents bombardiers américains, venus d'Italie, ont mission de matraquer Grenoble, Chambéry, Saint-Etienne et Lyon. La vieille capitale des Gaules attire la moitié des rapaces. A 10 h 43, l'apocalypse s'abat sur les Lyonnais, dont beaucoup essayent de gagner - trop tard - des abris qui n'offrent d'ailleurs qu'une protection toute relative. Les aviateurs américains ont pour mission de détruire trois gares importantes. Mais, à la différence des Anglais qui essayent de cibler le plus possible leurs attaques, les Américains - dont la formation a été souvent aussi rapide que sommaire - volent à très haute altitude et, au signal sonné par le leader, lâchent leurs bombes selon la technique du «tapis»... c'est-à-dire au petit bonheur. Deux des trois gares lyonnaises ne sont pas atteintes. En revanche, des quartiers entiers sont ravagés, anéantis. Le long de l'avenue Berthelot, sur plus de trois kilomètres, il n'y a plus que des ruines d'où montent poussière, fumée et gémissements des blessés pris sous les décombres. Il y a 20 000 sinistrés et on relèvera plus de 700 morts, dont le professeur Rochaix, sous-directeur de l'institut bactériologique Pasteur, et Marius Vivier-Merle, délégué du CNR (Conseil national de la résistance ... ) En gare de Vaise, touchée par de nombreuses bombes, un « train de grand secours » est détruit. Ce train avait été mis en place par les autorités de Vichy pour porter rapidement secours aux grands blessés, nourrir et habiller des milliers de sinistrés, fabriquer des pièces d'identité pour ceux qui les ont perdues à cause des événements.
Le 29 mai, 432 cercueils alignés sur la place Saint-Jean illustrent le deuil de la ville de Lyon. Son archevêque, le cardinal Gerlier, constate que l'appel lancé par les archevêques de France aux épiscopats anglais et américain, afin qu'il n'y ait plus de bombardements aveugles, est resté sans écho. L'émotion est grande au sein de la population, beaucoup de Lyonnais se demandant quelle peut être la justification d'un tel massacre.
La question se pose un peu partout en France, dans les villes et villages massacrés par l'aviation «alliée». Le prétexte de la lutte contre l'Allemagne parait dérisoire et Philippe Henriot touche juste lorsqu'il déclare à la radio :
« On serait curieux de savoir combien d'Allemands ont pu périr dans les logements ouvriers de Saint-Denis, de Saint-Ouen, de La Courneuve, de Noisy-le-Sec, de Bobigny, dans les pavillons de Romainville ou d'Athis-Mons ? » .
Car le martyre de Lyon est partagé, pendant des mois, par Nantes, Le Mans, Limoges, Toulouse, Lille, Denain, Strasbourg, Bourges, Clermont-Ferrand, Paris et toute sa ceinture ouvrière et industrielle. La liste est trop longue pour pouvoir être donnée : Mais la Normandie paye un tribut particulièrement sanglant. Les grandes villes sont martyrisées mais aussi des villages, dont certains sont rayés de la carte par les «libérateurs». Partout, dans les ruines, au milieu de restes humains affreusement déchiquetés s'activent les filles et les garçons des équipes nationales, qui essayent de sauver ce qui peut encore l'être. En quelques heures ces jeunes, dont certains payent de leur vie leur dévouement, vont faire le terrible apprentissage de la vie et de la mort. Marqués à jamais par ce qu'ils ont vu.
P. V. National Hebdo du 22 au 28 mai 1997

jeudi 12 février 2009

Les collabos de gauche furent légion

Les historiens comme Henri Amouroux, François-Georges Dreyfus ou un homme politique et essayiste tel qu'Alain Griotteray ont bien montré que, durant la Deuxième Guerre mondiale, les premiers résistants français furent de droite et de très nombreux collaborateurs de gauche. Cette vérité commence à peine à émerger dans notre hexagone sinistré par la pensée unique.
Journaliste et historien rigoureux, Jean-Claude Valla confirme, s'intéressant de près et avec honnêteté au combat des socialistes dans la Collaboration. En premier lieu, il s'attache à décrire le parcours et les idées du socialiste pacifiste Marcel Déat, dirigeant du premier parti politique collaborationniste, le Rassemblement national populaire (RNP). Préconisant une collaboration franco-allemande radicale, Déat venait de la SFIO et défendra les principes d'une république laïque, anticléricale et totalitaire. Stigmatisant l' «attentisme» de Vichy dès 1940, il se convertit à un « national-socialisme à la française » jusqu'au-boutiste et milite plus largement en faveur d'un socialisme révolutionnaire européen unifié en rupture totale avec la réaction bourgeoise et le capitalisme d'obédience anglo-saxonne. Et Valla de nous brosser les portraits d'autres socialistes nationaux engagés dans la Collaboration : Charles Spinasse, Hubert Lagardelle, Claude Jamet, Ludovic Zoretti, sans oublier Georges Soulès plus connu sous le nom de Raymond Abellio.
Ne réduisant pas son champ d'investigation à la France, Jean Claude Valla consacre plus d'un chapitre au socialiste planiste belge Henri De Man (1885-1953), Président du Parti ouvrier belge (POB), ancien ministre socialiste des Travaux publics, puis des Finances, De Man est à la fois un intellectuel et un homme politique réaliste, qualités conjuguées d'une extrême rareté.
Une anecdote méconnue nous est livrée par Valla : en 1940, De Man dîne à l'ambassade d'Allemagne à Paris avec le chef rexiste Léon Degrelle auquel il s'était opposé dans les années 1930 en Belgique. Conviés par Otto Abetz et se retrouvant en compagnie du SS-Standartenfuhrer Helmut Knochen, les deux hommes discutent de différents projets. Un seul retient vraiment leur attention, qui les amènera à se revoir quelques semaines plus tard : ils veulent former un gouvernement De Man-Degrelle pour la Belgique ! Le projet échouera de peu, en raison du refus d'Adolf Hitler de voir cette alliance se nouer.
Ce numéro double des Cahiers libres d'Histoire associe toutes les qualités de rigueur historique, de précision des références, de vigueur stylistique, de nuances idéologiques et d'originalité du point de vue. Les nombreuses photos assorties de commentaires résumés, les multiples notes et l'index final sont également très précieux. Un maître ouvrage sur le sujet de la Collaboration.
Les Socialistes et la Collaboration, De Jaurès à Hitler, par Jean-Claude Valla, Les Cahiers libres d'Histoire n°13-14, Editions de la Librairie nationale, 198 pages, 22,00 euros
A.-G. J. Choc du Mois Octobre 2006

mercredi 11 février 2009

5 mai 1937 : le vrai visage du communisme

Dans la montée de la paranoïa antilepéniste, les communistes essayent de tirer leur épingle du jeu : Robert Hue, alias le nain de jardin, espère compenser le recul permanent, au plan électoral, du parti communiste, en appelant à l'union sacrée tous les enfants de Karl Marx, y compris les bâtards - c'est-à-dire la nébuleuse d'extrême gauche qui va des éléments les plus sectaires - les trotskistes de diverses obédiences - aux éléments les plus folkloriques - anarchistes de tous poils et de toutes utopies. C'est une opération d'acharnement thérapeutique car que resterait-il de l'extrême gauche si elle ne disposait pas, pour survivre vaille que vaille, de l'épouvantail "fasciste" (qui ne fait même plus peur aux petits enfants) ? C'est pourquoi il est bon, pour dégonfler la baudruche, de rappeler ce que fut, en des moments historiques, la véritable stratégie communiste.
Cette stratégie se résume en une formule simple, éliminer, physiquement, les frères ennemis. A cet égard, la guerre d'Espagne offre quelques cas d'école.
Voici un exemple parmi beaucoup d'autres. Le 5 mai 1937, de violents combats se déroulent à Barcelone. Contre l'hydre fasciste? Que nenni. Il s'agit, pour les communistes, de mettre hors jeu ceux qui leur font de l'ombre au sein du camp rouge, à savoir les militants anarchistes. Ceux-ci sont solidement implantés en Catalogne et ont installé un peu partout, jusque dans les villages perdus des Pyrénées, des communautés autogérées prétendant concrétiser l'idéal libertaire. Celui-ci a ses inconvénients sur le plan militaire : les milices anarchistes refusent évidemment le principe même de toute discipline, elles élisent leurs chefs non en fonction de leurs compétences militaires mais de leur popularité et chacun quitte les lignes quand il le désire en s'accordant une permission dont la durée varie selon ses goûts. D'où ses échecs répétés, face aux nationalistes, devant Huesca, Jaca, Saragosse. Mais la CNT (Confédération nationale du travail) et le FAI (Fédération anarchiste ibérique) contrôlent Barcelone, avec leurs alliés du POUM (Parti ouvrier d'unification marxiste), mouvement trotskiste fondé en 1933 par André Nin. Ce dernier est l'ennemi juré du PSUC (Parti communiste catalan), affilié à la IIIe Internationale et de stricte orthodoxie stalinienne. Les communistes, aidés par les équipes du NKVD (police secrète soviétique) dirigées par Alexandre Orlov, brûlent d'éliminer les hérétiques de la CNT-FAI et du POUM.
C'est chose faite en mai 1937. Le prétexte est classique : des franquistes ont infiltré, disent les gens du PSUC, les rangs des anarcho-trotskistes et il faut donc "épurer". Une véritable chasse aux sorcières s'organise. Les combats dans Barcelone entre fractions rouges rivales font plus de cinq cents morts. Des milliers d'anarcho-trotskistes sont jetés en prison. Les antifascistes italiens, Camillo Berneri et Francesco Barbieri, suspects de déviationnisme, sont eux aussi abattus. Quant au chef trotskiste André Nin, il disparaît sans laisser de traces. Il a été enlevé et torturé à mort par des agents staliniens qui ont fait courir le bruit qu'il s'était réfugié... en Allemagne nazie ! L'excellent historien de la guerre d'Espagne, Hugh Thomas, écrit : « Une équipe de communistes allemands des Brigades internationales fut engagée pour jouer le rôle d'espions nazis. Parlant leur langue maternelle, il s'emparèrent de Nin, qu'ils firent monter dans une camionnette pour l'assassiner. Si de nombreux conseillers soviétiques furent rappelés dans leur pays pour comparaître devant un tribunal qui les condamna à la peine de mort, ce fut pour les empêcher de parler de cette affaire que Staline avait classée "secret d'Etat". » Le chef du commando d'interception, le capitaine du NKVD Leonid Navitsch, disparut lui-même quelque temps plus tard. Staline n'aimait décidément pas laisser de témoins.
P. V National Hebdo du 1er au 7 mai 1997

mardi 10 février 2009

REFLEXIONS SUR LE LIVRE « LE CHOC DES CIVILISATIONS » de Samuel Huntington

Il faut commenter ce livre qui est sans doute l'un des plus intéressants depuis l'œuvre « le déclin de l'Occident » de Spengler. Ce livre est manifestement le résultat d'une réflexion de plusieurs dizaines d'années d'un homme entouré de collaborateurs. Lorsqu'on le lit attentivement, la thèse de Fukuyama sur la fin de l'Histoire semble à côté bien légère, lecture faussement brillante de Hegel.
Certains rejettent la thèse du choc des civilisations comme un gadget car c'est une vision conflictuelle de l'homme ou des hommes entre eux. Cela ne cadre pas avec la pensée unique du village global composé de citoyens du monde.
Pour eux, les hommes sont interdépendants, donc ne peuvent s'opposer comme si chacun n'avait pas fait l'expérience dans sa vie qu'on est souvent plus interdépendant de son ennemi que de son ami. Huntington a répertorié tous les conflits qui ont existé sur la planète depuis la fin de la seconde guerre mondiale et surtout depuis la fin de la guerre froide et on retrouve pratiquement toujours des conflits entre civilisations. Lorsque François Mitterrand déclarait « le nationalisme, c'est la guerre » on a là une réflexion caractéristique d'un homme qui pensait le monde avec une ou deux générations de retard, encore prisonnier intellectuellement de son passé. Il n'y a plus de guerres entre nations en tant que telles, mais entre civilisations qui s'entrechoquent.
Pour Huntington, l'homme est défini par sa race, sa religion, sa culture et civilisation. Le critère le plus important selon lui est la religion, en tout cas des déterminismes autrement plus puissants que ceux de Bourdieu. Cette idée n'est pas nouvelle ni vraiment originale. Ce n'est certes pas ce qu'on apprend à l'école de la République qui a toujours nié les origines en voulant construire de façon artificielle un homme abstrait.
Les alliances ou les affinités se font donc sur ces critères. C'est le « Je préfère mes sœurs à mes cousines » de Le Pen à une dimension planétaire. La construction européenne se fait sur des critères d'affinités culturelles plus que sur des critères purement économiques.
La fin des idéologies politiques et non de l'Histoire ne fait que renforcer la thèse de Huntington. La guerre froide Est-Ouest n'a fait que masquer pendant très longtemps des mouvements antagonistes plus fondamentaux. Ou alors faut-il penser comme Heidegger que les religions ne sont que des idéologies.
La critique que l'on peut faire à ce livre est que l'auteur a tendance à réduire l'Occident à l'Europe (surtout de l'Ouest et centrale) et à l'Amérique du Nord.
Pourtant en Amérique du Sud, on peut considérer que certains pays par l'origine de leur population, leur culture et religion appartiennent à l'Occident ou en sont très proches. Quant au monde slavo-orthodoxe, la seule guerre qui fut sanglante avec l'Occident, fut le conflit serbo-croate, heureusement terminé.
Par ses productions culturelles, scientifiques ou artistiques, la Russie a enrichi le patrimoine culturel de l'Occident. Il y a certes un pôle slavo-orthodoxe, longtemps imprégné par le marxisme qui venait de l'Occident, dominé par la Russie mais la différence qui serait basée sur la religion orthodoxe est-elle si forte ? Les Grecs orthodoxes appartiennent à un pays qui est le berceau de l'Occident.
Ceci pose la question ontologique que ne pose peutêtre pas assez Huntington : qu'est-ce que l'être de l'Occident ?
La technologie, le confort matériel ou la licence des mœurs ? ou plus profondément un rapport au savoir hérité des Grecs qui s'oppose aux mythes et aux religions. Ce rapport peut-être scientifique depuis Aristote, philosophique depuis Platon et les pré socratiques. Ce rapport au savoir a permis notre développement technologique et économique. L'Occident est aussi l'importance accordée à l'individu héritée du christianisme et que l'on trouve sous formes diverses dans différents courants politiques et philosophiques : l'anarchisme, le libéralisme et la théorie kantienne, la pensée de Nietzsche et celle de Barres lorsqu'il écrivait « le culte de moi ».
Toutes ces valeurs différent en général de celles de la civilisation asiatique et surtout de l'Islam.
Ces deux civilisations peuvent même s'opposer fortement à l'Occident. Comme le souligne l'auteur américain, l'Islam monte en puissance en raison de sa démographie qu'elle peut exporter, et de la richesse de certains pays producteurs de pétrole. Quant à l'Asie, la réussite économique de nombreux de ses pays, lui permet de plus en plus de rejeter les valeurs occidentales.
Au passage, Huntington ne donne pas beaucoup d'importance à la distinction politiquement correcte entre Islam et Islamisme l'un étant contenu dans l'autre. Mais la grande puissance qui pourra rivaliser avec les États-Unis sera la Chine à la fin du siècle. Les Chinois se définissent eux-mêmes par la race, le sang, la langue, définition de soi qui en rappelle une autre aux Européens.
Pour l'auteur, il n'y a pas de valeurs universelles.
Une civilisation exporte ses valeurs qu'elle objective ou universalise lorsqu'elle a la force économique et militaire pour le faire. Les pays musulmans et asiatiques rejettent donc par leur montée en puissance de plus en plus nos valeurs.
Huntington aborde peu la question de l'immigration même s'il en parle parfois.
Pourtant celle-ci a constitué à créer le choc des civilisations sur le propre sol de l'Occident. Pourquoi notre civilisation occidentale a-t-elle fabriqué sa propre libanisation ?
Les États-Unis étant la puissance la plus forte économiquement et militairement ont imposé les valeurs du melting-pot aux pays européens qui ne le connaissaient pas sans tenir compte des problèmes conflictuels qui pourraient en résulter. On assiste à ce propos à une résurgence de l'Islam dans les banlieues. Le discours des jeunes est donc celui-ci : « Nous sommes musulmans, notre civilisation est supérieure, nous ne serons jamais vous, c'est-à-dire ni des Français, ni des Occidentaux, ni même pour reprendre une terminologie de gauche, des citoyens de la citoyenneté ». La France s'est aussi libanisée sur fond idéologique républicain, laïque, libéral et antiraciste.
On a aussi beaucoup manipulé la jeunesse en utilisant ses bons sentiments et sa naïveté. Le moule de l'école républicaine ne fonctionne plus depuis longtemps.
On peut même dire que l'immigration a plus détruit l'école de la république que celle-ci a transformé les immigrés en citoyens français.
La France est donc en son cœur confrontée à ce choc des civilisations et il ne sert à rien de le nier par aveuglement idéologique. Ce sera son futur défi. Une société multi-culturelle et même multi-civilisationnelle devient fatalement multi-conflictuelle. Le livre de Samuel Huntington, si on prend la peine de le lire même de façon très critique est là pour nous ouvrir les yeux. Ce questionnement fondamental devrait faire partie du débat pendant la campagne européenne.
par P G-S (mai-juin 2004)

lundi 9 février 2009

L'écologie manipulée

La défense de l'environnement, cause noble par elle-même, est mise à toutes les sauces politiques; les Verts allemands s'apprêtent à attaquer le congrès FN de Strasbourg, le gouvernement et Marc lepage utilisent la crainte de la pollution à des fins électorales, et Greenpeace, depuis longtemps est une entreprise idéologique et financière. Quoi de plus touchant qu'un dauphin ou un bébé-phoque ?
Greenpeace s'est bâti une réputation sur ce type de campagne. Mais l'organisation est beaucoup moins respectable que l'on croit. Un jeune journaliste, Olivier Vermont s'est infiltré au sein de la pieuvre du lobby écolo, les témoignages qu'il rapporte sont accablants : on est loin de l'image du baba chevelu censé représenter Greenpeace (entre autres dans les bédés de Franquin et Bucquoy). Outre des complicités idéologiques très douteuses, Greenpeace est une machine à fric digne de la société capitaliste qu'elle honnit tant en paroles, comme le prouve la récente éviction de la responsable de la section française de Greenpeace, Pénélope Komites.
Greenpeace aime le vert, la couleur fétiche des écolos. A la différence près que le vert chéri par l'organisation est plutôt celui des billets américains. Lors de ses pérégrinations au siège de Greenpeace-France, Olivier Vermont trouvera une brochure à l'intention des jeunes : « récolter des fonds, c'est chouette ! » On ne forme jamais assez tôt les jeunes cadres. Amasser de l'argent c'est le seul but de Greenpeace. Ainsi, ceux qui sont chargés de récolter des fonds, les ''fundraiser'', sont virés en cas d'insuffisance de résultat, comme n'importe quel commercial d'une firme multinationale. Les lettres de soutien qui n'apportent pas de fonds partent directement à la poubelle. Les lettres d'enfants connaissent le même sort, mais, « traitement de faveur », leur papier est recyclé.
Greenpeace est une multinationale : elle emploie 1 000 salariés, possède 33 bureaux nationaux et des agents dans 158 pays. Seuls ont le droit de vote au sein de la maison mère les filiales qui offrent 24 % de leurs bénéfices à Amsterdam (le QG de Greenpeace) ; à savoir les sections allemande, australienne, autrichienne, espagnole, américaine, néo-zélandaise, néerlandaise, britannique, suédoise et suisse. Le tiers monde, plus grave, n'a droit qu'à un représentant par continent. La France a perdu sa place en 1987.
$ Greenpeace aime le rouge
Excédé par le comportement des amis de Cohn-Bendit, Franz-Josef Strauss, le taureau de Bavière, avait un jour comparé les écolos aux pastèques, parce qu'ils sont verts à l'extérieur et rouges à l'intérieur. Il est vrai que le patron de Greenpeace, Théo Bode, a des liens très étroits avec les marxistes. Ami personnel de Mikhlaïl Gorbatchev, il n'a accordé que des fonds symboliques (1,3 million de francs) à Greenpeace-Moscou alors que l'environnement est gravement pollué en ex-URSS. Ayant rencontré un vieux militant allemand écœuré de cet état de fait, le journaliste fut emmené par ce dernier en Estonie, afin de constater l'indifférence de Greenpeace aux vrais problèmes. A Paldiski, les Russes font encore fonctionner deux réacteurs nucléaires vétustes. La base de Narva est la quatrième source européenne de pollution. Deux sous-marins nucléaires russes pourrissent dans le port. Les deux centrales électriques, fonctionnant au schiste bitumineux (l'Estonie en fournit 60 % de la production ex-soviétique), rendent toxique l'air de la ville. Dans la mer de Barents, gisent 52 sous-marins nucléaires hors d'usage. 28 590 m³ de déchets radioactifs et 29 095 éléments combustibles usés ont été jetés dans l'eau. Pour avoir dénoncé ce scandale, l'amiral Alexandre Nikitine a été arrêté. Dans l'indifférence totale de Greenpeace... Il est vrai que le responsable de Greenpeace-Moscou, Alexei Lablokov, est membre du cabinet d'Eltsine.
Greenpeace aime aussi Pékin, où Bode avait d'importants contacts dans la hiérarchie du PCC au temps où il travaillait dans le privé, pour les groupes sidérurgiques allemands. Ce qui explique le peu d'empressement que montra Greenpeace a dénoncer les atteintes à l'environnement faites en Chine populaire...
En France, Greenpeace est liée à l'extrême gauche et au parti communiste. Ainsi, elle collabore fréquemment avec le MRAP, le PCF et la LCR et possédait un siège clandestin au... 7 rue du Dragon, dans le fameux squat où les nervis de l'ultra-gauche paradaient. Beaucoup de militants de Greenpeace sont proches de l'extrême gauche, certains Allemands étant par ailleurs liés à des groupes terroristes gauchistes...
$ Greenpeace, not love
Greenpeace est organisée comme un groupe paramilitaire. Les militants du siège parisien sont tenus au silence le plus absolu sur leurs activités, les nouveaux adhérents doivent remplir une véritable fiche de police, avec revenus, niveau scolaire des enfants, sports pratiqués... L'organisation possède son propre réseau de communication (la Greenlink) et tous ses fichiers ordinateurs sont munis de judas. Ainsi, à tout instant, l'on peut savoir si tel ou tel fichier a été ouvert et quand; mais aussi, on peut «contrôler» le texte qui est sur un autre ordinateur, grâce au système File Maker 2.1.
Greenpeace international possède ses propres camps d'entraînement où les militants de choc, équipés de matériel est-allemand, apprennent les techniques commandos. Situé près de Hambourg, le camp principal a formé environ mille hommes, à raison de 50 par «classe». Sous le commandement de Harald Zindler, les sections d'assaut de Greenpeace, essentiellement des Allemands et des Néerlandais, sont soumises à un traitement digne des Marines... : douche froide, nuits blanches, café brûlant, footing en tenue de combat, descente de grues en rappel et... passages à tabac. Les militants reçoivent des cours de guerre psychologique afin de pousser à bout les forces de l'ordre, attirer la répression et ainsi jouer les martyrs.
Greenpeace se livre aussi au fichage et à l'espionnage : elle possède les plans de l'Elysée, y compris les heures des rondes et l'identité des 252 gardes républicains ; elle peut se procurer n'importe quel numéro de téléphone sur la liste rouge, elle possède des fichiers sur tous les élus de l'Assemblée nationale et du Sénat, des journalistes « aux ordres » dans divers journaux (Le Figaro, Le Monde, Libération, The Times et bien sûr Charlie Hebdo). Plus inquiétant, elle possède une équipe de sabotage à la centrale nucléaire de Paluel (Seine-Maritime) ; et ses liens avec le groupe UDB, des indépendantistes bretons, lui permettent d'avoir des renseignements sur les bases de Brest et Saint-Nazaire. Autres informations sensibles détenues par Greenpeace : la liste des agents de la DGSE ayant coulé le Rainbow Warrior (nom de combat inclus), la liste des ouvriers ayant construit le SNLE Triomphant et la liste du personnel de la FOST et du centre de la Hague !
Pour émouvoir l'opinion publique et récolter plus de fonds, Greenpeace n'hésite pas à filmer des images d'animaux mis à mort... par leurs propres soins. Ainsi, le cinéaste islandais Magnus Gudmunsson révéla la supercherie dans deux films, Survival in the high north et Reclaiming paradise. Pour les besoins de la cause, Greenpeace a massacré des bébés phoques, assassiné un bébé dauphin et, dans le film Good bye Joey, torturé à mort des kangourous.
$ Tortionnaires, menteurs, escrocs
Les « cautions scientifiques » de Greenpeace sont douteuses : le CNRS, dont les membres n'ont de savants que le nom (on trouve même une disciple du gourou de la secte de Mandarom). Selon le journaliste, les dossiers de Greenpeace ne sont que poudre aux yeux : ainsi, la soi-disant « augmentation massive des cas de tyroïde » en PACA suite à Tchernobyl ne repose sur aucun éléments sérieux et a été contesté par l'ensemble du corps médical.
Les deux autres «arnaques» de Greenpeace sont la fameuse voiture Gringo et le frigo Greenpeace. La Gringo fut ni plus ni moins que le vol caractérisé de la voiture à faible consommation « Vesta 2 » mise au point par Renault en février 1993. Mais comme pour le Concorde, les Français avait été plus malins que prévu et Greenpeace ne put jamais percer les secrets du moteur. Coût de l'opération : 8,5 millions de francs pour un échec total. Quant au frigo «écologique» de Greenpeace, fabriqué par l'entreprise est-allemande Foron, n'eut pour acheteur... que la Chine populaire. Greenpeace n'hésite pas à s'allier avec lkéa, pilleur des forêts tropicales et exploiteurs d'enfants (selon le journaliste... ) et a passé un contrat avec Daimler : achat du coton de Greenpeace-Australie contre silence sur sa pollution... Obsédé par l'argent, Greenpeace n'hésite pas à gruger ses militants : l'un de ses fondateurs, David Mac Taggart, a volé la fortune de sa troisième femme.
L'opération d'achat de parcelle de terre pour s'opposer au tunnel de Somport profita surtout à Greenpeace. De plus, sur chaque billet de 100 francs versés à l'organisation, seul 6 francs servent à la protection de l'environnement. Le vrai visage de Greenpeace, qui survient après le scandale de l'ARC... montre que la pollution, à l'instar du racisme et du cancer, fait vivre beaucoup plus gens qu'elle en tue...
✍ Henri de FERSAN National Hebdo Semaine du 13 au 19 mars 1997
L'illustration de Greenpeace vu par Franquin est dans Gaston Lagaffe n° 14 : La saga des Gaffes.

Vercingétorix : quand la Gaule défiait Rome

Alors que l’imagerie d’Épinal nous présente « nos ancêtres les Gaulois » comme un peuple de barbares chevelus et moustachus, depuis quelques années, celtologues et historiens remettent « les pendules à l’heure ». Ce ne sont pas les Romains, généreux dispensateurs de civilisation, on le sait, qui ont fait des Gaulois un peuple cultivé et civilisé. Les peuples celtes avaient leur propre civilisation, hautement complexe, avec leur hiérarchie, leur religion, leurs médecins, leurs architectes et leurs héros…
C’est de Marseille, comptoir gréco-celtique, que va partir toute la conquête romaine en Gaule. Pendant les guerres puniques, la cité phocéenne, craignant de voir sa force maritime supplantée par celle des Carthaginois, se fait l’alliée de Rome, alliance qui se renouvelle en 154 et en 126 avant J.-C., quand Marseille appelle les Romains à la protéger des tribus celtes environnantes. Ayant pris pied en Gaule, il ne fallut pas longtemps aux Romains pour annexer toute la côte de la Provincia. Et, au Ier siècle avant J.-C., profitant des perpétuelles divisions entre Gaulois, ils ont déjà annexé la Provence, le Languedoc-Roussillon et les rives du Rhône jusqu’à Lyon.
C’est vers cette époque que, pour les Gaulois qui sont plus des agriculteurs que des guerriers, le danger germain se fait de plus en plus précis. Et, en 58 avant J.-C., les Éduens, installés dans le Nivernais et la Bourgogne et depuis longtemps alliés de Rome, font appel aux légions afin de repousser les hordes d’Arioviste le Germain. C’est donc César, alors proconsul de la Gaule romaine, qui prend la tête des armées romaines…
Arioviste est effectivement repoussé hors des frontières gauloises mais pour le proconsul l’occasion est trop belle : à court d’argent et de gloire, César entame la conquête de la Gaule indépendante …
Les premiers à se révolter sont les tribus belges, extrêmement importantes et puissantes mais, jouant sur leur division, César les soumet sans grande difficulté. Les Armoricains tenteront, eux aussi, de repousser les légions romaines, sans plus de succès et, en 52 avant J.-C., César semble bien avoir conquis toute la Gaule.
C’est alors qu’un jeune chef arverne décide de « bouter » les Romains hors de Gaule… il s’appelle Vercingétorix !
L’histoire a très peu de sources sur ce grand personnage qu’est Vercingétorix et, fait incroyable, c’est uniquement grâce aux Commentaires de son ennemi César que son nom n’est pas tombé dans l’oubli.
Son père, Celtill, était à la tête des Arvernes, le plus grand peuple de Gaule, et avait, selon le général romain, obtenu le « principat de toute la Gaule ». Mais son ambition était trop grande et, parce qu’il avait voulu devenir roi, il fut envoyé au bûcher.
Mais quel est donc ce « principat » alors que César certifie qu’il n’y avait aucune unité entre les différents peuples de Gaule ? Certains historiens avancent l’hypothèse qu’il ne pouvait s’agir que d’un « principat » religieux, le druidisme étant le seul lien commun à tous les Gaulois… Cette thèse est intéressante et expliquerait la facilité avec laquelle Vercingétorix fédérera toute la Gaule, ce qu’il n’aurait pu faire avec l’opposition des druides. Vercingétorix reprendra donc l’idée de son père pour qui la survie de la Gaule ne pouvait se faire que dans l’unité.
« L’ami de Rome »
Quand il prend la tête de la révolte arverne, en 52 avant J.-C., Vercingétorix est loin d’être un inconnu pour le proconsul Caïus Julius César…
En effet, durant plusieurs années, le jeune chef arverne combat dans les armées de César en tant qu’auxiliaire. Il y acquiert l’art de la stratégie et la connaissance approfondie de la prodigieuse machine de guerre romaine.
Désigné au titre « d’ami de Rome », selon Dion Cassius, il est surtout proche de César qui cherche à mettre sur les trônes gaulois des hommes qui lui sont totalement dévoués. Et Vercingétorix, César le sait, est un des plus importants chefs arvernes. Sa famille est riche, il a hérité des nombreux clients - au sens romain du terme - de son père et possède un formidable talent d’orateur qui peut lui rallier tous les autres chefs. C’est ce qu’il fera… contre César !
Quand il prend la tête de la révolte, Vercingétorix a une vingtaine d’années. Il a une haute stature, un visage imberbe, comme en témoignent les pièces de monnaies qui le représentent, et possède, au plus haut point, l’art de la stratégie. Aussi attendra-t-il le départ de César à Rome pour lancer la révolte.
Les intérêts politiques du proconsul le rappelaient à Rome, aussi César quitte-t-il la Gaule au début de l’année 52 av. J.-C., laissant ses légions dans leurs quartiers d’hiver, dans le Nord, pour surveiller les Belges, et dans la Provincia. C’est le signal de la révolte.
Réunis dans la forêt des Carnutes, près de Chartres, les députés des nations gauloises font le serment de repousser l’envahisseur romain. À deux cents kilomètres de là, en Auvergne, le jeune Vercingétorix bat le rappel de tous les guerriers arvernes et, à Gergovie, sa capitale, se pose en chef de la révolte. Puis, il envoie des ambassades dans toutes les républiques gauloises afin de les rallier à sa cause.
Tout va alors très vite : Lucter, du Quercy, lui gagne le Rouergue et occupe pour lui le Lot et le Gévaudan, aux frontières de la Gaule romaine, avant de pénétrer en Provence et en Languedoc ; pendant ce temps, Vercingétorix, profitant de la division des forces ennemies, marche sur les camps d’hiver des Romains, dans le Nord.
Mais César, averti du danger, ne tarde pas à reparaître…
La Gaule, terre brûlée
A la tête de ses légionnaires, le proconsul romain stope l’avance des Gaulois de Lucter, les repousse hors de Provence et décide d’éteindre la révolte dans l’œuf. Elle a commencé en Auvergne, c’est l’Auvergne qu’il attaquera ! Risquant le tout pour le tout, César franchit les Cévennes enneigées en plein hiver et fond comme un aigle sur le sud du pays.
Mais, grâce à un excellent système de routes praticables, il ne faut que quelques jours au chef arverne, alors aux environs d’Avaricum (Bourges), pour rebrousser chemin. Voyant cette armée considérable marcher sur lui, César, à la tête de ses huit légions, quitte l’Auvergne et se réfugie précipitamment chez les Éduens, ses alliés de toujours, avant de s’emparer de toutes les grandes villes gauloises qu’il croise sur sa route.
Vercingétorix, quant à lui, sait déjà qu’il ne pourra pas affronter les tacticiens romains en rase campagne : il préfère les harceler. Appliquant une politique de terre brûlée, il affame les Romains et les pousse à la faute.
Le premier affrontement a lieu à Noviodunum (Nevers). César vient d’accroître son prestige en s’emparant d’Orléans quand les guerriers gaulois fondent sur ses légionnaires. La victoire semble acquise quand le Romain, désespéré, tire sa « dernière cartouche » : il envoie à l’assaut la terrible cavalerie des Germains… Les Gaulois plient et se retirent, dépités. Mais cela ne fait que confirmer la stratégie de Vercingétorix qu’il déploiera à Avaricum (Bourges).
La capitale des Bituriges était, selon les dires de ses habitants, « la plus belle cité de Gaule » : aussi supplièrent-ils le chef arverne de l’épargner. Craignant, en anéantissant cette cité, de s’aliéner les grandes tribus gauloises, Vercingétorix cède de mauvais gré. Immédiatement après, César met le siège devant Avaricum…
La cité des Bituriges est presque totalement entourée de marécages et seul le sud est dégagé, laissant un étroit passage pour l’atteindre. C’est là que César prend position et entame le siège… sous l’étroite surveillance de l’armée gauloise qui s’est établie sur des buttes, à quelques kilomètres au sud. Et d’assiégeant, César devient vite l’assiégé…
Privés de vivres par les Gaulois, harcelés dans leurs fortifications, les Romains sont près de capituler quand Vercingétorix, qui peine de plus en plus à discipliner son armée, décide l’évacuation de la ville par le nord et la destruction de tous les vivres. Selon les dires de César lui-même, ce sont les cris des femmes et le grand tumulte qui accompagnait l’évacuation qui lui ouvrit les yeux. Comprenant le stratagème, il rassemble ses légionnaires et, dans un ultime effort, s’empare de la ville.
Ce qui pourrait paraître comme le premier échec important de l’Arverne va se transformer en gloire pour Vercingétorix. N’avait-il pas conseillé de détruire la ville ? N’a-t-il pas prouvé la valeur de sa politique de terre brûlée ? Au lieu d’être hué, l’Arverne est littéralement acclamé et définitivement reconnu comme le chef suprême de la révolte. Avaricum est une victoire politique… Gergovie sera une victoire militaire !
Le bouclier arverne
Avaricum prise, César peut croire à la victoire. Il se sépare de quatre légions, qu’il place sous les ordres de son lieutenant, Labiénus, avec ordre de juguler la révolte des Parisiens, et se dirige vers la capitale arverne. À Gergovie, il espère porter un coup fatal à l’insurrection.
Vercingétorix, qui ne démord pas de sa stratégie, tente d’épuiser son adversaire. Longeant la rive gauche de l’Allier, il coupe tous les ponts, obligeant les Romains à descendre toujours plus au sud pour trouver un gué. Le printemps est là et la montée des eaux semble un rempart idéal pour les Gaulois. Mais le rusé proconsul finit par prendre les Gaulois par surprise et, traversant la Limagne, se précipite vers Gergovie. Quand il arrive, Vercingétorix a organisé la défense de la ville et, comme à Avaricum, s’est établi avec Teutomate, chef des Nitiobriges d’Aquitaine et ancien « ami de Rome », sur les hauteurs environnant l’oppidum.
Condamné à installer son campement au pied des Dômes, César fait une cible idéale pour les archers et les cavaliers gaulois qui ne manquent pas une occasion de persécuter ses soldats. Et seul le poste avancé installé sur le piton de la Roche-Blanche permet au Romain d’organiser des attaques et d’assurer une défense relativement efficace.
Alors que César a quitté le camp pour regagner à sa cause les cavaliers éduens révoltés, une première attaque en force des Gaulois manque de débouter les Romains de toutes leurs positions. Une fois de plus, c’est la cavalerie germaine qui retourne la situation… Mais, chaque jour, la position des Romains est de plus en plus précaire, aussi César décide-t-il de faire une dernière tentative.
L’une des portes de l’oppidum, qui donne sur un col en pente douce, a été repérée par César. Vercingétorix, devinant les projets du Romain, met hâtivement cette porte en état de défense maximale.
Le jour de l’attaque, César, qui a suivi les mouvements des troupes gauloises, feint d’attaquer le col tout en envoyant le gros de ses troupes à l’assaut de l’oppidum, là où sont installés les guerriers de Teutomate…
Pris de vitesse, l’Aquitain n’a que le temps d’avertir Vercingétorix qui revient à bride abattue sur l’oppidum. Quand il arrive, les premiers assaillants escaladaient déjà le mur d’enceinte. Emportés par une fureur destructrice, les Gaulois les massacrent et César doit se replier précipitamment derrière les tranchées de son camp. Peu après, il abandonne le siège…
La nouvelle se propage alors comme une traînée de poudre. Dans toute la Gaule, le nom de Vercingétorix, vainqueur de César et libérateur du pays, est sur toutes les lèvres !
Le combat des chefs
Après ce « coup de pub » extraordinaire, les nations gauloises les plus hésitantes, y compris les Éduens, se joignent comme un seul homme derrière le vainqueur de Gergovie.
L’armée de César, renforcée par les quatre légions de Labiénus, met le cap sur l’Italie. Menacé de tous côtés, condamné à louvoyer, César dirige son armée sur la Saône quand il est intercepté par Vercingétorix, venu en droite ligne de Bibracte, où il a été reconnu par tous comme unique chef de la nouvelle unité gauloise lors d’une assemblée extraordinaire de tous les chefs gaulois.
Gardant à ses côtés les hommes nécessaires au harcèlement des légions romaines, Vercingétorix disperse les autres avec pour mission de conquérir les provinces romaines de Gaule. Peu après, d’ailleurs, le Languedoc et le Vivarais sont occupés…
C’est sur les bords de l’Ouche que se situe la rencontre des deux armées. Là, à la vue de l’armée en fuite, Vercingétorix enflamme le cœur de ses hommes :
- Les Romains, leur dit-il, s’enfuient dans leur province et abandonnent la Gaule. C’est assez pour assurer la liberté du moment mais trop peu pour la paix et le repos de l’avenir ! Ils reviendront avec de plus grandes forces et la guerre sera sans fin !
Frissonnant d’ardeur guerrière, les chefs de la nombreuse et superbe cavalerie gauloise, que Vercingétorix a désignés pour mener l’assaut, prêtent serment devant les dieux : ils ne regagneront leur toit et leur famille qu’après avoir traversé deux fois, de part en part, la colonne ennemie !
Les Gaulois chargent l’arrière-garde romaine, donnant l’assaut sur trois flancs. Mais c’est alors qu’apparaissent… les redoutables cavaliers germains ! Le combat traîne en longueur, la résistance est farouche et César, à la tête d’une troupe de choc, porte tour à tour secours aux hommes les plus en difficulté. Lui-même manque de finir prisonnier ! Saisi à bras-le-corps par un solide géant gaulois, il ne doit la liberté qu’au manque de discernement du guerrier qui croyait ne tenir qu’un vulgaire officier. Seule l’épée du Romain restera sur le champ de bataille…
Finalement, l’acharnement des auxiliaires germains fait tourner l’avantage. Attaquant, massacrant, ils forcent les Gaulois à la retraite. Alors, c’est la débandade !
Atterré par cette cuisante défaite, Vercingétorix se replie précipitamment dans la forteresse d’Alésia, ancien lieu sacré de la Gaule. Mais les dieux semblent avoir abandonné le chef arverne… Poursuivant les fuyards, César entreprend d’affamer les assiégés.
Un nouvel échec de la cavalerie gauloise face aux Germains convainc Vercingétorix de transformer ses cavaliers en estafettes : l’appel au secours du jeune chef résonne bientôt à travers toute la Gaule…
Mais à peine les cavaliers ont-ils traversé les lignes romaines que César met en branle un formidable système de fortifications et de tranchées.
Trois fossés de quinze pieds de large et de profondeur entourent l’oppidum, l’un rempli d’eau, l’autre hérissé de pieux. Derrière ces fossés, s’élèvent le terrassement et la palissade du campement, elle aussi protégée de pieux acérés. Enfin, d’autres fossés ou puits, tapissés de pieux aigus, de pointes de fer, recouverts de terre et de branchages, sont creusés sur environ huit rangs. Ceci achevé, César ordonne la même disposition de l’autre côté du camp, pour parer à une éventuelle attaque des troupes de secours.
Alésia est verrouillée…
L’ultime bataille
En moins d’un mois, l’armée de secours, réunie sous le commandement de Comm « l’Artebate », ou « l’Artésien », rejoint Alésia à marche forcée.
Quand ils arrivent enfin en vue de l’oppidum, les assiégés, qui n’ont plus de vivres, ont dû expulser les habitants de la ville, hommes, femmes et enfants. Perdus dans le no man’s land qui sépare les deux adversaires, les Mandubiens imploreront la grâce de César… en vain !
À l’arrivée de Comm, les assiégés reprennent courage et, dans un dernier sursaut d’énergie, se lancent à l’attaque. Pris entre deux feux, les Romains résistent tant bien que mal aux ravages que font les archers gaulois dans leurs rangs, jusqu’à l’arrivée… des cavaliers germains ! « Massés en un seul point, en escadrons serrés, les cavaliers germains chargent l’ennemi et le refoulent » puis ils isolent les archers et les massacrent un à un…
Une deuxième attaque a lieu de nuit : c’est un nouvel échec et, au lever du jour, César, satisfait, peut contempler les pièges et les chausse-trappes jonchés de corps empalés. César a prouvé son génie militaire mais il semble que les forces gauloises soient inépuisables et, le troisième jour, environ cinquante mille nouveaux guerriers surgissent du nord de la ville et lancent un ultime assaut.
Les Gaulois se déploient sur tout le nord et l’ouest des fortifications, sachant pertinemment que le proconsul ne pourra résister à une attaque d’une telle ampleur à l’intérieur et à l’extérieur du siège. Pourtant, une fois de plus, les Romains sont sauvés par les Germains qui prennent l’armée de secours à revers et la mettent en pièces.
Les lauriers de César
Les vivres sont épuisés et le désespoir s’est emparé des assiégés après cette dernière défaite. Une seule chose pourra sauver les Gaulois révoltés : le sacrifice du chef.
Alors que tous les chefs gaulois se rendent, désarmés et vaincus, à César, le proconsul voit se présenter celui qui lui a tenu tête neuf mois durant. Paré de ses plus beaux ornements, Vercingétorix, dans le silence le plus complet, jette ses armes aux pieds de son vainqueur…
Six ans plus tard, lors du triomphe de César, les Romains peuvent contempler le fier guerrier, tout juste sorti de la prison Mamertine, enchaîné et amaigri. Le lendemain, il est exécuté…
Ainsi finit le héros de nos siècles anciens, conclut Henri Martin ; ainsi tomba cette première France qu’on appelait la Gaule…
Ecrit par Alix Ducret 28-10-2008 - http://www.historia-nostra.com/

dimanche 8 février 2009

Honorer d'Estienne d'Orves plutôt que Guy Môquet


L'hommage rendu aux résistants tombés pour libérer le sol de la patrie ? Quel Français pourrait ne pas s'y associer ? Encore faudrait-il ne pas cautionner les mythes forgés par le parti communiste. En choisissant de faire de Guy Môquet une icône, Nicolas Sarkozy s'est fourvoyé. Et entraîne la jeunesse française dans une grave erreur «mémorielle».
Cela restera la première décision de Nicolas Sarkozy en tant que président de la République. La dernière lettre écrite par Guy Môquet, avant son exécution, sera lue chaque année dans les lycées français. Lettre bouleversante rédigé par un garçon de dix-sept ans qui n'a plus que quelques heures à vivre : « Ma petite maman chérie, mon tout petit frère adoré, mon petit papa aimé, Je vais mourir ! Ce que je vous demande, toi, en particulier ma petite maman, c'est d'être courageuse. Je le suis et je veux l'être autant que ceux qui sont passés avant moi. Certes, j'aurais voulu vivre. Mais ce que je souhaite de tout mon cœur, c'est que ma mort serve à quelque chose. [ ... ]17 ans et demi. Ma vie a été courte ! [ ... ] Maman, ce que je te demande, ce que je veux que tu me promettes, c'est d'être courageuse et de surmonter ta peine. Je ne peux pas en mettre davantage. Je vous quitte tous, toutes, toi Maman, Serge, Papa, je vous embrasse de tout mon cœur d'enfant. Courage ! Votre Guy qui vous aime. »
Communiste et résistant, ça n'allait pas de pair
Guy Môquet repose dans l'au-delà depuis le 22 octobre 1941. Ignorant l'histoire de France, Nicolas Sarkozy aurait mieux fait de ne pas troubler sa quiétude éternelle. Cela aillait évité de rappeler une vérité qui ne correspond pas à l'hagiographie officielle. Guy Môquet n'a jamais été résistant. Il était communiste. Et contrairement à la légende entretenue depuis 1945, les deux termes n'ont pas toujours été synonymes. Le 23 août 1939, l'Allemagne de Hitler et l'Urss de Staline signent un pacte de non-agression. Le Parti communiste français s'aligne sur le grand frère soviétique. L'Allemagne nazi cesse d'être l'ennemie. La collusion est telle que le 26 septembre, le conseil des ministres, présidé par Edouard Daladier, prononce la dissolution du parti après avoir, le 27 août, suspendu tous ses journaux. Le 6 octobre, Maurice Thorez, secrétaire général du parti, déserte pour rejoindre Moscou. Quatre jours plus tard, Prosper Môquet, député communiste du XVIIe arrondissement de Paris, et père de Guy, est arrêté avant d'être, l'année suivante, déchu de son mandat et envoyé dans un camp de prisonniers en Algérie.
Le 9 janvier 1940, alors que les soldats français sont mobilisés, la Chambre des députés, présidée par Lévy-Alphandéry, se lève pour leur rendre hommage. Les quatre députés communistes présents restent assis. L'émotion est intense. Les plus choqués sont les socialistes qui, sous les ordres de Max Lejeune, se jettent sur eux et les expulsent de la chambre sans ménagement. Le PCF n'en continue pas moins sa propagande contre ce qu'il appelle « la guerre impérialiste » à l'égard de l'Allemagne. Dans les usines d'armement, il encourage le sabotage du matériel militaire que de nombreux soldats français paieront de leur vie au cours de la campagne de France. Après l'entrée des Allemands à Paris le 14 juin, l'appareil clandestin du parti entreprend des démarches auprès des forces d'occupation pour que «L'Humanité» soit autorisée à reparaître. Mais la police française, qui traque les communistes depuis le début de la guerre, intervient et fait échouer le projet.
C'est dans ce contexte de connivence entre le PCF et l'occupant nazi que Guy Môquet, lycéen au lycée Carnot et militant des jeunesses communistes, est arrêté le 13 octobre 1940 au métro Gare de l'Est par des policiers français. Emprisonné à Fresnes, puis à Clairvaux, il est transféré au camp de Châteaubriant en Loire-Atlantique, où sont détenus d'autres militants communistes. Guy Môquet n'a donc pas été arrêté pour faits de Résistance, mais pour avoir suivi, avec toute la naïveté d'un garçon de son âge, la position de trahison et de collaboration du PCF. C'est ce dernier, n'en déplaise à Marie-George Buffet, qui l'a conduit au poteau d'exécution.
Les premiers résistants étaient de droite
Le 22 juin 1941, l'Allemagne attaque l'Union soviétique. Le PCF, qui ne détermine pas sa ligne politique en fonction des intérêts français mais uniquement par rapport au pays des Soviets, se décide enfin à entrer dans la Résistance. Cela fait près d'un an que les premiers réseaux se sont constitués avec hommes et des femmes issus, pour la plupart, des rangs de la droite ou de l'extrême droite. En fait de résistance, celle du PCF consiste essentiellement en des assassinats destinés à enclencher le cycle infernal des représailles. C'est ainsi que le 20 octobre, Karl Hotz, commandant des troupes d'occupation de la Loire-inférieure, est exécuté à Nantes par trois jeunes communistes. Les Allemands ripostent en exigeant que des otages leur soient livrés. Le ministre de l'Intérieur, Pierre Pucheu, en sélectionne vingt-sept à Chateaubriant. Parmi eux figure Guy Môquet. Le 22 octobre, ce dernier et ses vingt-six compagnons d'infortune, meurent avec courage. Pour épouvantable que soit ce drame, il n'a aucun rapport avec la Résistance.
Si Nicolas Sarkozy avait vraiment souhaité faire découvrir à la jeunesse française les dernières lignes d'un fusillé de la Résistance, il aurait pu se rapprocher d'Alain Griotteray, fondateur du réseau Orion, et auteur du livre 1940, La Droite était au rendez-vous, Qui furent les premiers résistants ? (Robert Laffont, 1985). Il y aurait appris la légende du parti « des 75 000 fusillés ». Il aurait découvert qu'en 1940, les premiers résistants appartenaient aux courants légitimiste, maurrassien ou nationaliste. Il aurait entendu parler du premier résistant tombé sous les balles allemandes. Un grand Français. Un militaire de belle lignée. Un martyr de grande race. Lui qui, pendant sa campagne électorale, a découvert, à 53 ans, que les cathédrales et la foi catholique ont façonné l'Histoire de France aurait pu présenter une belle figure de l'héroïsme français. Mais connaît-il seulement le nom du lieutenant de vaisseau Honoré d'Estienne d'Orves ?
Dès le mois de septembre 1940, celui-ci, qui a pour devise « Dieu et le Roy », rejoint Londres et se rallie au général De Gaulle. Le 21 décembre, il passe en France sur le chalutier Marie Louise et prend la tête du réseau Nemrod sous le nom de Jean-Pierre Château-Vieux. Un mois plus tard, il est arrêté à Nantes par les Allemands. Son calvaire va commencer. Transféré dans un cachot de la prison du Praesidium à Berlin, il est renvoyé à Paris le 26 février pour être interné à la prison du Cherche-Midi. Refusant de se mettre au garde-à-vous devant la sentinelle allemande, il est rossé, privé de nourriture et enfermé dans le noir. Pâques approche. Il peut écrire à sa famille. Ses lettres témoignent d'un merveilleux optimisme. Son secret tient en un seul mot : Dieu. Son isolement est rompu tous les huit jours par la rencontre avec l'aumônier allemand Franz Stock qui, en décembre, a accompagné Jacques Bonsergent au poteau d'exécution.
Le 13 mai, son procès s'ouvre. Face à ses juges, Honoré d'Estienne d'Orves couvre ses camarades arrêtés avec lui : « Laissez ces hommes en liberté. Renvoyez-les chez eux, ils sont innocents. C'est moi le coupable. Il n'y a que moi qui savais, je les ai dupés. » Son attitude force le respect de la cour. Mais les lois de la guerre sont sans pitié. Le 26 mai, l'officier français et huit de ses compagnons sont condamnés à mort pour espionnage. Chacun fait preuve d'une extraordinaire dignité. Le président de la cour qui a prononcé le verdict, Keyser, ne peut dissimuler son émotion. Il se lève, s'avance vers les condamnés à mort, et leur serre chaleureusement la main.
Le 9 juin, Honoré d'Estienne d'Orves est transféré à la prison de Fresnes. Il faut désormais attendre la mort. Que faire, si ce n'est prier celui devant lequel il devra bientôt se présenter. Tout n'est pourtant pas perdu. Le gouvernement de Vichy multiplie les démarches auprès des autorités allemandes pour obtenir la grâce des condamnés. Le chef de la délégation auprès de la commission allemande d'armistice proteste contre ces condamnations : « Tous sont dignes d'intérêt. L'exécution de la sentence dont ils sont l'objet ne manquerait pas de soulever une émotion considérable et ne pourrait que nuire à l'œuvre d'apaisement des esprits à laquelle nous sommes l'un et l'autre attachés. » De son côté, l'amiral Darlan multiplie les requêtes.
« Papa n'a eu qu'un but : la grandeur de la France »
Les autorités allemandes acceptent finalement la grâce de cinq des condamnés, mais restent intraitables pour trois d'entre eux, dont Honoré d'Estienne d'Orves. Celui-ci est près. Il rédige son testament : « Si je dois mourir, sachez que c'est en pleine confiance en Dieu qui me donne abondamment sa grâce. La pensée de mes chers parents qui m'attendent là-haut m'est d'un grand réconfort [ ... ] Je ne puis préjuger de l'avenir, et affirmer dès maintenant si, dans mon action, j'ai eu tort ou raison. Mais j'affirme solennellement que je n'ai agi que pour la France et la France seule. Je n'ai eu en vue que la libération de notre patrie. Je crois avoir suivi la tradition de fidélité de notre famille et me suis inspiré de l'exemple de nos grands-pères d'Autichamp et Suzannet, qui ont sacrifié, l'un sa liberté, l'autre sa vie, par fidélité â leur foi [... ] Je crois mériter l'honneur que l'on inscrive sur ma tombe à côté de mon nom : « Mort pour la France » [ ... ] N'ayez à cause de moi de haine pour personne. Chacun a fait son devoir pour sa propre patrie. Apprenez au contraire à connaître et à comprendre le caractère des peuples voisins de la France. »
Il écrit à l'abbé Stock : « Je prie le bon Dieu de donner à la France et à l'Allemagne une paix dans la justice, comportant le rétablissement de la grandeur de mon pays. Et aussi que nos gouvernants fassent à Dieu la place qui lui revient. Je remets mon âme entre les mains de Dieu, et un peu entre les vôtres qui l'avez ces derniers temps représenté auprès de moi ».
Le 28 août, la veille de son exécution, sa dernière lettre est naturellement pour sa femme Eliane :
« Mon sacrifice est fait depuis longtemps. Seuls ces trois mois d'attente avaient ravivé mon espoir et m'avaient fait espérer de revivre auprès de vous tous. Je veux croire que tu supporteras avec vaillance cette épreuve. Nous avons eu, penses-y, le bonheur de nous revoir alors que beaucoup sur les champs de bataille sont morts pour la France sans avoir pu revoir ceux qu'ils aimaient le plus. Je veux que tu continues à mener notre vie courageuse auprès des enfants qui ont besoin de toi. Tu le dois, et la pensée que tu vivras avec eux et pour eux est mon grand réconfort. Je sens que tu me le promets. Tu leur expliqueras ce que j'ai fait, à ces petits, pour qu'ils sachent que leur papa n'a eu qu' un but : la grandeur de la France, et qu'il y a consacré sa vie. »
A quatre heures trente du matin, l'abbé Stock arrive pour célébrer la messe. Les trois condamnés communient avec une ferveur intense et disent ensemble la prière des agonisants. Après l'office, ils déjeunent. Un autocar de la Wehrmacht arrive. Les condamnés embarquent. Le convoi roule pendant une heure en direction du Mont-Valérien. Refusant d'avoir les yeux bandés et les mains ligotées, Honoré d'Estienne d'Orves déclare au président Keyser qui a tenu à être présent pour rendre hommage au courage des condamnés : « Monsieur, vous êtes officier allemand. Je suis officier français. Nous avons tous les deux fait notre devoir, permettez-moi de vous embrasser. » Et alors que le souffle de la mort plane déjà sur le lieu du martyre, les deux hommes s'étreignent.
La salve retentit. Estienne d'Orves s'écroule le premier en s'écriant : « Vive la France ». Puis c'est au tour de ses deux camarades, Maurice Barlier et Yann Doomick, de rejoindre le ciel. Tout est terminé. Nous sommes le 29 août 1941. Les premiers martyrs de la Résistance viennent de tomber. Le lendemain, l'abbé Stock confiera au père de Maurice Barlier : « Je n'oublierai jamais les moments que j'ai passés auprès de ces hommes. C'étaient des héros. Je comprends mieux maintenant ce qu'est la France. »
Honoré d'Estienne d'Orves. L'honneur. Le courage. La droiture. La foi. Le pardon. Dieu. La patrie. Voilà qui aurait eu fière allure pour bénir le quinquennat qui commence.
Thierry Normand Minute du 23 mai 2007

samedi 7 février 2009

3 février 1924 : le poison américain

L'homme qui meurt, le 3 février 1924, a reçu le prix Nobel de la paix en 1919. C'est une de ces tragiques ironies dont l'histoire a le secret. Car peu d'hommes auront provoqué autant de sanglantes catastrophes que lui. Thomas Woodrow Wilson, président des Etats-Unis, est en effet le premier responsable de la Seconde Guerre mondiale.
Commençons par le commencement : Wilson est élu président en 1912. Il doit cette élection à un curieux personnage, le «colonel» House. Grade d'opérette, House n'ayant jamais servi dans l'armée. Fils d'un juif de Hollande ayant d'abord émigré au Mexique, puis aux Etats-Unis, House a un métier typiquement américain : organisateur de campagnes électorales. Intelligent, intrigant, prêt à tout, il manipule avec maestria un électorat et fait élire un gouverneur du Texas, puis un sénateur. Quand Wilson est candidat à la présidence, House prend l'affaire en main et hisse au pouvoir son client. Celui-ci a désormais une éminence grise, omniprésente, qui lui écrit, entre autres, ses discours. Quand Wilson envoie, en 1913, House en mission diplomatique auprès du Kaiser Guillaume Il, il lui écrit cet étonnant mot d'introduction : « Aux Etats-unis, il est la Puissance derrière le Trône » !
Puissance d'autant plus déterminante que Wilson est malléable. Fils, petit-fils et beau-fils de pasteurs presbytériens, victime de fréquentes phases de dépression, il affiche un rigorisme puritain sans faille. « II fit, écrit Bullitt, ses prières à genoux matin et soir pendant toute sa vie. Il lut tous les jours la Bible. Il usa deux ou trois bibles au cours de son existence ». Ces lectures l'ont convaincu qu'il est l'instrument de la Providence. Analysant son profil psychique, Freud insiste sur « son identification en sauveur de l'humanité, qui devint un trait si important et si évident de son caractère dans les dernières années de sa vie ». Quand le même homme est à la tête de la puissance matérielle américaine et se veut la voix de Dieu, les résultats peuvent être dévastateurs. Effectivement, ils vont l'être.
House eut un jour cet aveu : « M. Wilson ne possédait aucune expérience de la politique ». Il fallait donc guider ses pas... A un moment où, la guerre faisant rage en Europe depuis 1914, l'éventuelle intervention des Etats-Unis devrait logiquement s'avérer décisive. Or, dans leur immense majorité, les Américains n'accordaient qu'un faible intérêt aux affaires européennes. Il aurait été d'ailleurs difficile, à la plupart d'entre eux, de situer sur une carte du monde les principaux pays d'Europe. L'opinion américaine était clairement neutraliste et isolationniste. En 1916, la réélection de Wilson à la présidence, obtenue de justesse, se fit sur le slogan électoral « Voter Wilson, c'est voter pour la paix ». A peine réélu, Wilson déclara solennellement devant la Chambre et le Sénat : « Je promets à mon pays de le tenir en dehors de la guerre ». Trois mois plus tard, il lançait les Etats-Unis dans la tourmente. Le «colonel» House avait fait le nécessaire.
Les énormes quantités de matériels américains firent pencher la balance. Mais la victoire alliée était lourde de menaces : en humiliant les vaincus, les traités de paix ne firent que disposer des mines destinées à éclater vingt ans plus tard, provoquant le cataclysme de la Seconde Guerre mondiale. Wilson y fut pour beaucoup. Lui qui, selon Galtier-Boissière, déclarait en 1918, au sujet de la France et de l'Angleterre :
« Lorsque la guerre sera terminée, nous pourrons leur imposer notre manière de voir ».
P.V National Hebdo du 30 janvier au 5 février 1997

vendredi 6 février 2009

La découverte d'un outil recule la présence de l'homme en Europe du Nord


D’anciens outils trouvés en Grande-Bretagne montrent que des humains ont vécu en Europe du Nord 200.000 ans plus tôt qu’on ne le pensait auparavant, à une époque où le climat de l’Angleterre était suffisamment chaud pour accueillir des lions, des éléphants et des tigres à dents de sabre, ont annoncé des scientifiques mercredi.
Les 32 objets en silex noir, trouvés dans les sédiments d’une rivière de l’est de l’Angleterre, datent de 700.000 ans et représentent la première preuve explicite d’une présence humaine au nord des Alpes, disent les scientifiques.
Cette découverte détruit la théorie longtemps soutenue selon laquelle les humains auraient migré vers le nord depuis les climats relativement chauds de la région méditerranéenne il y a seulement un demi-million d’années, disent les scientifiques.
« La découverte que des premiers humains ont pu exister aussi loin au nord il y a si longtemps est sensationnelle », dit Chris Stringer, un paléontologiste du Natural History Museum, l’un des quatre scientifiques britanniques qui ont participé à l’étude et annoncé la découverte dans une conférence de presse à Londres. Leur découverte est exposée en détail dans le journal scientifique Nature.
« Maintenant que nous avons cela, nous pouvons rechercher les restes de ces gens, sachant que nous pouvons les trouver », dit-il. « Leur arrivée en Europe du Nord aurait même pu arriver encore plus tôt. C’est toute une nouvelle zone de recherche qui s’ouvre à nous ».
Jim Rose, un professeur de l’Université de Londres qui a aussi été impliqué dans l’étude, dit que 700.000 ans plus tôt, l’Angleterre était encore reliée au continent européen et qu’elle a connu des périodes de temps clément entre les périodes où d’immenses glaciers recouvraient la région, gelant et modifiant les paysages.
Pendant de tels dégels, dit-il, les premiers humains auraient pu migrer depuis la Méditerranée jusqu’en Angleterre, où il y avait des hivers doux, des paysages plats et de grands fleuves.
Des rhinocéros, des éléphants, des tigres à dents de sabre, des hippopotames et des ours vivaient dans la région à l’époque. Les scientifiques disent qu’ils ne savent pas si les humains utilisaient les outils nouvellement découverts pour tuer des animaux pour se nourrir, ou simplement pour fouiller dans les carcasses abandonnées par les prédateurs.
Les objets suggèrent que les premiers humains n’ont pas colonisé les régions nord de l’Europe, mais simplement étendu leurs habitudes migratoires quand le temps le permettait, disent les scientifiques.
Pakefield, un village côtier 120 miles au nord-est de Londres, est l’une des quelques régions où les glaciers ont préservé, au lieu de les détruire, les sédiments qui contenaient les objets anciens, dit Rose. L’érosion côtière provoque maintenant l’effritement de falaises autour de Pakefield, révélant des fossiles et des objets.
Avant cette découverte, les premières traces d’humains en Europe au nord des Alpes étaient datées d’environ 500.000 ans, et incluaient des objets en silex et même quelques restes humains qui ont été découverts à Bosgrove sur la côte sud de l’Angleterre.
Les premières traces de présence humaine en Europe du Sud sont vieilles d’au moins 800.000 ans et incluent des matériels qui ont été découverts à Atapuerca en Espagne.
Dans un commentaire dans Nature, Wil Roebroeks de l’Université de Leiden aux Pays-Bas, qui n’était pas impliqué dans l’étude, a dit que cette nouvelle preuve d’activité humaine était « solide comme le roc ».
Il a dit que cela montrait que « les premiers humains parcouraient manifestement les rives de ces rivières beaucoup plus tôt qu’on ne le pensait jusqu’ici pour cette partie de l’Europe ».
Roebroeks a dit que les objets n’indiquaient pas une colonisation à grande échelle de l’Europe du Nord, « mais plutôt une brève expansion de leur activité, en accord avec les oscillations climatiques ». Il a dit qu’il était probable qu’« une occupation plus significative des parties nord de l’Europe est survenue seulement plus tard ».
Mais Alison Brooks, une anthropologue de la George Washington University à Washington, qui n’était pas impliquée dans la découverte, a recommandé la prudence.
« On doit toujours être sceptique, étant donné que les affirmations précédentes de première présence humaine en Europe du Nord ont eu des problèmes avec la date ou l’authenticité des objets trouvés. Si des trouvailles ultérieures confirment cette découverte, cela serait très excitant et changerait nos idées concernant l’adaptabilité des premiers humains », a-t-elle dit.
Thomas Wagner http://www.voxnr.com/
notes
+ Associated Press – 15 décembre 2005
D’anciens outils trouvés en Grande-Bretagne montrent que des humains ont vécu en Europe du Nord 200.000 ans plus tôt qu’on ne le pensait auparavant, à une époque où le climat de l’Angleterre était suffisamment chaud pour accueillir des lions, des éléphants et des tigres à dents de sabre, ont annoncé des scientifiques mercredi.
Les 32 objets en silex noir, trouvés dans les sédiments d’une rivière de l’est de l’Angleterre, datent de 700.000 ans et représentent la première preuve explicite d’une présence humaine au nord des Alpes, disent les scientifiques.
Cette découverte détruit la théorie longtemps soutenue selon laquelle les humains auraient migré vers le nord depuis les climats relativement chauds de la région méditerranéenne il y a seulement un demi-million d’années, disent les scientifiques.
« La découverte que des premiers humains ont pu exister aussi loin au nord il y a si longtemps est sensationnelle », dit Chris Stringer, un paléontologiste du Natural History Museum, l’un des quatre scientifiques britanniques qui ont participé à l’étude et annoncé la découverte dans une conférence de presse à Londres. Leur découverte est exposée en détail dans le journal scientifique Nature.
« Maintenant que nous avons cela, nous pouvons rechercher les restes de ces gens, sachant que nous pouvons les trouver », dit-il. « Leur arrivée en Europe du Nord aurait même pu arriver encore plus tôt. C’est toute une nouvelle zone de recherche qui s’ouvre à nous ».
Jim Rose, un professeur de l’Université de Londres qui a aussi été impliqué dans l’étude, dit que 700.000 ans plus tôt, l’Angleterre était encore reliée au continent européen et qu’elle a connu des périodes de temps clément entre les périodes où d’immenses glaciers recouvraient la région, gelant et modifiant les paysages.
Pendant de tels dégels, dit-il, les premiers humains auraient pu migrer depuis la Méditerranée jusqu’en Angleterre, où il y avait des hivers doux, des paysages plats et de grands fleuves.
Des rhinocéros, des éléphants, des tigres à dents de sabre, des hippopotames et des ours vivaient dans la région à l’époque. Les scientifiques disent qu’ils ne savent pas si les humains utilisaient les outils nouvellement découverts pour tuer des animaux pour se nourrir, ou simplement pour fouiller dans les carcasses abandonnées par les prédateurs.
Les objets suggèrent que les premiers humains n’ont pas colonisé les régions nord de l’Europe, mais simplement étendu leurs habitudes migratoires quand le temps le permettait, disent les scientifiques.
Pakefield, un village côtier 120 miles au nord-est de Londres, est l’une des quelques régions où les glaciers ont préservé, au lieu de les détruire, les sédiments qui contenaient les objets anciens, dit Rose. L’érosion côtière provoque maintenant l’effritement de falaises autour de Pakefield, révélant des fossiles et des objets.
Avant cette découverte, les premières traces d’humains en Europe au nord des Alpes étaient datées d’environ 500.000 ans, et incluaient des objets en silex et même quelques restes humains qui ont été découverts à Bosgrove sur la côte sud de l’Angleterre.
Les premières traces de présence humaine en Europe du Sud sont vieilles d’au moins 800.000 ans et incluent des matériels qui ont été découverts à Atapuerca en Espagne.
Dans un commentaire dans Nature, Wil Roebroeks de l’Université de Leiden aux Pays-Bas, qui n’était pas impliqué dans l’étude, a dit que cette nouvelle preuve d’activité humaine était « solide comme le roc ».
Il a dit que cela montrait que « les premiers humains parcouraient manifestement les rives de ces rivières beaucoup plus tôt qu’on ne le pensait jusqu’ici pour cette partie de l’Europe ».
Roebroeks a dit que les objets n’indiquaient pas une colonisation à grande échelle de l’Europe du Nord, « mais plutôt une brève expansion de leur activité, en accord avec les oscillations climatiques ». Il a dit qu’il était probable qu’« une occupation plus significative des parties nord de l’Europe est survenue seulement plus tard ».
Mais Alison Brooks, une anthropologue de la George Washington University à Washington, qui n’était pas impliquée dans la découverte, a recommandé la prudence.
« On doit toujours être sceptique, étant donné que les affirmations précédentes de première présence humaine en Europe du Nord ont eu des problèmes avec la date ou l’authenticité des objets trouvés. Si des trouvailles ultérieures confirment cette découverte, cela serait très excitant et changerait nos idées concernant l’adaptabilité des premiers humains », a-t-elle dit.

notes

+ Associated Press – 15 décembre 2005

jeudi 5 février 2009

Le Professeur Gérard Lucotte : « Les races existent, et il est très important que cette diversité soit maintenue »

Depuis les propos tenus par Jean-Marie Le Pen, à l'automne dernier, sur « l'inégalité des races », la question agite la société française. Pas de semaine et presque pas de jour où ce thème n'apparaisse dans la presse écrite ou parlée. Au fil des semaines, la querelle sur l' «inégalité» des races s'est muée en un débat plus fondamental : celui même de l' «existence» ou de la non-existence des races.
Sur la réalité du discours scientifique, sur l'écho conforme ou déformé qui en est donné par les médias et surtout sur l'utilisation qui en est faite à des fins politiques, nous avons voulu faire le point avec un spécialiste de la question. Nous avons donc rencontré le Professeur Gérard Lucotte, professeur à l'Ecole d'anthropologie de Paris.

❏ National Hebdo - Professeur, nous assistons depuis plus de deux mois maintenant à une querelle qui dépasse très largement les experts dont vous êtes. On veut, en gros, classer la société française en deux camps opposés : les fascistes qui croient à l'existence des races et les généreux bien pensants qui n'y croient pas. Le camp politiquement correct a un porte-parole : c'est le professeur Langaney, auquel les médias tentent de vous opposer. Comment expliquez vous cela ?
❍ Pr Lucotte : Simplement. La question des races est un problème d'anthropologie biologique. Or, il n'y a en France que deux professeurs dans cette discipline : André Langaney et moi-même.

❏ Le journal Le Monde, récemment (15/16 décembre), dans un papier qui cherchait apparemment à vous discréditer et auquel vous avez répondu par une mise au point, écrivait : « le professeur Lucotte qui enseigne dans un établissement privé ». Cela pour vous opposer, sans doute, au sérieux de l'établissement public où officie le Pr Langaney, à savoir le Musée de l'homme. Alors, dites-nous : qui fait quoi ?
❍ L'Ecole d'anthropologie de Paris a été créée par Broca, un immense anthropologue français, en 1875. C'est un établissement, reconnu d'utilité publique, d'enseignement supérieur des sciences anthropologiques. Le Musée de l'homme, lui, n'a pas, que je sache, vocation d'enseignement. Son domaine est la muséologie et M. Langaney s'y occupe principalement des expositions. J'ajouterai néanmoins qu'il y a un professeur qui enseigne l'anthropologie biologique au 3ème cycle d'Evolution humaine du Muséum d'histoire naturelle - dont dépend le Musée de l'Homme - et ce professeur n'est pas M. Langaney mais... moi-même, et ce depuis cinq ans.

❏ Le Pr Langaney n'enseigne donc pas ?
❍ Pas en France, en tout cas que je sache. En revanche, il enseigne à Genève depuis de nombreuses années. Je me pose à ce sujet des questions : vous savez que le cumul des fonctions est interdit dans la fonction publique. Comment se fait-il alors que l'administration ne l'ait pas sommé de choisir entre son poste en France et son traitement apparemment très conséquent en Suisse ?

❏ Pour les béotiens que nous sommes, pourriez-vous nous donner une définition de votre discipline : qu'est-ce que l'anthropologie ?
❍ L'anthropologie est la science qui étudie l'homme. On distingue trois grandes branches dans l'anthropologie. Tout d'abord, l'anthropologie physique qui consistait principalement en l'étude des mesures anatomiques. Cette branche est maintenant devenue l'anthropologie biologique, essentiellement génétique. C'est ma propre spécialité. Il y a ensuite l'anthropologie sociale et culturelle, qui est très développée chez nous. Il y a enfin la paléontologie humaine, c'est-à-dire l'étude de l'évolution humaine par les fossiles.

❏ D'où vient la difficulté, pire, l'impossibilité de débattre sereinement de cette question de l'existence des races, puisque c'est bien là le cœur du problème ?
❍ L'anthropologie était une science florissante avant la dernière guerre mondiale, et notamment en Allemagne. Les nazis ont multiplié le nombre de chaires d'anthropologie et ceci a abouti finalement à tous les malheurs que l'on sait, en particulier pour le peuple juif. Les déclarations de l'UNESCO dans les années cinquante ont réuni un certain nombre d'experts qui ont considéré que la race n'avait pas de fondement scientifique, et qu'il fallait bannir ce terme de la littérature scientifique.

❏ Et tout le monde a suivi ?
❍ Globalement. En Europe, oui, le cas des Anglais étant particulier. En France, il a existé une chaire d'anthropologie physique au Collège de France, qu'on avait confiée au professeur Ruffié, et dont j'ai été le collaborateur très proche pendant plus de vingt ans. Le message officiel propagé par M. Ruffié dans son enseignement et ses nombreux livres était effectivement que les races n'existaient pas.

❏ Et outre-Atlantique ?
❍ Aux Etats-Unis, la situation est totalement différente car les professeurs d'anatomie, en médecine, sont souvent des anthropologues, et non des médecins comme en France. Il y a donc beaucoup de postes d'enseignement et les options au sujet de la race sont souvent très divergentes selon les individualités. De plus, comme vous le savez, les universités américaines sont «privées», chacune d'entre elles défendant jalousement son originalité, sur ce point comme sur beaucoup d'autres.

❏ Donc, le discours des scientifiques, contrairement à ce que l'on veut nous faire croire, n'est pas du tout uniforme ?
❍ Aux Etats-Unis, sûrement pas. En Europe, le discours s'est uniformisé pour les raisons que je vous ai dites. Il semble intéressant de faire remarquer que Langaney a été nommé en pleine mouvance socialiste; il répercute bien entendu, le moment venu, le bon discours. Je ne crois pas cependant - pour bien le connaître - qu'il soit intimement convaincu de la non-existence des races humaines et de leur non-fondement héréditaire.

❏ L'anthropologie physique a donc cédé la place à l'anthropologie génétique. Dites-nous, alors : les conclusions de la génétique sont-elles différentes de celles de l'anthropologie ? Que disent-elles ou que ne disent-elles pas ?
❍ L'anthropologie physique partait de la constatation «commune», de la reconnaissance des races : les Noirs, les Jaunes. et les Blancs. Le sens commun conclut à la reconnaissance visuelle et aussi à la nature héréditaire des races : tout le monde sait que lorsqu'un Noir Bantou se marie avec une Noire Bantou, ils ne peuvent donner naissance qu'à un petit Noir Bantou. Carl von Linné a, le premier, établi une classification générale des êtres vivants, dans laquelle il a fait entrer l'homme, tout naturellement. L'homme appartient au règne animal, à l'embranchement des Vertébrés, à la classe des Mammifères, à l'ordre des Primates, à la famille des Hominidés et au genre Homo, famille et genre dont le seul représentant actuel est l'espèce Homo sapiens. Celle-ci, à son tour, se divise en races. Linné - qui parlait de variétés - distinguait l'Européenne, l'Africaine, l'Asiatique et l'Américaine, découpant ainsi notre espèce, comme les autres espèces animales ou végétales, selon leur répartition géographique et leurs traits descriptifs et biologiques distinctifs.
L'un des rôles du scientifique est de donner une explication de ce qui peut être constaté par le sens commun. Exemple : tout le monde voit que la pomme tombe et Newton arrive pour nous expliquer les règles de la gravitation, c'est-à-dire comment et pourquoi la pomme tombe. Or aujourd'hui, dans l'anthropologie majoritaire, le discours est inverse. Langaney et les autres disent : nous sommes trompés par le message de nos sens. Quoi que voient nos yeux, quoi que nous constations, les races n'existent pas. Elles ne reposent de plus sur rien de tangible du point de vue biologique et génétique.

❏ Pourquoi ce discours contre le sens commun ?
❍ Sans doute pour un motif louable, mais quelque peu naïf. On pense que si l'on dit que les races n'existent pas, le racisme va disparaître. Il y a différentes sortes de racisme : le racisme économique, le racisme religieux ... et puis le racisme dit «zoologique», c'est-à-dire celui basé sur la réalité biologique de la race. Il est évident que si les races n'existent pas, il ne peut y avoir de fondement biologique au racisme.

❏ Cela, on l'a compris, c'est le discours officiel. Néanmoins, si on s'intéresse un petit peu aux sciences connexes de l'anthropologie - on pense à la biologie, à la médecine, à la médecine légale, etc. - on s'aperçoit que tout va dans le sens contraire, c'est-à-dire la recherche des particularismes, non ?
❍ Exactement. La biologie tout entière est contre cette notion que les races n'existent pas. Au contraire, et de nombreux travaux vont dans ce sens, on étudie les particularismes «ethniques» (on a le droit de parler d'ethnie, pas de race). Dans tous les travaux, repris par tous les grands périodiques de médecine, on démontre par exemple une susceptibilité différente à la plupart des maladies, y compris les maladies infectieuses, selon les races. Principalement dans les études américaines qui comparent les Noirs avec les Blancs ou les Hispaniques, on trouve pratiquement toujours des différences du point de vue physiologique, L'autre champ d'application est la médecine légale. La police scientifique - et en particulier le FBI - ont ainsi, en travaillant sur les marqueurs génétiques modernes (technique des empreintes génétiques), mis au point des techniques ultrasophistiquées. En cas de viol, par exemple, elles permettent pratiquement d'identifier l'ethnie à laquelle appartient le coupable - en particulier s'il est de race noire ou bien caucasienne. On constitue donc des fichiers d'empreintes génétiques, comme on a actuellement les fichiers d'empreintes digitales. C'est une recherche très développée aux Etats-Unis et qui commence à l'être un peu en France.

❏ II y a donc, effectivement, une réalité pratique qui vient démentir le discours officiel ?
❍ Mais bien sûr, et on peut chaque semaine le constater. Prenez des revues scientifiques comme The Lancet, ou bien The New England journal of medicine. Dans chaque livraison, au moins un article à chaque fois consiste à comparer des performances physiologiques selon les races et on trouve des différences notables.

❏ Donc, les races existent. Maintenant, y a-t-il une inégalité des races, et si oui, dans quel domaine ?
❍ Il faut s'entendre sur le terme d'égalité et d'inégalité. Pour moi, ce ne sont pas des termes scientifiques. Prenons l'art, par exemple : il n'y a aucune «supériorité» de l'art Inca par rapport aux pyramides d'Egypte ou à la polyphonie des chants Pygmées. C'est différent, c'est tout, et chaque race peut aboutir, à sa façon, à des performances extraordinaires. En revanche, on peut dire qu'il y a une «inégalité» [précisé, «entre guillemets» NDLR] génétique profonde entre les races. Par exemple, chez les Européens, la mucoviscidose est une maladie très commune que les Noirs n'ont pas, ou très peu. A l'inverse, les Noirs souffrent de l'anémie falciforme qui est due à une mutation de l'hémoglobine, Les Juifs Ashkénazes ont la maladie de Tay-Sachs, une terrible atteinte neurologique des enfants. Pour des populations méditerranéennes, c'est la thalassénie, une autre mutation de l'hémoglobine. On peut donc dire que les races sont «inégales» dans le sens où chacune d'elles a un fardeau génétique particulier qui n'existe pas chez les autres.

❏ Langaney dit qu'il n'y a pas de races parce que nous avons une origine commune. Etes-vous d'accord avec cela ?
❍ Sur l'origine commune, tout à fait. Il y a origine commune de l'humanité, et divergence selon les continents à partir de cette origine. Chaque race est l'aboutissement d'une longue histoire biologique d'où résulte l'adaptation génétique au climat et aux conditions de vie. Chaque race est bien entendu adaptée au biotope dans lequel elle vit.

❏ Donc, à la base, Langaney et vous dites la même chose. Pourquoi, alors, lui et ses semblables nient-ils les races quand ils devraient les considérer comme l'apothéose de l'évolutionnisme biologique auquel, je pense - et s'agissant des espèces autres que l'espèce humaine- ils sont fort attachés ?
❍ Il y a bien une seule espèce humaine, et non plusieurs comme certains le croyaient à une époque. A l'intérieur de cette seule espèce, il y a diversification, c'est-à-dire différentes adaptations que sont les grandes races. Et à mon avis, il est très important que cette diversité - véritable trésor délicat de l'adaptation différentielle - soit maintenue.

❏ Sur quels sujets de recherche travaillez-vous ?
❍ Principalement sur la mucoviscidose en Europe, où je retrouve tous les particularismes ethniques (Bretons, Germaniques, Méditerranéens, Basques, Juifs ... ) et sur les marqueurs du chromosome Y, le chromosome de la masculinité, dont les variants présentent la particularité de rester inchangés au cours des générations pères-fils successives, ce qui en fait d'excellents traceurs de la différenciation humaine dans le sexe masculin.

❏ Sur toutes ces questions que nous avons évoquées, la société française développe donc comme dans bien d'autres domaines - une attitude complètement schizophrénique, en obligeant les scientifiques, relayés par les médias, à tenir un discours en contradiction totale avec les faits. Comment réagit votre milieu ?
❍ La plupart des scientifiques sont des gens honnêtes. Ils savent cependant que « la question de la race » sent le soufre et qu'il vaut mieux ne pas trop s'y attarder, ni surtout s'y prononcer. D'un côté il y a ceux qui caquettent avec la basse-cour et de l'autre - beaucoup plus nombreux - ceux qui restent à ce sujet silencieux. Personnellement, au cours de ma carrière, je n'ai jamais [avec insistance NDLR] rencontré de scientifiques niant objectivement l'existence des races et leur base héréditaire.

❏ Une dernière question : hors le motif, louable, de vouloir éradiquer le racisme, quel est à votre avis le but de ce détournement d'une vérité scientifique à des fins politiques ? Pourquoi s'acharner contre la nature et cela, si l'on vous comprend bien, contre l'intérêt même de l'humanité ?
❍ A mon avis, le débat scientifique devrait plutôt porter sur les difficultés de l'application du concept de race ! dans le cas de l'espèce humaine. Nous sommes en effet une espèce « très jeune » - de l'ordre de 200 000 ans seulement - et la «raciation» que nous observons actuellement n'est qu'un début du processus de différenciation.
Propos recueillis par Marie-Claire ROY National Hebdo du 30 janvier au 5 février 1997